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Ligue des droits de l'Homme

Section du Pays d'Aix-en-Provence

Archives par catégorie : Articles

Il y a dix ans, Charlie… 12 janvier, 2025

Communiqué LDH

Le 7 janvier 2015, onze personnes, dont huit membres de la rédaction de Charlie Hebdo, étaient assassinées par des terroristes islamistes lors d’un attentat contre l’hebdomadaire satirique. L’immense « Je suis Charlie » qui se lève en réponse, en France et bien au-delà dans le monde, dit alors ce que les mots, les formules convenues peinent à traduire : souffrance, peine, colère et, par-dessus tout, la détermination à ne pas subir, à défendre, dans un rassemblement unitaire sans équivalent dans notre histoire, le droit de critiquer, de rire et de penser, de croire ou ne pas croire, bref, d’être libre et heureux de l’être.

Au lendemain de l’attentat contre Charlie Hebdo, les présidents respectifs de la Licra, du Mrap, de SOS Racisme et de la LDH dans une déclaration commune, lançaient un cri d’alarme : « Sur fond de crise sociale permanente, la cohésion de notre pays a éclaté. Racisme et antisémitisme, stigmatisation d’une partie de la population, retour de la vieille antienne du bouc émissaire dont on ne retient que l’origine, relégation dans des ghettos territoriaux et scolaires, replis identitaires, ignorance de notre histoire, qu’elle concerne l’esclavage, la collaboration ou le colonialisme, et ces mots d’exclusion devenus si quotidiens au nom d’une conception dévoyée de la liberté d’expression. Pire, certains détenteurs de la parole publique n’ont pas su, et parfois pas voulu, respecter les symboles de l’égalité républicaine ». Ils en appelaient à la mobilisation des « hommes et les femmes de ce pays qu’il faut rassembler autour non d’une incantation, mais d’une République effective pour tous. »

Cet appel n’a rien perdu de sa pertinence ni de son urgence. De fait, depuis le funeste attentat contre Charlie, d’autres crimes antisémites, d’autres attentats meurtriers sont venus confirmer l’existence de forces ténébreuses et sanguinaires, déterminées à faire de la terreur l’arme privilégiée d’une guerre contre les valeurs d’égalité, de fraternité, de liberté, celles-là mêmes qui fondent la République et la démocratie. S’ils ont toujours échoué à mettre en péril la paix civile, ils ont, hélas, largement été mis à profit par des forces ouvertement hostiles aux personnes se réclamant de l’islam et ont servi de point d’appui à la mise en place de restrictions toujours plus importantes à l’exercice des libertés et des droits civils.

Dix ans après Charlie, alors que les thématiques d’exclusion racistes ont aujourd’hui pignon sur rue, que les actes et propos antisémites se sont multipliés, que les mesures de censure – franche ou sournoise – prolifèrent contre les militants, associatifs, écologistes, syndicalistes, cet appel à l’effectivité des droits, au rassemblement contre les forces de la haine, de la division et du bâillon, demeure d’une brûlante actualité.

Alors que la France vient de commémorer cette grande loi de liberté qu’est la loi de 1905 portant sur la séparation des églises et de l’Etat, la LDH (Ligue des droits de l’Homme) entend plus que jamais poursuivre ses efforts de rassemblement dans les engagements multiples de la société civile pour les droits, l’égalité, la liberté et la fraternité.

Paris, le 6 janvier 2025

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Source: Il y a dix ans, Charlie…

RSA : déjà sous surveillance, les pauvres passent sous contrainte 12 janvier, 2025

Communiqué LDH

La loi dite pour le plein emploi est entrée en vigueur le 1er janvier 2025. L’une de ses dispositions concerne le revenu de solidarité active (RSA) et impose aux bénéficiaires de ce minima social une condition de quinze heures hebdomadaires d’activité et d’être inscrits auprès de France travail, ainsi que leur conjoint-e.

Ces deux mesures qui concernent les populations les plus fragiles, vivant souvent la pauvreté et la précarité, introduisent une conditionnalité contraire au droit à un niveau de vie suffisant et mettent ces personnes et leur famille sous la contrainte d’être privées d’une partie ou de la totalité de leurs ressources.

Le RSA était déjà sous un régime de surveillance, au prétexte de s’opposer à une fraude sociale possible. La réalité n’est pas celle-là : compte tenu de la stigmatisation et des risques de discrimination que constatent les titulaires du RSA et aux multiples contrôles opérés par la caisse d’allocations familiales (CAF), avec des algorithmes dont les déviations ont été largement documentées, nombre des possibles demandeurs renoncent à faire valoir leurs droits. L’Etat devrait s’attacher au contraire à lutter contre ce non-recours qui concerne les plus précaires.

Le RSA conditionné, contenu dans la loi, fait passer l’ensemble des bénéficiaires sous la double contrainte de l’inscription à France Travail et de l’exercice d’un temps d’activité. Cette mise en rapport d’un droit et d’un devoir est fausse, et dangereuse dans la mesure où l’on ne devrait pas soumettre l’effectivité d’un droit à une limitation contractuelle et spécialement lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre le droit à des moyens convenables d’existence (le montant maximal du RSA, très en-dessous du seuil de pauvreté, ne répond d’ailleurs pas à l’exigence de « moyens convenables »).

Pour la LDH (Ligue des droits de l’Homme), cette double contrainte est le résultat de la conception du droit social et de la protection sociale uniquement comme un coût prohibitif, le fameux « pognon de dingue » dont l’énoncé est du président de la République. En reportant la responsabilité de leur état sur les personnes elles-mêmes, supposées avoir arbitré en faveur de l’assistance plutôt que de rechercher un emploi, la loi fait du fonctionnement du marché du travail le régulateur de la politique sociale. L’exigence de solidarité est totalement évacuée.

La Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), dans sa déclaration du 19 décembre 2024 sur le RSA conditionné, a demandé au gouvernement de surseoir à sa généralisation alors même que les évaluations de la période expérimentale n’ont pas encore été pris en compte. La LDH partage l’entièreté de cette déclaration.

Par ailleurs, ces nouvelles dispositions vont se traduire par une charge de travail supplémentaire pour les agents de la CAF et de France Travail, alors que ceux-ci ne cessent de dénoncer l’insuffisance des moyens dont ils disposent pour l’accompagnement social nécessité par la précarité de certains bénéficiaires. De plus, leur action sera davantage tournée vers le contrôle que vers une démarche pro-active d’aide.

Pressé de donner l’impression d’agir contre un fantasmatique « assistanat », le gouvernement va faire payer par les pauvres leur pauvreté.

Paris, le 8 janvier 2025

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Source: RSA : déjà sous surveillance, les pauvres passent sous contrainte

9 janvier 2025 – Tribune de Nathalie Tehio « 2025, bonne année ? Bonne année ! » publiée sur Mediapart 12 janvier, 2025

Tribune de Nathalie Tehio, présidente de la LDH

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La tradition, en cette nouvelle année, est de souhaiter à toutes et tous santé et bien-être ! Au vu de l’année éprouvante dont nous sortons, ce n’est pas qu’une tradition, c’est aussi, surtout, un horizon commun qu’il s’agit de construire.

2024 aura été en effet marquée par la montée de l’extrême droite, une confusion délétère quant à ce qui fait la substance démocratique du pays, et par un recul des libertés et des droits. Tout indique que ces maux vont perdurer en 2025 et qu’il nous faudra y faire face, sauf à admettre l’inadmissible : une dynamique grandissante des haines racistes, xénophobes, misogynes et homophobes, la stigmatisation des pauvres et des étrangers…

En 2024, la LDH a contribué à éviter le pire en se mobilisant fortement, avec d’autres organisations, contre l’arrivée de l’extrême droite au gouvernement. La frustration et la colère n’en sont que plus grandes de voir le président de la République s’obstiner à ignorer ce rejet et à persévérer dans une politique économique profondément inégalitaire, de nature à exacerber tous les ressentiments. Dans ce contexte tendu et dangereux, nous nous devons de continuer à multiplier nos efforts pour que l’extrême droite n’arrive jamais au gouvernement, et pour qu’elle pèse le moins possible au niveau local.

Cette bataille, nous la menons de longue date, dans tous ses aspects. Face aux attaques contre l’État de droit, dont l’actuel ministre de l’Intérieur s’est fait une marque de fabrique ; contre la novlangue de l’extrême droite qui inverse le sens des mots et travestit les agresseurs en victimes, la liberté en oppression, l’assignation à résidence en simple revendication d’identité ; contre enfin les « préférences nationales » de tous ordres, tant elles ne visent qu’à une seule chose : miner le caractère universel des droits fondamentaux en opposant les ayant droits entre eux, entre ceux qui seraient légitimes à s’en réclamer et ceux qui ne le seraient pas. Mise en œuvre, cette philosophie aboutit à élargir toujours plus le cercle des exclus. Pour ce faire, aucune démagogie n’est laissée de côté : on se réclame des luttes féministes pour stigmatiser les étrangers, dans des raccourcis de la pensée qui ne seraient que ridicules si les médias bollorisés n’en faisaient pas leur quotidien. La loi de 1905, loi de liberté dont on va fêter les 120 ans, subit le même sort ; elle se retrouve instrumentalisée contre les musulmans et des maires d’extrême droite s’en réclament pour violer la neutralité des collectivités territoriales en matière de culte, en installant des crèches de la nativité (et revendiquées telles) à l’intérieur même des mairies.

La défense des libertés et d’une justice qui en soit garante reste dans ce contexte au cœur de nos mobilisations. Car les libertés sont évidemment les premières cibles de gouvernements qui ne conçoivent que le passage en force, la neutralisation des contre-pouvoirs et la répression pour imposer leurs politiques de restriction des communs et de la solidarité. Chaque recul dans ce domaine profite mécaniquement à l’extrême droite dans la mesure où elle désarme les mobilisations solidaires, jusqu’à l’idée même de solidarité minant ainsi la démocratie de toute substance. C’est manifestement le cas s’agissant des libertés associatives avec le fameux « contrat d’engagement républicain ». Ce « contrat » qui n’en est pas un, puisqu’il est imposé aux associations et qui n’est pas plus républicain puisqu’il sert à les censurer dans leur expression et leurs projets, à exiger qu’elles contrôlent leurs membres. Il permet également de fragiliser leurs finances et leur capacité d’action. Ainsi voit-on de plus en plus souvent exiger une prétendue « neutralité politique » pour pouvoir bénéficier d’une salle ou pour participer au forum des associations. Plusieurs sections de la LDH y ont été confrontées, au prétexte d’un « engagement politique ».

De fait, oui, notre engagement contre les idées d’extrême droite, notre refus des discriminations et nos plaidoyers en faveur des libertés sont éminemment « politiques », à l’image même de ce qu’est la République. Cela déplait ? Tant pis : ces engagements découlent de la triple promesse de liberté, d’égalité et de fraternité.

Ces trois valeurs ont été largement inscrites au cahier des charges des Jeux olympiques et paralympiques (JOP). Mais les jeux ont aussi été l’occasion d’un saut qualitatif dans la mise en œuvre de la vidéosurveillance. Dans la foulée, il est prévu de généraliser l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) dans les caméras sans plus attendre un bilan de l’expérimentation. On voit se multiplier l’emploi d’acteurs privés ou publics pour participer au « continuum de sécurité » vanté depuis le livre blanc de la sécurité de 2019, et se mettre en place des dispositifs au gré de lois sécuritaires. C’est ainsi que la proposition de loi « Sûreté dans les transports » risque d’aller encore plus loin dans l’intrusion dans notre vie privée et dans la généralisation de l’emploi de vigiles dans l’espace public.

Lorsqu’on attaque les libertés, on attaque la presse (et la protection des sources), la justice et la culture. Ce dernier secteur, coupable d’être un lieu de résistance au prêt-à-penser, est aujourd’hui pris en ligne de mire budgétaire. Il est donc particulièrement attaqué par certaines régions comme les Pays de la Loire et par l’Etat. La LDH apporte son soutien à toutes celles et ceux qui le font vivre et souligne l’urgence à lutter pied à pied contre l’étranglement financier, pour sécuriser l’épanouissement de projets éducatifs et culturels avec une grande diversité de propositions, seuls à même d’alimenter et transmettre une citoyenneté et une conception démocratique curieuse du monde et ouverte à ses diversités.

Dans sa même logique, le gouvernement prévoit une diminution de l’éclairage des décisions ayant une incidence sur l’environnement par la Commission nationale du débat public (CNDP). D’évidence, la démocratie environnementale dérange. Le tribunal administratif qui a décidé de la suspension de projets de mégabassines et a ordonné de ne plus remplir en eau certaines d’entre elles a, de fait, démontré que ce fameux « impératif pour le développement d’une région » lui est en réalité néfaste. Non content de vouloir marginaliser ce type de résistance, le gouvernement favorise la criminalisation des défenseurs de l’environnement, les qualifie dans une escalade verbale échevelée « d’éco-terroristes[1] »…

La liberté de manifestation est déjà très affaiblie : si la LDH obtient des succès devant les tribunaux, cela ne se réalise parfois que longtemps après les verbalisations pour participation à une manifestation interdite. Et que dire des gardes à vue ou même des poursuites pour apologie du terrorisme dans des cas où la liberté d’expression est en jeu à propos du conflit israélo-palestinien ?

La gestion sécuritaire de l’espace public amène à exclure les pauvres des centres-villes. La LDH attaque ainsi en justice les arrêtés anti-mendicité, anti-regroupement, anti-station prolongée de piétons… Or, les politiques menées de réduction des services publics et de précarisation des salariés, ou même des bénéficiaires de prestations sociales comme le revenu de solidarité active (RSA), ne cessent d’accroître la pauvreté et l’exclusion. L’absence de politique d’éradication de la pauvreté est hélas logique dans le cadre de la politique néo-libérale promue par Emmanuel Macron. Pour cette pensée politique, seuls les « méritants » ont droit à des égards et la richesse est « naturellement » la marque visible « des plus méritants », ce qui revient à légitimer la reproduction des élites financières. On comprend que le président se crispe à la simple évocation d’une taxation des super profits…

Le désastre à Mayotte montre aussi à quel point le non-investissement par les pouvoirs publics, l’absence de respect du droit, le mépris des plus pauvres, aboutit à une situation dramatique.

Plus que jamais, la LDH travaillera à rassembler pour promouvoir un autre projet de société, une alternative écologique, démocratique et sociale, pour toutes et tous.

Dans un monde en proie aux tumultes guerriers, où la guerre totale a fait sa réapparition, où la communauté internationale refuse d’imposer à Israël, alors que le sang coule, le respect des décisions de la Cour internationale de justice exigeant le cessez-le feu et le respect du droit humanitaire à Gaza du fait d’un risque sérieux de génocide, et d’arrêt de la colonisation[2], la solidarité reste un devoir impérieux pour empêcher la course aux catastrophes dont les peuples, d’abord et avant tout, sont les principales victimes. C’est un devoir impérieux envers les victimes, c’est un devoir impérieux envers nous-mêmes car c’est notre humanité commune qui se trouve mise en jeu.  Qu’il s’agisse du peuple Kanak, dans la défense de son droit à l’autodétermination ; du peuple sahraoui ouvertement bafoué par la prise de position solitaire d’Emmanuel Macron au Maroc ; du peuple ukrainien victime de l’impérialisme de la Russie de Poutine… Comment enfin, s’agissant de solidarité, ne pas penser aux femmes afghanes, aux Iraniennes en lutte ? Le procès des viols de Mazan nous a d’ailleurs montré à quel point les violences sexuelles et sexistes imprègnent notre propre société et la nécessité d’une véritable politique d’éducation et de prise en charge pour en venir à bout.

Les périls sont là et la tâche est immense. La LDH aura besoin, en 2025 comme en 2024, de l’engagement de toutes et tous pour rassembler et faire face à l’adversité. Cela reste le meilleur gage d’une bonne année toujours possible. C’est en tout cas le meilleur que nous puissions nous souhaiter.

Nathalie Tehio, présidente

[1] Notion par ailleurs inexistante en droit pénal, destinée à stigmatiser les militants et à justifier par avance une répression totalement disproportionnée.
[2] La CIJ exige aussi la libération des otages par le Hamas : cela implique l’ouverture de négociations.

Source: 9 janvier 2025 – Tribune de Nathalie Tehio « 2025, bonne année ? Bonne année ! » publiée sur Mediapart

#61 Décembre 2024 – Comment devient-on raciste ? 31 décembre, 2024

Le racisme ? il se manifeste par des injures, du harcèlement, des provocations, des diffamations, des violences… : en 2023 la police a dénombré 15000 infractions racistes ou xénophobes soit une augmentation de 18% par rapport à l’année précédente. Et l’on sait que seules 4% des victimes portent plainte ! Le racisme, c’est aussi des propos destinés à diviser, à mettre au ban telle ou telle partie de la société : ainsi ceux récurrents de responsables politiques qui s’en prennent au pseudo « séparatisme » d’une partie de la communauté nationale et qui, de fait, en encouragent la stigmatisation…

L’antisémitisme, une forme particulière de racisme, est, lui, en très forte hausse : près de quatre fois plus d’actes antisémites en 2023 que l’année précédente, une tendance qui se poursuivait encore au premier semestre 2024, suite, en particulier, aux attaques du Hamas contre Israël et aux répliques meurtrières de ce dernier.

Il n’y a pas de hiérarchie de ces souffrances. Toutes ces haines partagent le même rejet de l’autre. Elles conduisent à des inégalités de traitement et de droits, à des discriminations (au travail, dans l’accès à un logement, dans la santé, à l’école…), elles ont une atteinte à la dignité des personnes. Elles fracturent la société.

Si le racisme et l’antisémitisme augmentent, il nous faut en comprendre les raisons pour mieux les combattre : nous le tentons dans ce numéro des Echos à propos du racisme : de quoi parle-t ’on ? quelles en sont les origines, les mécanismes, les formes, est-il un problème seulement individuel de haine, de peur…ou relevant aussi des pratiques d’institutions publiques comme privées ? Comment un usage dévoyé de la laïcité devient une arme d’exclusion ? …

Pièces jointes

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20 décembre 2024 – Tribune « Recensement de la population Insee : ne pas répondre à la nouvelle question sur le pays de naissance des parents » publiée dans Mediapart 20 décembre, 2024

Lire la tribune sur Mediapart

Nos organisations, syndicats comme associations, encouragent l’ensemble des personnes qui vont être interrogées en janvier à répondre au questionnaire du recensement de la population. Le recensement est un bien public et y participer est un acte civique. Grâce à ses chiffres, une image fidèle de la population et de sa répartition locale permet une connaissance fine, nécessaire notamment à la gestion des services publics et à l’aménagement du territoire, même si nous savons combien ils sont malmenés par les politiques en vigueur.

Ceci clairement dit, nous appelons à ne pas répondre à une nouvelle question qui est introduite cette année sur le pays de naissance des parents. Nous le faisons après que certaines de nos organisations aient plaidé auprès de l’Insee, responsable pour le contenu du questionnaire, et de la Commission nationale informatique et libertés pour que cette question ne soit pas ajoutée dans le bulletin du recensement. Nous le faisons car aucune politique publique ne justifie que l’origine immigrée de nos parents soit collectée dans notre bulletin individuel. Cette question présente beaucoup de dangers.

Alors que répondre à chaque question du recensement Insee est obligatoire, ce n’est pas le cas pour cette nouvelle question. Là, dans le questionnaire Internet et dans la version papier il sera bien indiqué que répondre à cette nouvelle question est « facultatif ». Il n’y a donc aucune obligation d’y répondre. Nos organisations, appellent à un mouvement général de refus.

Toutes les personnes habitant les communes de moins de 10 000 habitants sont interrogées tous les cinq ans, et près de la moitié dans les plus grandes. A un moment où un autre, tout le monde doit répondre au recensement. Ainsi, au bout du compte, bien peu de personnes échapperont à l’enregistrement et à la conservation de l’origine immigrée de leurs parents.

L’enregistrement de cette information est un pas vers une possible inégalité de traitement par l’Etat sur cette base. Les déclarations du président du RN indiquant que « des personnes d’origine étrangère, qui travaillent, qui ne font rien de mal, n’ont rien à craindre de son parti » disent clairement que ce serait un critère dans ses politiques d’extrême droite.

Comme pour les fichiers administratifs, qui ne doivent contenir que les informations indispensables à la gestion des services qu’ils rendent, nous ne voulons pas que le recensement ajoute aux informations concernant notre identité (genre, âge, lieu de naissance, nationalité) des informations sur l’identité de nos parents.

Il ne faut pas qu’une information sur l’origine immigrée de chacune, de chacun, permette un  suivi au travers des générations successives.

Disons aussi clairement que nos organisations souhaitent que de bons chiffres soient produits pour montrer les inégalités qui résultent des discriminations pratiquées en lien avec une origine étrangère, une couleur de peau, une religion supposée. Le recensement de la population n’est pas l’instrument adapté, ce n’est pas son objet. Pour cela, nous appuyons le développement d’enquêtes approfondies, menées avec tout le sérieux de la statistique publique auprès d’échantillons représentatifs de la population. Des progrès considérables ont été faits depuis vingt ans pour apporter cette connaissance. Ce travail statistique doit se poursuivre et s’amplifier. Nos organisations engagées dans la lutte contre le racisme et les discriminations portent aussi des propositions pour cela.

Au recensement, nombreux seront celles et ceux qui, spontanément, décideront de ne pas répondre à la question facultative sur le lieu de naissance des parents nés à l’étranger. Nous incitons chacune et chacun à faire de même pour que, par leur nombre, les refus de répondre envoient un message fort de refus d’être mis dans des cases liées à l’origine géographique, à la couleur de peau, à une religion présumée.

Signataires : Nathalie Tehio, présidente de la LDH (Ligue des droits de l’Homme) ; Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT ; Benoît Teste, secrétaire général FSU ; François Sauterey, coprésident du Mrap ; Julie Ferrua et Murielle Guilbert, co-déléguées Union Syndicale Solidaires.

Source: 20 décembre 2024 – Tribune « Recensement de la population Insee : ne pas répondre à la nouvelle question sur le pays de naissance des parents » publiée dans Mediapart

Pourquoi les crèches de noël, comme tout signe ou emblème religieux, n’ont pas leur place dans les bâtiments publics ? 20 décembre, 2024

Episode 29 « Des Voix et des droits », le podcast de la LDH, avec Nathalie Tehio, présidente de la LDH

Aujourd’hui, “Des Voix et des droits” donne la parole à Nathalie Tehio afin d’expliquer pourquoi la LDH n’est en rien opposée aux crèches de Noël, ni d’ailleurs à tout mode d’expression religieuse. La LDH entend seulement faire respecter le principe de laïcité, qui impose à l’Etat et aux collectivités publiques la neutralité vis-à-vis de toutes les religions et interdit les signes ou emblèmes religieux au sein des bâtiments abritant le siège d’une collectivité publique, conformément à la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat. La préférence religieuse marquée par l’installation d’une crèche de la nativité dans une mairie est contraire à cette neutralité.

Pour en savoir plus : lire le communiqué de la LDH du 12 décembre 2024 « La loi de 1905 sur la séparation des cultes et des pouvoirs publics pose le principe fondamental de la laïcité ».

Source: Pourquoi les crèches de noël, comme tout signe ou emblème religieux, n’ont pas leur place dans les bâtiments publics ?

Mayotte : une « catastrophe naturelle » peut en cacher une autre… 20 décembre, 2024

Communiqué LDH

Les dévastations subies par Mayotte suite au passage du cyclone Chido sont une catastrophe totale, dont le bilan humain reste impossible à évaluer dans les circonstances actuelles. Devant un tel drame, deux questions se posent. La première : y-a-t-il une aggravation de la force et de la fréquence de ces événements ? La réponse est : oui. Après le tsunami en Asie du Sud, les inondations de La Nouvelle Orléans, les crues de Valence, les inondations du Nord de la France – pour ne citer que les plus emblématiques – la contribution du dérèglement anthropique du climat ne fait pas de doute. La seconde : des politiques publiques auraient-elles permis de prévenir et de diminuer les dégâts humains ? Là encore, la réponse est : oui. Dans son premier rapport d’évaluation, publié en 1990, le GIEC évoquait les décisions à prendre. En 2024, soit 34 ans plus tard, aucune politique cohérente et suivie n’a pu empêcher la succession de plus en plus rapide d’événements cataclysmiques.

À Mayotte, les deux effets – climatique et politique – sont aggravés par une situation d’exception discriminatoire permanente. Issu d’une décolonisation inachevée, le statut de Mayotte est régulièrement dénoncé par l’Assemblée générale de l’ONU. Mais incapable de débattre avec la République des Comores, dont Mayotte aurait dû être l’une des régions, la France affronte inéluctablement l’absence d’une issue positive et s’enferme dans une fuite permanente. Toutes les associations de défense des droits le constatent depuis des années : les opérations dites
« Wambushu » et de « décasages » ont organisé de fait la précarisation des populations en acculant à la clandestinité celles et ceux que certaines fractions de la population mahoraise continuent à juger comme des délinquants et des illégaux, même si nombre d’entre eux sont d’ici et pas d’ailleurs. Quand le cyclone s’est abattu sur l’île, ce sont donc les plus pauvres, les plus exclus, les pourchassés, les méprisés, celles et ceux qui tentaient de survivre dans des habitations de fortune qui ont payé le plus lourd tribut à la violence des éléments.

Il s’agit donc, plus que jamais, de prendre conscience de l’urgence d’une politique internationale de lutte contre le dérèglement climatique et de l’exigence d’y inclure la lutte contre la marginalisation de populations entières. La LDH (Ligue des droits de l’Homme) attend du gouvernement qu’il agisse avec les immédiates mesures de protection civile et approvisionnement des populations, qu’il demande à M. Retailleau, ministre de l’Intérieur démissionnaire, de retrouver le sens de la mesure, aux élus locaux, singulièrement celles et ceux qui ont fait de l’opposition entre les populations une stratégie, de revenir à la raison, au préfet de Mayotte de faire rétablir l’accès républicain aux services publics, et à toutes et à tous d’avoir comme exigence l’égalité des droits.

Lire la tribune « Mayotte : la catastrophe qui détruit les personnes, les biens et les droits » de Dominique Guibert, ancien secrétaire général de la LDH

Paris, le 18 décembre 2024

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Source: Mayotte : une « catastrophe naturelle » peut en cacher une autre…

L’heure est à la riposte 20 décembre, 2024

Déclaration du meeting unitaire du 18 décembre 2024 de la Marche des solidarités, des collectifs et intercollectifs de sans-papiers et de Né-e-s ici ou venu-e-s d’ailleurs, l’égalité des droits, c’est pour toutes et tous !

Nous sommes des milliers à avoir manifesté, ensemble, avec et sans-papiers, Français.e.s et immigré.e.s, notre opposition face à la gravité des attaques qui se multiplient contre les populations migrantes et étrangères. Parce que nous ne voulons pas vivre dans une société qui autorise la violence, le racisme, la discrimination, qui nous sépare ou nous oppose en fonction de l’endroit où l’on est né ! Nous vivons ensemble, chaque jour, et voulons continuer à le faire librement, dans l’égalité, la justice et la solidarité.

L’heure est à la riposte !

Nos manifestations partout en France et le meeting de ce soir sont l’expression de notre volonté commune de poursuivre ce combat essentiel pour l’égalité des droits pour toutes et tous, pour la justice sociale et contre le racisme.
Notre détermination est à la hauteur de nos ambitions ! Fortes et forts de notre unité, obligeons le pouvoir à renoncer à ses politiques violentes d’exclusion qui jettent dans l’extrême précarité sociale et administrative un grand nombre de personnes étrangères, quel que soit leur statut, travailleuses et travailleurs avec ou sans titre de séjour, familles, femmes, étudiant.e.s, mineur.e.s isolé.e.s, exilé.e.s, en demande d’asile ou débouté.e.s.

Nous appelons dès maintenant à soutenir les luttes en cours, celles des jeunes, à Paris et sur tout le territoire, celles des femmes en lutte pour leur hébergement, celles des travailleuses et travailleurs en lutte pour leur régularisation et le renouvellement de leur titre de séjour.
Ce meeting s’inscrit dans notre volonté commune de construire ces prochaines semaines, ces prochains mois, les conditions d’une mobilisation unitaire d’ampleur combinant, dans toute leur diversité, nos différentes ressources et répertoires d’actions.

C’est pourquoi :

Nous appelons les immigré.e.s, avec et sans-papiers, à rejoindre les collectifs de sans-papiers et/ou les organisations syndicales sur leur lieu de travail.
Nous appelons toutes et tous à rejoindre les réseaux de solidarité, les collectifs, les associations sur votre ville, votre quartier, à rejoindre les syndicats sur votre lieu de travail.
Dès maintenant nous appelons à faire converger ce mouvement dans la rue le samedi 22 mars dans le cadre de la journée internationale contre le racisme.
Toutes et tous ensemble, agissons, uni.e.s, pour un autre projet de société, humaniste, solidaire et égalitaire contre le racisme, l’exclusion et l’exploitation.

Paris, le 18 décembre 2024

Source: L’heure est à la riposte

Campagne de cyberharcèlement visant le chanteur Bilal Hassani : 5 personnes devant la justice 10 décembre, 2024

Au printemps 2023, un concert du chanteur Bilal Hassani, icône de la communauté LGBTI, qui devait se tenir dans une église désacralisée de plus 500 ans à Metz a été annulé en raison d’une vague de harcèlement et d’appel à la violence en ligne.

5 personnes sont ainsi renvoyées, le 13 novembre 2024, devant la 17e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Paris, compétent de par son pôle haine en ligne. Parmi eux, un militant d’extrême droite connu localement, candidat aux dernières élections législatives et déjà condamné par le passé pour incitation à la haine homophobe. Tous seraient proches de la mouvance d’extrême droite ou intégriste.

La LDH combattant toutes les formes de propos haineux, notamment lorsqu’ils sont prononcés à raison du genre ou de l’orientation sexuelle, apporte son plein soutien à l’artiste et se constitue partie civile à ses côtés dans ce procès.

Le délibéré sera rendu le 15 janvier 2025.

Source: Campagne de cyberharcèlement visant le chanteur Bilal Hassani : 5 personnes devant la justice

JO 2030 10 décembre, 2024

La LDH défend l’application du droit à un environnement sain et le droit du public d’être informé et de participer à l’élaboration des décisions ayant un impact significatif sur celui-ci.

Le 24 juillet 2024, lors de sa 142e session, le comité international olympique (CIO) a attribué aux Alpes françaises l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques d’hiver 2030. Ceux-ci se tiendront entre le 1er et le 17 février 2030 pour les Jeux olympiques et entre le 1er et le 10 mars 2030 pour les Jeux paralympiques.

La décision d’organiser ces jeux implique des conséquences directes et nécessairement importantes sur l’environnement.

En dépit des incidences sur l’environnement d’un tel projet, l’Etat et les régions n’ont pas informé la population concernée et ne l’ont pas invitée  à présenter ses observations.

En l’absence d’organisation de mesures de participation du public, plusieurs députés et associations ont saisi la Commission nationale du débat public si elle avait été saisie du projet d’accueil des JOP par les Alpes françaises.

Par plusieurs courriers en date du 24 mai 2024, 19 juin 2024 et 18 octobre 2024, la Commission nationale du débat public a confirmé ne pas avoir été saisie par les maîtres d’ouvrage.

La signature de ce contrat n’ayant été précédé d’aucune mesure d’information et de participation du public, en méconnaissance des principes posés par la Charte de l’environnement et la Convention d’Aarhus, porte une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont le droit de chacune et chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé et le droit du public d’être informé et de participer à l’élaboration des décisions ayant un impact significatif sur l’environnement.

La LDH, l’Association pour l’étude et la sauvegarde de la vallée de Cervières (A.E.S.C) et plusieurs particuliers ont introduit un référé-liberté afin que soit ordonné aux autorités compétentes de prendre toute mesure utile d’information et de participation du public avant de procéder à la signature et que, dans cette attente, les parties au contrat hôte ne signent pas ledit contrat.

Par une ordonnance du 27 novembre 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a rejeté la requête en considérant notamment que la question de la participation du public n’est pas une liberté fondamentale, sans répondre à notre argumentation qui consistait à affirmer que ce principe devait être reconnu comme tel.  Il a en outre mentionné que les projets devront être réalisés dans le respect des obligations légales et réglementaires, et qu’en conséquence la signature de ce contrat, comme la décision d’attribuer les Jeux, ne portent en eux-même, pas atteinte à l’environnement.

Source: JO 2030