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Ligue des droits de l'Homme

Section du Pays d'Aix-en-Provence

Archives du tag : Démocratie

Il y a dix ans, Charlie… 12 janvier, 2025

Communiqué LDH

Le 7 janvier 2015, onze personnes, dont huit membres de la rédaction de Charlie Hebdo, étaient assassinées par des terroristes islamistes lors d’un attentat contre l’hebdomadaire satirique. L’immense « Je suis Charlie » qui se lève en réponse, en France et bien au-delà dans le monde, dit alors ce que les mots, les formules convenues peinent à traduire : souffrance, peine, colère et, par-dessus tout, la détermination à ne pas subir, à défendre, dans un rassemblement unitaire sans équivalent dans notre histoire, le droit de critiquer, de rire et de penser, de croire ou ne pas croire, bref, d’être libre et heureux de l’être.

Au lendemain de l’attentat contre Charlie Hebdo, les présidents respectifs de la Licra, du Mrap, de SOS Racisme et de la LDH dans une déclaration commune, lançaient un cri d’alarme : « Sur fond de crise sociale permanente, la cohésion de notre pays a éclaté. Racisme et antisémitisme, stigmatisation d’une partie de la population, retour de la vieille antienne du bouc émissaire dont on ne retient que l’origine, relégation dans des ghettos territoriaux et scolaires, replis identitaires, ignorance de notre histoire, qu’elle concerne l’esclavage, la collaboration ou le colonialisme, et ces mots d’exclusion devenus si quotidiens au nom d’une conception dévoyée de la liberté d’expression. Pire, certains détenteurs de la parole publique n’ont pas su, et parfois pas voulu, respecter les symboles de l’égalité républicaine ». Ils en appelaient à la mobilisation des « hommes et les femmes de ce pays qu’il faut rassembler autour non d’une incantation, mais d’une République effective pour tous. »

Cet appel n’a rien perdu de sa pertinence ni de son urgence. De fait, depuis le funeste attentat contre Charlie, d’autres crimes antisémites, d’autres attentats meurtriers sont venus confirmer l’existence de forces ténébreuses et sanguinaires, déterminées à faire de la terreur l’arme privilégiée d’une guerre contre les valeurs d’égalité, de fraternité, de liberté, celles-là mêmes qui fondent la République et la démocratie. S’ils ont toujours échoué à mettre en péril la paix civile, ils ont, hélas, largement été mis à profit par des forces ouvertement hostiles aux personnes se réclamant de l’islam et ont servi de point d’appui à la mise en place de restrictions toujours plus importantes à l’exercice des libertés et des droits civils.

Dix ans après Charlie, alors que les thématiques d’exclusion racistes ont aujourd’hui pignon sur rue, que les actes et propos antisémites se sont multipliés, que les mesures de censure – franche ou sournoise – prolifèrent contre les militants, associatifs, écologistes, syndicalistes, cet appel à l’effectivité des droits, au rassemblement contre les forces de la haine, de la division et du bâillon, demeure d’une brûlante actualité.

Alors que la France vient de commémorer cette grande loi de liberté qu’est la loi de 1905 portant sur la séparation des églises et de l’Etat, la LDH (Ligue des droits de l’Homme) entend plus que jamais poursuivre ses efforts de rassemblement dans les engagements multiples de la société civile pour les droits, l’égalité, la liberté et la fraternité.

Paris, le 6 janvier 2025

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Source: Il y a dix ans, Charlie…

Et maintenant, monsieur le Président, respectez la majorité qui par son vote a tenu l’extrême droite hors du pouvoir ! 7 décembre, 2024

Communiqué LDH

Avec la motion de censure votée ce jour à l’Assemblée nationale, le gouvernement de Michel Barnier tombe. Il ne pouvait guère en être autrement au vu de son assise politique.

Ce gouvernement regroupait les forces arrivées en troisième et quatrième position, tant au premier tour des législatives qu’en nombre d’élu-e-s au Parlement. Les premières, au centre-droit, avaient contribué à la défaite de l’extrême droite par leur désistement dans les circonscriptions où le Rassemblement National (RN) était arrivé en première position, comme l’ont fait l’ensemble des forces progressistes et de gauche. Les secondes s’y sont montrées indifférentes dans la plupart des cas, mais ont été élues en bénéficiant du désistement de toutes les forces de gauche et du centre.

Le choix de mener des politiques en comptant sur une non-censure par l’extrême droite, et, dans la dernière période, en reprenant ses pires propositions comme sur l’aide médicale d’Etat (AME), a montré l’incongruité des choix faits en lien avec la nomination de M. Barnier.

Aujourd’hui, il relève du rôle de président de la République de nommer à la tête du gouvernement, dans le respect des votes exprimés aux premier et second tour des législatives et des équilibres parlementaires qui en ont résulté, une personne à même de s’appuyer sur les forces qui ont défait l’extrême droite, pour mener une politique qui mette au centre l’accès de toutes et tous à leurs droits. La société civile, qui s’est mobilisée très largement face à l’extrême droite, a fait part de ses attentes en ce sens et rien ne sera possible sans elle. Un choix qui ferait abstraction de ce cadre marquerait un nouveau coup à ce qu’implique la démocratie représentative et se payerait directement dans le débat public.

Monsieur le Président, respectez le suffrage populaire, qui a fait barrage à l’extrême droite en demandant la constitution d’un gouvernement guidé par l’égalité des droits et la justice sociale !

Paris, le 4 décembre 2024

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Source: Et maintenant, monsieur le Président, respectez la majorité qui par son vote a tenu l’extrême droite hors du pouvoir !

« On lâche rien ! » Manifester spontanément est l’exercice d’une liberté 4 décembre, 2024

Communiqué commun

Nos organisations viennent d’obtenir l’annulation de la totalité des nombreux arrêtés pris par le préfet de police interdisant toute manifestation spontanée à Paris contre la réforme des retraites au printemps 2023, réforme toujours aussi massivement rejetée.

Le tribunal administratif de Paris a jugé qu’une telle interdiction « portait atteinte au droit à la liberté de réunion pacifique », protégée par l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’Homme. Cette décision, en date du 29 novembre 2024, est d’autant plus importante que le préfet de police avait cru bon de justifier les arrestations en considérant que, dès lors que les manifestations étaient interdites, les manifestantes et manifestants commettraient le délit de participation volontaire à un groupement formé en vue de commettre des violences ou des dégradations, entretenant ainsi une confusion illégale. Rappelons à cet égard que la Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté avait rendu un rapport sur ses visites dans des commissariats parisiens pendant cette période et avait questionné la « finalité réelle » des gardes à vue effectuées, en dénonçant « un recours massif à titre préventif… à des fins de maintien de l’ordre ».

Quoi qu’il en soit, de nombreuses verbalisations ont été effectuées pour participation à une manifestation interdite et des modèles de contestation avaient dû être proposés pour aider les personnes concernées. Aujourd’hui, nous avons obtenu la reconnaissance de ce que les arrêtés au fondement de ces verbalisations étaient illégaux.

Autre victoire importante : l’interdiction de port et de transport d’équipements de protection a également été annulée. Le tribunal a en effet jugé qu’il était logique de vouloir se protéger des gaz et projections ou du bruit des grenades, pour pouvoir exercer sa liberté de réunion pacifique ou d’expression. Les saisies de bouchons d’oreille, de lunettes de piscine ou de sérum physiologique sont illégales, et le tribunal vient de juger que leur interdiction de port et transport est également illégale.

Cette décision indique sans conteste que, lorsque le gouvernement veut faire passer en force un texte de loi à l’Assemblée, il n’est pas pour autant fondé à réprimer les citoyennes et citoyens qui souhaiteraient se réunir spontanément et exprimer pacifiquement leur opposition à ce texte.

Jamais nous ne laisserons museler la démocratie. Forts de cette nouvelle victoire nous continuerons inlassablement à nous battre pour défendre la liberté fondamentale de manifester !

Signataires : Confédération générale du travail (CGT), Union départementale de la CGT Paris, LDH (Ligue des droits de l’Homme), Syndicat des avocats de France (Saf), Syndicat de la magistrature (SM), Union syndicale Solidaires.

Paris, le 3 décembre 2024

Télécharger le communiqué LDH « « On lâche rien ! » Manifester spontanément est l’exercice d’une liberté » en format PDF

Source: « On lâche rien ! » Manifester spontanément est l’exercice d’une liberté

D&L 207 – Une remise en cause de l’Etat de droit désormais assumée 29 octobre, 2024

D&L 207 – La France sait-elle décoloniser ? Le désastre calédonien 29 octobre, 2024

Pour une démocratie pleine et entière, défendons l’Etat de droit ! 2 octobre, 2024

Communiqué commun à l’initiative de la LDH

Dimanche 29 septembre 2024, le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, se disait « habité par un sentiment de gravité » lorsqu’il a parlé de sujets relevant de la démocratie, de la lutte contre l’arbitraire… à la façon dont le font les régimes autoritaires, les démagogues penchants à l’extrême droite. Avec une légèreté effrayante, il a affirmé reléguer l’Etat de droit au nombre des scories encombrantes de la contrainte juridique. Selon lui, « l’Etat de droit n’est pas intangible » mais devrait évoluer en fonction des besoins définis par les politiques nationales.

Or, c’est bien l’inverse qui fonde l’Etat de droit. Pour protéger de l’arbitraire du pouvoir du moment, l’Etat de droit, ce sont des règles à respecter qui assurent la protection des citoyennes et citoyens comme des institutions. Ces règles s’appuient sur des outils juridiques, dont l’indépendance des juges, pour que ne s’impose pas la loi du plus fort. Loin de s’opposer au peuple, l’Etat de droit est, au contraire, la garantie de l’égalité de toutes les citoyennes et tous les citoyens qui le composent et de sa libre expression contre toutes les oppressions, individuelles ou collectives. L’Etat de droit est une condition de la démocratie.

L’Etat de droit reprend des éléments clefs de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 avec, par exemple, le principe de la séparation des pouvoirs, de la garantie des droits et de l’égalité de toutes et tous devant la loi.

C’est le propre de l’extrême droite, et dorénavant de plus en plus des droites extrêmes, de ne pas reconnaître l’universalité des droits, de nier l’égalité en droit de toutes et tous. Pour que certaines et certains ne puissent se revendiquer de droits, ni obtenir leur protection par un juge, il faut à ces courants politiques démanteler les garanties qu’apporte un Etat de droit.

Bruno Retailleau refuse l’Etat de droit, qui a en son centre l’égal traitement de chaque individu, affirmant qu’au-dessus il y aurait « la vox populi » qui imposerait sa loi en toute chose. La démocratie n’est pourtant pas la dictature de la majorité, elle ne saurait être une opération formelle, sans cadre de valeurs, de principes, se réduisant à un vote.

La séparation des pouvoirs doit être garantie lorsque le Parlement vote la loi. Le Parlement peut d’ailleurs modifier ou abroger un texte déjà voté. Il ne peut en revanche remettre en cause les droits et les libertés inscrites dans les textes à valeur constitutionnelle, qui sont de niveau supérieur aux lois ordinaires, comme par exemple la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 ou le Préambule de la Constitution de 1946 (cité dans celui de la Constitution de la Ve République) ou dans la Constitution au sens strict, pour prendre un exemple, « la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ».Il ne peut pas non plus déroger aux conventions ratifiées par la France (ce qui a nécessité un vote du Parlement), comme la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ou la Convention des droits de l’enfant (Cide) ou celle d’Istanbul contre la violence à l’égard des femmes, etc., qui participent à la garantie des droits sans laquelle il n’y a pas d’espace démocratique.

Etat de droit et démocratie sont intimement liés. Ils progressent ensemble et régressent ensemble…

Face à la montée de la haine et de l’autoritarisme, et parce que nous sommes attachés aux principes fondamentaux de la démocratie, nous le disons solennellement : nous défendrons l’Etat de droit.

Un appel à l’initiative de la LDH (Ligue des droits de l’Homme) et signé par Confédération générale du travail (CGT), La Cimade, Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), Fédération syndicale unitaire (FSU), Mouvement contre le racisme et l’amitié entre les peuples (Mrap), Oxfam France, SOS Racisme, Syndicat de la Magistrature (SM).

Autres signataires :

Agir ensemble contre le chômage  (AC !), Alternatives Européennes (AE), Les Amoureux au ban public, APF France handicap, L’Assemblée Citoyenne des Originaires de Turquie (L’Acort), Association de Défense des Droits de l’Homme au Maroc (Asdhom), Association française des juristes démocrates (AFJD), Association France Palestine Solidarité (AFPS), Association Histoire coloniale et postcoloniale, Céméa France, Collectif des associations citoyennes (CAC), Collectif Changer de Cap, Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire (Cnajep), Comité pour le respect des libertés et des droits de l’homme en Tunisie (CRLDHT), Commerce Equitable France (CEF), Confédération nationale du logement (CNL), Conseil national des associations familiales laïques (Cnafal), Convention pour la 6* République (C6R), Coordination antifasciste pour l’affirmation des libertés academiques et pedagogiques (CAALAP), Coordination française pour le Lobby Européen des Femmes (CLEF), Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité, Coordination nationale urgences accès aux soins pour tous Marmande, Culture XXI, Europe solidaire sans frontières (ESSF), Fédération des associations générales étudiantes (FAGE), Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT), Fédération des Tunisiens citoyens des deux rives (FTCR), Fondation Copernic, Fondation Lilian Thuram Education contre le racisme pour l’égalité, Générations Futures (GF), Generation for Rights Over the World (Grow), Humanity Diaspo (HD), Jesuit Refugee Service France (JRS France), Les Libres Apprentis-Sages de la Vie, Le Lierre, Ligue de l’enseignement, Ligue des femmes iraniennes pour la démocratie (LFID), La Maison des Pas Que, Migraction59, Mouvement pour une alternative non-violente (MAN), Mouvement National Le CRI, Mouvement pour l’économie solidaire (MES), On est prêt, Patron.nes Solidaires, POLLINIS, Réseau d’Actions contre l’Antisémitisme et tous les Racismes (RAAR), Réseau Education sans frontières (RESF), Syndicat national des journalistes (SNJ), Syndicat national des journalistes CGT (SNJ-CGT), Une Autre Voix Juive (UAVJ), Union étudiante, Union fédérale d’intervention des structures culturelles (UFISC), Utopia 56.

Les organisations qui souhaitent signer l’appel « Pour une démocratie pleine et entière, défendons l’Etat de droit ! » peuvent remplir ce formulaire

Paris, le 1er octobre 2024

Source: Pour une démocratie pleine et entière, défendons l’Etat de droit !

Adresse solennelle au président de la République 6 août, 2024

Communiqué LDH

La LDH (Ligue des droits de l’Homme) exprime son inquiétude à l’égard de la situation institutionnelle de la France.

À l’issue des élections législatives provoquées par une dissolution et la mobilisation de l’électorat pour que cette décision n’aboutisse pas à donner le pouvoir politique à l’extrême droite, le président de la République a décidé de ne pas décider. Ses propos récents arguant du déroulement d’une compétition sportive pour reporter la poursuite du processus institutionnel sont à l’image du désordre qu’il a installé.

Ainsi d’un gouvernement démissionnaire dont les membres élu-e-s député-e-s ont pris part au vote pour désigner des représentants de l’Assemblée nationale, en retenant une interprétation discutable de l’article 23 de la Constitution qui interdit de cumuler les fonctions de membre du gouvernement et du parlement, interrogeant sur une atteinte faite au principe de séparation des pouvoirs, fondement de l’Etat de droit, de la démocratie et de la République.

Ainsi du refus de nommer une Première ou un Premier ministre proposé par la coalition parlementaire qui dispose du plus grand nombre de député-e-s à l’Assemblée nationale. Une atteinte à la pratique républicaine usuelle et au message des électrices et électeurs qui ont exprimé au second tour le clair rejet d’un gouvernement d’extrême droite, après avoir placé le camp présidentiel en troisième position au premier tour, loin derrière la gauche.

Mais plus encore de refuser de nommer une Première ou un Premier ministre ayant charge de constituer un gouvernement présenté au Parlement, alors même que cette obligation résulte de l’article 8 de la Constitution, quand bien même celle-ci ne prévoit pas de délai. Inversant l’ordre des chose, le Président invente un processus qui le ferait juge a priori de ce que majorité doit inclure et exclure.

Avec une telle lecture de ses pouvoirs, le Président pourrait s’autoriser à se passer de gouvernement jusqu’à l’issue de son mandat. L’absence de gouvernement de plein exercice laisse entre les mains du président de la République une concentration inédite des pouvoirs politiques, dont il serait seul à déterminer la durée. Sans base constitutionnelle, ce choix va à l’encontre de ses responsabilités essentielles de chef de l’Etat qui « veille au respect de la Constitution [et] assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’Etat » (article 5).

Laisser perdurer une telle situation ne peut que conduire à une désaffection des électrices et des électeurs vis à vis de la chose politique. Après plus d’une dizaine d’années marquée par une brutalisation des institutions et de la démocratie, il est grand temps de restaurer un fonctionnement d’institutions démocratiques.

La LDH, depuis toujours défenseuse d’un fonctionnement démocratique des institutions de la République, demande solennellement au président de la République de respecter la Constitution dans sa lettre et dans son esprit, et à ce titre, sans plus attendre, dans son rôle institutionnel, de nommer un-e chef-fe de gouvernement.

Paris, le 25 juillet 2024

Télécharger le communiqué « Adresse solennelle au président de la République » en format PDF

Source: Adresse solennelle au président de la République

1er août 20524 – Tribune de Nathalie Tehio « Des jeux et du spectacle… n’apportent pas les réponses politiques nécessaires » publiée sur Mediapart 6 août, 2024

Les Jeux olympiques sont l’occasion d’une grande fête populaire.

Voilà qu’ils deviennent surtout le prétexte à un report sine die de la mise en place d’un gouvernement ! Le président de la République nous explique que la bonne tenue des jeux passe avant la désignation d’un-e Premier-e ministre… qui attendra donc !

Rappelons qu’il a pris la responsabilité (l’irresponsabilité !) de la dissolution de l’Assemblée nationale alors que l’extrême droite paraissait en mesure d’avoir la majorité. L’évidence de l’approche des JO n’avait pas compté.

Ce n’est que grâce à la mobilisation de la société civile, à l’union des partis de gauche, et aux désistements de candidats arrivés en troisième position que le pire a été évité. Il est d’autant plus regrettable que beaucoup de candidats de droite aient refusé de se désister pour le candidat du Nouveau Front populaire mieux placé à l’issue du premier tour, augmentant ainsi le nombre d’élus d’extrême droite.

Malgré cette irresponsabilité de la droite, on voit le président rechercher avant toute autre chose une alliance entre les députés des partis qui le soutiennent et la droite. Pour lui, cette alliance, qui a permis la réélection au perchoir de Yaël Braun-Pivet, devrait maintenant conduire à d’autres continuités au service de politiques pourtant largement rejetées par l’électorat.

L’usage dans la République est que la coalition qui a le plus grand nombre d’élus à l’Assemblée nationale propose un ou une candidate que le président appelle comme Premier-e ministre, quitte à ce que l’Assemblée vote une motion de censure. En l’occurrence, c’est Lucie Castets qui est proposée par le Nouveau Front populaire.

Ajoutant au désordre créé par le président de la République, voici la lettre et l’esprit de l’article 23 de la Constitution détournés au bénéfice d’une interprétation discutable de l’article Lo 153 du code électoral. Au prix d’une confusion entre pouvoirs législatif et exécutif, les ministres qui ont été élu-e-s député-e-s votent comme parlementaires. Pourtant, l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 proclame qu’à défaut de séparation des pouvoirs, la société est sans constitution.

Pendant ce temps, de l’autre côté de la planète, la Nouvelle-Calédonie est toujours en proie à de vives tensions. L’absence d’exécutif en France à même de prendre les décisions nécessaires empêche de réouvrir une perspective de solution politique, dans la ligne de celle qui prévaut depuis quatre décennies maintenant. La visite éclair à Nouméa de la ministre démissionnaire ne pouvait pas trouver de débouché politique.

Il est pourtant urgent de restaurer le dialogue et de trouver une solution politique durable, légitime, rompant avec les approches de fait coloniales. L’économie est à l’agonie, l’usine de nickel du Nord licencie plus d’un millier de salariés, sans compter l’explosion du nombre de chômeurs en raison de la destruction des entreprises.

Le risque d’une guerre civile est là : les discours de haine raciste qui resurgissent de part et d’autre, et la radicalisation des plus jeunes Kanaks qui pratiquent la politique de la terre brûlée, durcissent jour après jour le climat politique. Cela touche désormais l’ensemble du territoire, alors que les destructions ne concernaient que Nouméa et les communes proches au départ. Le président de l’Union calédonienne (l’une des composantes du FLNKS – Front de libération nationale kanak et socialiste), Daniel Goa, a promis la proclamation de l’indépendance pour le 24 septembre 2024 (date anniversaire de la prise de possession de la Nouvelle-Calédonie par la France) avant de la repousser à 2025. La présidente de la province Sud, Sonia Backès, propose une partition de l’île, Nouméa restant française, sous-entendant la séparation des Kanaks des autres communautés. Et, pour la première fois depuis des décennies, les départs définitifs sont massifs.

Quant à la justice, elle ne joue pas son rôle, qui pourrait être pacificateur. Ainsi, elle maintient à 17 000 km de chez eux des responsables politiques indépendantistes. Le fait que deux d’entre eux soient désormais sous assignation à résidence et non plus en détention ne répare pas l’éloignement géographique et familial, qui n’aurait pas dû être décidé. Malgré les accusations de violences des milices privées contre les jeunes Kanaks, le parquet n’ouvre pas d’enquêtes. La justice ne doit pas seulement être rendue, elle doit l’être avec impartialité.

Le droit à l’autodétermination du peuple kanak doit être respecté par l’Etat français. Cette promesse, inscrite dans les accords de Matignon et Nouméa qui fixaient le chemin d’un avenir partagé, a été mise à bas par la décision de tenir un troisième référendum sur l’indépendance sans concertation avec les indépendantistes, puis par le dégel du corps électoral aux élections provinciales. Il est urgent, au sens le plus fort et littéral du terme, que le futur gouvernement abandonne définitivement cette réforme et ouvre un cadre de dialogue pour trouver une voie politique pacifique. L’accord de Nouméa de 1998 portait en germe la possibilité d’une décolonisation permettant aux descendants de colons et aux différentes communautés d’intégrer la nouvelle nation. Il est encore possible de poursuivre le chemin de la décolonisation ouvert en 1988 avec les accords Matignon-Oudinot. Mais jusqu’à quand, alors que le pouvoir présidentiel en France n’inscrit pas ses décisions dans ce cadre ?

En l’absence d’un gouvernement français constitué et de plein exercice, capable de reprendre le rôle d’arbitre, et avec un président qui ne semble pas prendre en compte l’urgence de revenir sur les désordres que ses décisions ont créés, même s’il a reçu les élus de Nouvelle-Calédonie, l’espoir s’éloigne un peu plus chaque jour.

Que le président ne pense pas que le spectacle des jeux nous fasse oublier sa responsabilité première : nommer un-e Premier-e ministre pour que le nouveau gouvernement puisse répondre aux besoins de celles et ceux qui ont toutes raisons de se sentir rejetés, méprisés, niés. Liberté, Egalité, Fraternité, Sororité, Respect… ne sont pas que des mots sur un écran de télévision retransmettant une cérémonie d’ouverture de Jeux olympiques.

Nathalie Tehio, présidente de la LDH

Source: 1er août 20524 – Tribune de Nathalie Tehio « Des jeux et du spectacle… n’apportent pas les réponses politiques nécessaires » publiée sur Mediapart

Pour un front commun des forces progressistes face à l’extrême droite 13 juin, 2024

Communiqué LDH

Le résultat des élections européennes correspond à ce que les sondages laissaient présager. L’annonce immédiate d’une dissolution de l’Assemblée nationale par le président de la République ouvre l’éventualité d’une majorité d’extrême droite. Cette perspective serait évidemment un désastre pour la République française et pour les valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité que nous portons, qui n’ont jamais été aussi menacées depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

La LDH (Ligue des droits de l’Homme) appelle dès à présent l’ensemble des forces politiques progressistes à dialoguer, à mettre l’ensemble de leurs divergences de côté, à se mobiliser afin de proposer un front commun dans le champ électoral face à l’adversité. Elle va chercher sans tarder à travailler à cela avec toutes les forces syndicales et associatives qui partagent cet objectif avec elle.

Paris, le 10 juin 2024

Télécharger le communiqué LDH en pdf.

Source: Pour un front commun des forces progressistes face à l’extrême droite

L’union européenne, un enjeu citoyen 29 mai, 2024

Comme c’est le cas au niveau national et local, le niveau européen est plus que jamais un espace de mobilisation pour les droits économiques, sociaux, environnementaux, culturels, pour les libertés publiques, pour l’égalité et la solidarité, contre les discriminations, pour des sociétés inclusives et accueillantes. Une démocratie renforcée ne peut se concevoir qu’avec des politiques publiques répondant à ces revendications.

Votons pour dire que :

• nous voulons une Europe qui garantisse l’accès aux droits fondamentaux, pour toutes les personnes qui résident sur son territoire, sans distinction ;
• chacune des politiques européennes doit inclure l’effectivité et l’indivisibilité des droits ;
• l’Europe doit être un espace de libertés, d’Etat de droit et de démocratie, en renversant les tendances inverses qui s’expriment dans nombre de pays, mais aussi par des politiques décidées au niveau communautaire.

Le dimanche 9 juin 2024

Allons voter pour contribuer à réduire le poids des extrêmes droites et de celles et ceux qui les rejoignent, et ainsi refuser qu’on supprime l’accès aux droits d’une partie de celles et ceux qui vivent sur notre territoire, au motif que cet accès serait mieux assuré si les droits étaient réservés aux nationaux ! Votons, pour que ces demandes n’aient aucune légitimité à peser sur les politiques européennes des années à venir.

Allons voter pour affirmer que les politiques publiques ne sauraient se limiter au seul objectif « d’égalité des chances ». Menées depuis des décennies, ces politiques laissent nombre de personnes sans accès effectif aux droits fondamentaux. Elles construisent des précarités et développent les peurs qui détruisent les solidarités qui doivent fonder nos sociétés.

La LDH, qui est active avec nombre d’associations pour porter le combat des droits au niveau des institutions européennes, espère continuer à trouver au Parlement européen des personnes élues, appartenant à plusieurs des groupes politiques, qui porteront l’objectif de « tous les droits pour toutes et tous ». Nos combats auront besoin de forces politiques qui partagent cet objectif.

A chacune et à chacun d’y contribuer par son vote le 9 juin.


Source: L’union européenne, un enjeu citoyen