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Ligue des droits de l'Homme

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Archives du tag : Revue de presse

28 février 2024 – Tribune de Patrick Baudouin “N’oublions pas l’Ukraine” publiée sur Mediapart 1 mars 2024

Tribune de Patrick Baudouin, président de la LDH

Lire la tribune du Mediapart

Il y a désormais deux ans, le 24 février 2022, Vladimir Poutine déclenchait une guerre d’invasion contre l’Ukraine en affichant sa certitude d’une victoire éclair. C’était compter sans la résistance d’un peuple ukrainien uni pour défendre ses droits et sa souveraineté. Mais depuis lors la guerre continue avec son lot effrayant de destructions et de morts, dont le nombre s’élève à des dizaines, voire des centaines de milliers parmi lesquels une large part de victimes civiles. Or devant la durée du conflit, et la prédominance de la situation tragique à Gaza sur la scène internationale, les regards se détournent de l’Ukraine au moment même où ce pays a besoin d’un maximum de soutien.

Comme l’écrit dans une récente tribune Josep Borrell, haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères, cette guerre en Ukraine n’est pas celle de l’Occident contre les autres, mais celle du rejet de la terreur, et de la défense des relations internationales fondée sur le respect mutuel et le droit universel des peuples à la sécurité et à la liberté. La légitimité de la résistance armée des Ukrainiens est incontestable au regard tant du droit international que du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Face à une guerre d’agression, la nécessaire solidarité impose d’apporter à l’Ukraine toutes les aides, financière et militaire, qui lui sont indispensables pour empêcher, au regard de la disproportion des forces en présence, que la victoire ne revienne à l’envahisseur. L’objectif doit être de permettre à l’Ukraine d’inverser le cours d’une situation militaire qui lui devient défavorable. Ce n’est qu’à cette condition que sera crédible l’exigence absolue du retrait sans conditions des troupes russes de l’ensemble du territoire ukrainien.

L’enjeu est d’autant plus important que la résistance du peuple ukrainien va au-delà de la défense d’un territoire, mais reflète aussi ses aspirations légitimes à une société plus égalitaire et plus fraternelle dans la continuité du mouvement Maïdan pour la dignité de février 2014. Ce projet d’une société où le changement est possible se trouve à l’origine de l’offensive poutinienne développant une vision du monde où toute lutte en faveur d’un projet de changement démocratique doit rester vouée à l’échec. Le nouvel ordre mondial prôné par le Kremlin repose sur le rejet des normes et des règles internationales afin que chaque grande puissance puisse exploiter en toute impunité la population et la nature dans sa propre zone d’influence exclusive. C’est une remise en cause de tout l’édifice des principes universels constitutifs de l’ordre international établi après la Seconde Guerre mondiale. La solidarité de la communauté internationale avec la société ukrainienne doit aussi intégrer le soutien aux organisations de sa société civile qui contribuent au combat pour une démocratie vilipendée par Vladimir Poutine.

Une nouvelle illustration édifiante de la véritable nature du régime poutinien vient d’être donnée avec l’assassinat d’Alexeï Navalny. La violence terroriste d’Etat, qui se manifeste aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de la Russie, s’avère une caractéristique majeure d’un pouvoir qui a écrasé Alep sous les bombes, rasé Grozny comme Marioupol, et continue à semer la mort en Ukraine. Cette violence à répétition, dont la gravité a été trop longtemps sous-estimée, contribue largement aux désordres du monde actuel de même que les relations multiformes établies au fil des années entre les extrêmes droites de tous pays et le régime de Poutine. La généralisation de ces violences mises en œuvre par des Etats, sans que la communauté internationale ne soit en mesure de les empêcher ou de les stopper, a des effets dévastateurs pour la crédibilité du droit international et pour les institutions onusiennes en particulier. Afin de contrer la spirale de la barbarie, et de la négation des droits humains, également à l’œuvre dans le conflit israélo-palestinien, il y a urgence à combattre pour la défense de la démocratie, et pour l’établissement des solidarités avec toutes celles et tous ceux qui luttent pour l’effectivité des droits universels.

Un autre enjeu majeur au regard des abominations commises dans la guerre ukrainienne demeure celui de la lutte contre l’impunité. On ne répétera jamais assez que massacres, viols et tortures, bombardements indiscriminés sur les populations civiles et les infrastructures fournissant les biens essentiels perpétrés sans relâche depuis deux années constituent des crimes de guerre, et même, par leur caractère généralisé et systématique, des crimes contre l’humanité. Les enlèvements et déportations d’enfants ukrainiens vers la Russie relèvent de la qualification de crime de génocide, ce qui vaut à Vladimir Poutine d’être poursuivi par la Cour pénale internationale. Celle-ci doit disposer de tous les moyens nécessaires, humains et financiers, pour enquêter sur les crimes de masse commis et documentés en temps réel, aux côtés de la justice ukrainienne, et en lien avec d’autres justices d’Etats tiers sur le fondement de la compétence universelle, pour qu’à tous les niveaux hiérarchiques les responsables de ces crimes abominables soient amenés à rendre des comptes.

En aucun cas il ne faut se laisser gagner par la résignation, le découragement et la lassitude. Aujourd’hui plus encore qu’hier la mobilisation pour la défense de l’Ukraine doit être massive et déterminée. Tout signe de faiblesse ne fera que renforcer Vladimir Poutine dans une politique expansionniste qui menacera l’intégrité territoriale d’autres pays. Contre une guerre destructrice qui met en danger la sécurité mondiale et la stabilité des démocraties, le devoir est celui d’une solidarité active avec une résistance, civile et militaire, admirable de courage, qui se bat pour la liberté de l’Ukraine et pour celle du reste d’un monde globalisé.

Patrick Baudouin, président de la LDH

Source: 28 février 2024 – Tribune de Patrick Baudouin “N’oublions pas l’Ukraine” publiée sur Mediapart

13 février 2024 – Tribune de Patrick Baudouin “Le respect du droit international doit être imposé à Israël” publiée sur Mediapart 16 février 2024

Tribune de Patrick Baudouin, président de la LDH

Lire la tribune sur Mediapart

Le plan de partage de la Palestine adopté par l’ONU le 29 novembre 1947 prévoyait la création d’un Etat juif et d’un Etat arabe. Si l’Etat d’Israël a pris naissance le 14 mai 1948, il n’en est toujours pas de même d’un Etat de Palestine. Ce constat traduit à lui seul la faillite de la communauté internationale. Alors que l’Etat d’Israël dispose des mêmes droits mais aussi des mêmes obligations que tous les autres Etats, c’est en toute impunité qu’il a pu de façon quasi constante s’affranchir du respect du droit international. Ainsi en va-t-il de l’absence d’application des résolutions du Conseil de Sécurité des Nations-unies, exigeant le retrait des territoires occupés et prônant la mise en œuvre du droit de chacun des peuples de vivre en paix dans des frontières sûres et reconnues.

C’est en violation complète de ces résolutions qu’Israël a poursuivi et intensifié sa politique de colonisation, suscitant des mouvements de révolte des palestiniens et générant des deux côtés un cycle infernal de violences. Israël a passé outre un avis de la Cour internationale de justice (CIJ) du 8 juillet 2004 selon lequel la construction d’un mur de séparation par la puissance occupante dans le territoire palestinien occupé est « contraire au droit international ». Israël a refusé toute coopération avec la Cour pénale internationale (CPI), pourtant compétente pour instruire les crimes relevant de sa juridiction commis depuis le 13 juin 2014 sur le territoire palestinien occupé. Israël a rejeté l’application de la résolution 2334 adoptée le 23 décembre 2016 par le Conseil de Sécurité exigeant qu’il soit mis un terme à l’expansion des colonies de peuplement pour préserver la solution de deux Etats.

A l’encontre de cette résolution, une nouvelle loi fondamentale du 19 juillet 2018 intitulée « Israël Etat nation du peuple juif », outre l’établissement d’un sous statut pour les citoyens non juifs, proclame que « l’Etat considère le développement de la colonisation juive comme un objectif national et agira en vue d’encourager et de promouvoir ses initiatives et son renforcement ». Cette politique d’humiliation et de négation des droits des palestiniens n’a pu qu’entretenir une stratégie de la terreur, en réalité favorable au mouvement fondamentaliste Hamas, amplifiée avec la constitution de l’actuel gouvernement d’extrême droite. L’inexorable explosion qui menaçait est survenue le 7 octobre 2023 dans des conditions aussi horribles qu’imprévues, à la stupéfaction du monde entier. Les milices terroristes du Hamas ont procédé au massacre d’environ 1300 hommes, femmes, enfants, bébés, et à la prise d’au moins 240 otages. Les auteurs de ces actes de barbarie ne sauraient rester impunis. Mais si l’inhumanité des atrocités imputables au Hamas peut justifier une riposte d’Israël traumatisé dans son existence, cela n’autorise nullement le recours à une violence elle-même inhumaine dictée par une vengeance aveugle. Or c’est pourtant, là encore en violation absolue du droit international, la voie choisie par les autorités israéliennes, celle d’une véritable punition collective d’une brutalité inouïe, frappant indistinctement les populations civiles, entraînant la mort ou les blessures de dizaines de milliers d’innocents dont beaucoup d’enfants. Chaque jour, depuis quatre mois, ce sont des centaines de victimes supplémentaires. Les destructions sont massives, n’épargnant pas même les hôpitaux et transformant la zone de Gaza en un champ de ruines. La population, dont deux millions de déplacés font craindre une épuration ethnique, est soumise aux privations d’eau, d’électricité, de carburants, et de nourriture jusqu’à la famine. La situation est décrite comme une catastrophe humanitaire sans précédent par les organisations humanitaires entravées dans les secours.

C’est dans ce contexte que la CIJ saisie par l’Afrique du Sud a rendu une ordonnance fondée sur la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. La CIJ estime, avant toute décision sur le fond, qu’il y a urgence à prendre des mesures conservatoires de protection au regard d’un risque réel et imminent de préjudice irréparable. Tout en soulignant aussi que toutes les parties sont liées par le droit international humanitaire, et en appelant donc à la libération immédiate et inconditionnelle des otages détenus par le Hamas, la CIJ juge que l’Etat d’Israël doit prendre toutes les mesures effectives en son pouvoir pour prévenir et empêcher la commission de tout acte génocidaire, pour prévenir et punir l’incitation directe et publique à commettre le génocide, pour permettre sans délai la fourniture des services de base et de l’aide humanitaire, et pour assurer la conservation des éléments de preuve relatifs aux allégations d’actes pouvant relever de la Convention sur le génocide.

Cette décision ayant une force contraignante s’impose à Israël. Elle s’impose aussi aux autres Etats parties à la Convention qui ont l’obligation d’apporter leur concours à la prévention du génocide, sous peine de s’en rendre complices. Plusieurs de ces Etats, dont sans surprise les Etats-Unis, au lieu de faire état de leur coopération, ont annoncé de façon choquante une décision précipitée de suspension du financement de l’UNRWA à la suite d’accusations d’Israël dénonçant la participation de 12 membres, sur les 30.000 que compte cette agence onusienne, aux attaques du Hamas du 7 octobre. Or la suppression du soutien financier à l’UNRWA, en contradiction avec la décision de la CIJ, ne peut qu’aggraver la catastrophe humanitaire. La communauté internationale, dont la France au sein de l’Europe s’honorerait d’être un élément moteur, doit exiger de l’Etat d’Israël la mise en œuvre au plus vite de toutes les mesures conservatoires ordonnées par la CIJ impliquant en réalité l’instauration d’un cessez le feu immédiat et durable. Seule cette démarche constructive peut permettre de parvenir à l’impérative libération concomitante de tous les otages, et à l’amorce d’un processus de paix devant permettre aux deux peuples, israélien et palestinien, de vivre à l’intérieur d’Etats aux frontières sûres et garanties. Il est temps enfin de ne plus fermer les yeux sur les violations réitérées du droit international par l’Etat d’Israël, et de mettre un terme à un deux poids deux mesures dévastateur. Israël doit cesser d’être un Etat exonéré de sanctions que ce soit pour la fourniture d’armements ou pour les poursuites pénales des responsables des crimes commis. Loin de garantir la sécurité de la population israélienne, la primauté donnée au droit de la force plutôt qu’à la force du droit ne fait qu’engendrer son insécurité. Il est grand temps d’exiger d’Israël une inversion de ce choix mortifère.

Patrick Baudouin
Avocat
Président de la LDH (Ligue des droits de l’Homme)
Président d’honneur de la Fédération internationale des droits humains (FIDH)

Source: 13 février 2024 – Tribune de Patrick Baudouin “Le respect du droit international doit être imposé à Israël” publiée sur Mediapart

6 février 2024 – Tribune “Hommage à celles et ceux qui ont eu le courage de fuir : ne laissons pas notre idéal européen mourir aux frontières” publiée sur l’Humanité 7 février 2024

6 février 2024 – Tribune “Hommage à celles et ceux qui ont eu le courage de fuir : ne laissons pas notre idéal européen mourir aux frontières” publiée sur l’Humanité

6 février 2024 – Tribune “Hommage à celles et ceux qui ont eu le courage de fuir : ne laissons pas notre idéal européen mourir aux frontières” publiée sur l’Humanité

6 février 2024 – Tribune “Hommage à celles et ceux qui ont eu le courage de fuir : ne laissons pas notre idéal européen mourir aux frontières” publiée sur l’Humanité

6 février 2024 – Tribune “Hommage à celles et ceux qui ont eu le courage de fuir : ne laissons pas notre idéal européen mourir aux frontières” publiée sur l’Humanité

Tribune collective dont Marie-Christine Vergiat, vice-présidente de la LDH

Lire la tribune sur l’Humanité

Mardi 6 février à Briançon est érigé un monument aux morts des frontières. Un cairn gravé des noms des personnes exilées mortes ou disparues entre Oulx, Briançon et Modane depuis 2018. Nous publions l’appel lancé par de nombreuses personnalités à cette occasion.

Un monument pour ne pas oublier qu’à la frontière avec l’Italie dans les montagnes, à Calais, à Vintimille, en Méditerranée, tout au long des parcours de celles et ceux qui prennent la route de l’exil, meurent chaque année des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants. Ils et elles ont un nom et une histoire trop souvent effacés, perdus, gommés par des statistiques déshumanisantes [et des regards froids].

Ne pas oublier. Oui, ce monument aux mort-e-s des frontières leur est dédié. Pour toujours se rappeler que lorsque nos égoïsmes nationaux nous font ériger des murs, notre humanité se perd et des vies en sortent brisées. C’est un lieu pour les victimes et leurs familles, c’est à elles d’en donner le sens. Ce mémorial est aussi dédié aux personnes blessées, traumatisées par leur parcours d’exil. Nous ne laisserons pas notre société les oublier. Ce cairn (objet communément érigé pour guider les personnes en montagne) est une lanterne pour que la France retrouve le chemin de la fraternité.

Ce qui se joue dans le Briançonnais, c’est aussi l’avenir de l’idéal européen. Nous ne pouvons pas accepter que les frontières des pays de l’Union s’enfoncent dans la militarisation et la surveillance. Face à la surenchère sécuritaire, la solidarité s’est organisée depuis des années. Nous apportons notre plein soutien aux associations, aux montagnard-e-s ainsi qu’aux bénévoles venu-e-s de toute la France pour porter assistance aux exilé-e-s qui tentent, malgré tout, de traverser les Alpes au péril de leurs existences dans un geste désespéré de survie.

Non, les mort-e-s aux frontières ne sont pas victimes d’accident, de mauvaises conditions météorologiques, de prises de risques inconsidérées : ils et elles sont victimes de nos politiques de construction de barrières toujours plus hautes. Les frontières ne sont pas géographiques mais sociales, culturelles et administratives. La frontière franco-italienne a déjà fait des dizaines de victimes. Nous n’oublions pas non plus les lois d’exclusion telles que la loi asile et immigration et ce marchandage indigne autour de la santé des personnes étrangères protégées, pour l’instant, par l’aide médicale d’État.

Aujourd’hui, l’ensemble du parcours d’une personne étrangère en France est indigne de notre République. Du passage de la frontière avec la négation d’un certain nombre de droits (documentée par de nombreuses observatrices et de nombreux observateurs), aux solutions d’hébergement précaires en passant par la stigmatisation permanente et par le travail sans droit qui engendrent exploitation et marginalisation : l’absence d’une politique d’intégration digne est un facteur de risque sur la santé des personnes, de précarisation et de désordre dans nos sociétés.

Pour que nous arrêtions de compter les mort-e-s des frontières, il est temps de ne plus céder aux sirènes populistes et réactionnaires dans notre approche des migrations. Regarder la réalité migratoire en face passe par la construction d’une réelle politique d’accueil, d’intégration et de droits pour celles et ceux qui rejoignent notre continent. Un accueil qui permette aux personnes de guérir de leurs blessures et de retrouver du pouvoir d’agir. L’avenir de notre fraternité, le destin de notre idéal européen se joueront aussi dans notre capacité à faire tomber certaines frontières pour ériger des ponts et bâtir un parcours digne.

François Héran, sociologue et anthropologue. Professeur au Collège de France
Didier Fassin, anthropologue sociologue. Professeur à Institute for Advanced Studied, Princeton
Henri Masson, président de la Cimade
Cécile Duflot, directrice Générale d’Oxfam France
Benoît Hamon, directeur Général de SINGA
Céline Meresse, présidente du CRID
Françoise Rigal, présidente de Médecins du monde
Vanina Rochiccioli et Christophe Daadouch, co-président·es du GISTI
Marie-Aleth Grard, présidente d’ATD Quart Monde
Marie-Christine Vergiat, vice-présidente de la Ligue des droits de l’Homme
Michel Rousseau, co-président de Tous Migrants
Cédric Herrou, Emmaüs Roya
Guillaume Meurice, humoriste
Jean-François Bayart, professeur à l’IHEID de Genève
Anne-Claire Defossez, sociologue,  Institute for Advanced Studied, Princeton
Karima Delli, eurodéputée Les Écologistes
Thomas Dossus, sénateur les Écologistes
Mathilde Hignet, députée LFI-NUPES
Marina Mesure, députée européenne LFI
Mathilde Panot, députée LFI-NUPES
Eric Piolle, maire de Grenoble Les Écologistes
Andrée Taurinya, députée LFI-NUPES
Marine Tondelier, secrétaire nationale les Écologistes
Marie Toussaint, candidate aux élections européennes Les Écologistes
Léo Walter, député LFI-NUPES

Autres signataires

Abomangoli Nadège, députée LFI-NUPES de Seine-Saint-Denis
Amiot Ségolène, députée LFI-NUPES de Loire-Atlantique
Amrani Farida, députée LFI-NUPES de l’Essonne
Autain, Clémentine, députée LFI -NUPES de Seine St Denis
Balibar Etienne, philosophe
Balllet-Baz Coline, freerideuse professionnelle
Bayart Jean-François, professeur à l’IHEID de Genève
Bayou Julien, député Les Écologistes
Benarroche Guy, sénateur Les Écologistes
Bex Christophe, député LFI-NUPES de Haute-Garonne
Blanchard Arthur, membre du conseil d’administration de Refuges Solidaires.
Bompard Manuel, député LFI-NUPES des Bouches-du-Rhône
Boumertit Idir, député LFI-NUPES du Rhône
Boyard Louis, député LFI-NUPES du Val-de-Marne
Bukhari-de Pontual Sylvie, présidente du CCFD-Terre Solidaire
Carême Damien, eurodéputé
Carrière Sylvain, député LFI-NUPES de l’Hérault
Chaibi Leïla, députée européenne LFI-GUE
Châtelain Cyrielle, députée, présidente du groupe Les Écologistes
Chikirou Sophia, députée LFI-NUPES de Paris
Clochard Olivier, géographe, directeur de recherche au CNRS, Migrinter, Membre de Migreurop
Clouet Hadrien, député LFI-NUPES de Haute-Garonne
Cormand David eurodéputé Les Écologistes
Coulomme Jean-François, députée LFI-NUPES de Savoie
Couturier, Catherine, députée LFI-NUPES de la Creuse
Daadouch Christophe, co-président du GISTI
Dadrenne Francine, élue d’opposition de Briançon et membre de l’ANVITA
Davy Hendrik, député LFI-NUPES des Bouches-du-Rhône
Defossez Anne-Claire, sociologue, Institute for Advanced Studied, Princeton
Del Baggio Cristina, enseignante chercheurse, université grenoble Alpes laboratoire Pacte, membre de Migreurop
Delbos-Corfiel Gwendoline, eurodéputée les ecologistes
Delli Karima, eurodéputée Les Écologistes
Delogu Sébastien, député LFI-NUPES des Bouches-du-Rhône
Dossus Thomas, sénateur Les Écologistes
Duflot Cécile, directrice générale de OXFAM France
dujmovic Morgane géographe,CNRS/Pacte, membre de Migreurop
Erodi Karen, députée LFI-NUPES du Tarn
Étienne Martine, députée LFI-NUPES de Meurthe-et-Moselle
Fassin Didier, anthropologue et médecin
Faucillon Elsa, députée PCF
Fernandes Emmanuel, député LFI-NUPES du Bas-Rhin
Fiat Caroline, députée LFI-NUPES de Meurthe-et-Moselle, vice-présidente de l’Assemblée nationale
Fournier Charles, député Les Écologistes
Gontard Guillaume, sénateur Les Écologistes
Grard Marie-Aleth, présidente du Mouvement ATD Quart Monde France
Guetté Clémence, députée LFI-NUPES du Val-de-Marne
Guiraud David, député LFI-NUPES du Nord
Hamon Benoit, directeur général de Singa
Hanus Philippe, historien à l’Université pierre Mendes-France, Grenoble
Heller Charles, directeur de recherche Border Forensic
Héran François, sociologue, antrophologue, professeur au Collège de France
Herrou Cédric, Emmaus Roya
Hignet Mathilde, députée LFI-NUPES de Ille-et-Vilaine
Jadot Yannick, sénateur Les Écologistes
Jau Didier, maire 4e et 5e arrondissement de Marseille, Les Écologistes
Kerbrat Andy, député LFI- NUPES de Loire-Atlantique
Lachaud Bastien, député LFI-NUPES de Seine-Saint-Denis
Laisney Maxime, député LFI-NUPES de Seine-et-Marne
Le Gall Arnaud, député LFI-NUPES du Val- d’Oise
Léaument Antoine, député LFI-NUPES de l’Essonne
Leboucher Élise, députée LFI-NUPES de Sarthe
Leduc Charlotte, députée LFI-NUPES de Moselle
Legrain Sarah, députée LFI-NUPES de Paris
Lepvraud Murielle, députée LFI-NUPES des Côtes-d’Armor
Lucas Benjamin, député les écologistes, coordinateur du mouvement Génération.s
Martens-Bilongo Carlos, député LFI-NUPES du Val-d’Oise
Martin Pascale, députée LFI- NUPES de Dordogne
Masson Henri, président de la Cimade
Mathieu Frédéric, député LFI-NUPES d’Ille-et-Vilaine
Maximi Marianne, députée LFI- NUPES du Puy-de-Dôme
Melouli Akli, sénateur Les Écologistes
Meresse Céline, présidente du CRID
Mesure Marina, députée européenne LFI-GUE
Meurice Guillaume, humouriste
Moreau Alexandre, président de l’ANAFE
Obono Danièle, députée LFI-NUPES de Paris
Omarjee Younous, député européen LFI-GUE
Oulaldj Emmanuelle, co-présidente FSGT
Oziol Nathalie, députée LFI-NUPES de l’Hérault
Panot Mathilde, députée LFI-NUPES du Val-de-Marne, présidente du groupe parlementaire
Pilato René, député LFI-NUPES de Charente
Piolle Éric, maire de Grenoble Les Écologistes
Pochon Marie, députée Les Écologistes
Poncet-Monge Raymonde, sénatrice Les Écologistes
Portes Thomas, député LFI-NUPES de Seine-Saint-Denis
Poutou Phillipe, conseiller municipal, conseiller métropolitain Bordeaux Métropole
Rapilly-Ferniot Pauline, conseillère municipale de Boulogne-Billancourt (92) et fondatrice du collectif Ibiza
Regol Sandra, députée Les Écologistes
Rigal Florence, présidente de Medecins du Monde
Rochiccioli Vanina, co-présidente du GISTI
Rome Sébastien, député LFI-NUPES de l’Hérault
Roose Caroline, eurodéputée Les Écologistes
Rousseau Michel, président de Tous Migrants
Rousseau Sandrine, députée Les ecologistes
Rubilora Michelle, 1ère adjointe à la mairie de Marseille
Saintoul Aurélien, député LFI-NUPES des Hauts-de-Seine
Sala Michel, député LFI-NUPES du Gard
Sebahi Sabrina, députée Les Écologistes
Sebillotte Oriane, co-présidente de Paris d’Exil
Senée Ghislaine, sénatrice Les Écologistes
Simonnet Danielle, députée LFI-NUPES de Paris
Spira Alfred, professeur de médecine
Stambach-Terrenoir Anne, députée LFI-NUPES de Haute-Garonne
Sueur Antoine, président d’Emmaüs France
Taurinya Andrée, députée LFI-NUPES de la Loire
Thiollet François, eurodéputé Les Écologistes
Tondelier Marine, secrétaire nationale Les Écologistes
Toussaint Marie, eurodéputée Les Écologistes, tête de liste européennes 2024
Trouvé Aurélie, députée LFI-NUPES de Seine-Saint-Denis
Vannier Paul, député LFI-NUPES du Val-d’Oise
Vergiat Marie-Christine, vice-présidente de la LDH
Walter Léo Député LFI-NUPES des Alpes-de-Haute-Provence

Source: 6 février 2024 – Tribune “Hommage à celles et ceux qui ont eu le courage de fuir : ne laissons pas notre idéal européen mourir aux frontières” publiée sur l’Humanité

Bande de Gaza – La France doit s’assurer du respect de l’ordonnance de la Cour internationale de justice 1 février 2024

19 associations et ONG, dont la LDH, appellent la France à s’assurer du respect de l’ordonnance en mesures conservatoire rendue le 26 janvier par la Cour internationale de justice

En tant qu’associations et ONG, nous appelons la France à s’assurer du respect l’ordonnance rendue le 26 janvier par la Cour internationale de Justice afin de prévenir un crime de génocide à l’égard des Palestiniens de la bande de Gaza. Nous soulignons qu’un cessez-le-feu immédiat et durable est indispensable afin qu’Israël respecte cette ordonnance.

La France doit appeler les autorités israéliennes à mettre en œuvre au plus vite les mesures conservatoires ordonnées par la Cour internationale de Justice, dans l’affaire qui oppose l’Afrique du Sud à Israël pour violation de la Convention contre le génocide. La France a l’occasion de prouver son attachement au respect du droit international et son soutien au tribunal de La Haye en contribuant à assurer le respect de cette ordonnance.

La France se doit d’afficher une interprétation de l’ordonnance de la Cour de Justice Internationale qui comprend un appel clair à un cessez-le-feu permanent comme principal moyen permettant le respect des mesures conservatoires, en particulier la prévention d’actes relevant du champ d’application de la Convention sur le génocide.

Nous appelons la France à s’engager à poursuivre son soutien financier à l’UNRWA, qui joue un rôle essentiel pour répondre aux besoins créés par l’actuel désastre humanitaire dans la bande de Gaza. La Cour internationale de justice a ordonné une action immédiate et efficace pour garantir la fourniture d’une aide humanitaire aux civils à Gaza.

La Cour internationale de justice a ordonné vendredi 26 janvier à Israël de s’abstenir de commettre des actes constitutifs du crime de génocide, de prévenir et punir l’incitation au génocide, de prendre des mesures immédiates et efficaces pour permettre la fourniture des services de base et de l’aide humanitaire, mais aussi de prevenir la destruction et assurer la conservation des éléments de preuve liés à d’éventuelles violations de la Convention contre le génocide. Elle ordonne aussi à Israël de soumettre un rapport, sous un mois, sur l’ensemble des mesures prises pour respecter cette ordonnance.

Signataires : ActionAid France, Amnesty International France, Association France Palestine Solidarité, CCFD-Terre Solidaire, Chrétiens de la Méditerranée, CRID, Culture de Palestine, La Cimade, Les Amis de Sabeel France, LDH (Ligue des droits de l’Homme), Médecins du Monde France, Médecins Sans Frontières, Mouvement de la Paix, MRAP, One Justice, Oxfam France, Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, UOSSM GE, UOSSM International

Notes : 

L’ordonnance de la Cour internationale de Justice peut être consultée à cette adresse : https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/192/192-20240126-ord-01-00-fr.pdf

Déclaration du ministère des Affaires étrangères à l’ordonnance de la Cour internationale de Justice

Déclaration du ministère des Affaires étrangères concernant l’UNRWA

Source: Bande de Gaza – La France doit s’assurer du respect de l’ordonnance de la Cour internationale de justice

12 janvier 2024 – Tribune “Contre la loi de la honte, restons mobilisé-e-s” publiée sur Mediapart 21 janvier 2024

Tribune collective dont la LDH est signataire

Nous, associations, collectifs de personnes exilées, collectivités accueillantes et syndicats, demeurons scandalisé-e-s par la récente adoption du projet de loi asile et immigration, ainsi que par les méthodes utilisées par l’exécutif pour y parvenir. Nous appelons à une forte mobilisation nationale les 14 et 21 janvier contre cette loi de la honte, avant la décision du Conseil constitutionnel.

Le gouvernement a fait le choix d’un texte cruel qui, depuis sa version initiale, remet en cause des droits fondamentaux et des engagements internationaux de notre pays. Depuis près d’un an et demi, il n’a tenu compte ni de la parole des personnes concernées par ce texte, ni des recommandations et propositions formulées par les chercheur-ses, associations, collectifs ou élu-e-s pour répondre aux enjeux de l’accueil et de la solidarité.

Au contraire, pour obtenir coûte que coûte l’approbation du groupe Les Républicains, l’exécutif a laissé se propager des discours et mesures xénophobes dès l’examen de la loi par le Sénat. Alors qu’il était encore temps de retirer le texte après l’adoption de la motion de rejet par l’Assemblée nationale, le choix désastreux a été fait de leur donner l’avantage, en convoquant une commission mixte paritaire.

Cette loi concrétise une victoire de l’extrême droite et de ses idées. Dans ce marasme, il est choquant de constater que les personnes étrangères ne sont, une fois de plus, qu’une variable d’ajustement pour satisfaire des calculs politiciens.

Depuis des mois, le gouvernement n’a cessé de clamer ne pas faire d’alliance avec des partis d’extrême droite ou prônant leurs idées. Des millions de Français-e-s se sont rendu aux urnes en 2017 et en 2022 pour leur faire barrage en donnant leurs voix à Emmanuel Macron.

Aux côtés du ministre de l’Intérieur, le gouvernement de l’époque n’a eu de cesse, dès l’été 2022, de construire la figure parfaite de l’étranger comme bouc-émissaire, responsable de tous les maux, dangers, actes délictueux ou criminels, en employant les amalgames les plus honteux. Des drames tragiques, qui ont frappé notre pays ces derniers mois, ont été instrumentalisés par le gouvernement, afin de justifier de manière abjecte la nécessité de cette loi.

Toutes ces basses manœuvres, tous ces renoncements pour quel impact sur la vie de nos concitoyen-ne-s ? Ce texte n’aura comme résultat que l’aggravation de la précarité pour des milliers d’enfants, de femmes et d’hommes vivant dans notre pays ou tentant de le rejoindre, déjà en proie à un système administratif kafkaïen qui les prive bien souvent d’accès aux droits les plus fondamentaux.

Est-ce de cela dont notre pays a aujourd’hui besoin, de fragiliser les conditions de vie de milliers de personnes et d’augmenter l’arbitraire des décisions qui les concernent ? L’augmentation des inégalités sociales et le renforcement d’un système administratif discrétionnaire et judiciaire affaibli n’ont jamais conduit une société à davantage de sérénité et de cohésion.

Le Conseil constitutionnel a été saisi, notamment par le président de la République. Pourtant garant du respect des institutions et de la Constitution,

Emmanuel Macron a donc sciemment encouragé l’adoption de mesures inconstitutionnelles, avant d’en référer au verdict des Sages, attendu le 25 janvier.

Nous dénonçons cette instrumentalisation politique du contrôle de la loi. Cette manœuvre ne peut que fragiliser durablement notre Etat de droit et la confiance que portent les citoyen-ne-s dans l’exécutif et la représentation nationale.

A l’heure où le dangereux Pacte européen sur l’asile et la migration est sur le point d’aboutir, nous ne pouvons-nous résoudre à faire partie d’une Europe et d’une France qui se replient sur elles-mêmes et légitiment des mesures discriminatoires et inefficaces, piétinant les principes humanistes d’égalité et de solidarité sur lesquels nos sociétés se sont construites.

Face à ces dérives, nous, personnes concernées, actrices et acteurs de la société civile, continuerons à nous opposer à toute mesure fondée sur le concept discriminatoire et illégal de la “préférence nationale” et le rejet de l’autre.

Nous condamnons ce texte et ferons tout pour empêcher son application, aux côtés du corps médical, des universitaires, des collectivités, des départements et autres pans entiers de notre société concernés par cette loi qui ont pris position ces dernières semaines.

Plutôt que de créer davantage de division dans notre pays, construisons dès maintenant ensemble un destin positif pour notre société, qui commencera par l’abrogation de cette loi de la honte. Nous serons pleinement mobilisé·es, les 14 et 21 janvier, pour atteindre cet objectif.

Lire la tribune et la liste des signataires sur Mediapart

Source: 12 janvier 2024 – Tribune “Contre la loi de la honte, restons mobilisé-e-s” publiée sur Mediapart

18 janvier 2024 – Tribune de l’Observatoire de la liberté de création “Quand des femmes prennent la parole pour dénoncer Depardieu, ce n’est pas l’art qu’elles attaquent, c’est un homme” publiée sur Libération 21 janvier 2024

Tribune de l’Observatoire de la liberté de création dont la LDH est membre

Lire la tribune sur Libération

A l’occasion des Biennales internationales du spectacle qui se tiennent à Nantes depuis le 17 janvier, les membres de l’Observatoire de la liberté de création (OLC) qui vient de se constituer en association rappellent que la liberté artistique peut et doit s’articuler avec le respect de l’égalité et la lutte contre toute forme de violence.

Fin décembre 2023, le Figaro publie une tribune pour soutenir Gérard Depardieu. Rappelons ce qui la motive (que cette tribune désigne comme un « lynchage ») : l’acteur fait l’objet de diverses accusations et plaintes pour viols et agressions sexuelle et il est mis en examen dans le cadre de la procédure engagée par la comédienne Charlotte Arnould depuis le 16 décembre 2020. En avril 2023, Médiapart révèle le témoignage de 13 femmes qui accusent Gérard Depardieu de gestes ou propos obscènes lors des tournages de onze films entre 2004 et 2022. En juillet 2023, une autre femme dénonce une agression sexuelle sur un tournage en 2015. Le 10 septembre 2023, l’actrice Hélène Darras dépose une plainte pour agression sexuelle à l’encontre de Gérard Depardieu. Elle l’accuse de l’avoir « pelotée » en 2007 sur un tournage de film. Le 19 décembre enfin, une journaliste espagnole se plaint d’une agression sexuelle en 1995 alors qu’elle venait interviewer le comédien.

Ce dont attestent ces 17 femmes, c’est d’abord du caractère répété du comportement répréhensible du comédien, au vu et au su de toute une profession, sans que personne n’en tire de conséquence, au nom du talent de l’acteur. Or le talent ne peut en aucun cas être une excuse exonératoire. Ce dont attestent aussi ces femmes, c’est de la difficulté d’être entendues sur les tournages lorsqu’elles tentent de se plaindre, de l’attitude vindicative de Depardieu si elles osent parler à la production, de la peur d’être blacklistées et des propos les décourageant de porter plainte, leur assurant qu’elles ne seront pas entendues. D’ailleurs, peu ont franchi le cap de la plainte judiciaire. Ce qu’elles disent enfin, c’est leur solitude face à des violences qu’elles dénoncent comme systémiques dans ce métier.

Nous dénonçons la censure des œuvres et nous opposons à une confusion systématique entre les œuvres et leurs auteurs. Ce que dit un personnage dans une œuvre n’est pas nécessairement, la pensée de l’auteur. Nous réfléchissons au cas par cas aux conflits entre les différents droits et libertés qui composent le grand ensemble des droits humains. Nous invitons à réfléchir aux distinctions entre ce qui peut se passer à l’occasion de rapports sociaux hors de l’œuvre, dans le cadre de sa préparation, de sa réalisation ainsi que de sa diffusion.

Nous considérons que l’on doit faire la différence entre les œuvres et la conduite de ceux qui la créent, ou les incarnent, sans que ceci soit pour autant un dogme absolu. Par exemple, nul ne peut s’abriter derrière la liberté de création pour tenir des propos antisémites et révisionnistes, comme l’a fait Dieudonné à de multiples reprises dans ses spectacles. De même, un réalisateur qui filmerait une violence sexuelle non consentie par une comédienne, ou un plasticien maltraitant physiquement son modèle pour obtenir l’image voulue ne serait pas recevable à se prévaloir de la liberté de création et serait pénalement responsable, comme le comédien se livrant à cette violence. La Convention européenne des droits de l’Homme, qui protège la liberté d’expression (et donc de création, avec ses spécificités) dans son article 10, comporte une disposition que l’on oublie trop souvent et qui est pourtant très éclairante, son article 17 : « Aucune des dispositions de la présente Convention ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d’accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnus dans la présente Convention ».

Abus de pouvoir

Il est arrivé plusieurs fois à la cour de Strasbourg de considérer que celui qui mésuse de la liberté d’expression pour tenir des propos discriminatoires ou révisionnistes ne peut invoquer la liberté d’expression car son but est de détruire la société démocratique égalitaire telle que la promeut la Convention. Forts de notre connaissance du droit, de notre expérience, de nos riches débats internes et de nos prises de position publiques, nous souhaitons dire très fermement que ceux qui invoquent l’Art avec une majuscule comme un « totem d’impunité » pour les prédateurs sexuels mettent la liberté qu’ils prétendent défendre en danger. Si Depardieu était menacé de censure, ou si les œuvres dans lesquelles il a joué l’étaient, l’Observatoire de la liberté de création (OLC) s’y opposerait comme il l’a toujours fait pour d’autres artistes (Polanski, Cantat…). Dans une société démocratique, il revient aux spectateurs de juger les œuvres qu’ils sont libres de voir, ou de ne pas voir, et à la justice de juger les hommes.

Pour autant, le fait d’être un auteur, un artiste, un artiste-interprète, ne confère aucun statut exceptionnel qui permettrait de ne pas assumer la responsabilité relative aux actes délictueux commis envers des personnes à l’occasion de la préparation ou de l’élaboration d’œuvres. Un tournage, un spectacle, ne sont pas des lieux de non-droit et les professions concernées sont d’ailleurs en voie d’en prendre conscience. Ce sont des lieux de travail qui, comme tous les lieux de travail, doivent permettre à toutes et tous de remplir ses tâches sans être exposé(e), comme victime ou comme témoin, à des violences.

Quand des femmes osent finalement prendre la parole pour dénoncer un comportement délictueux, ce n’est pas l’art qu’elles attaquent, c’est un homme. Avec tout le courage que cela suppose, et tous les risques que cela leur fait encourir. Un homme qui semble avoir abusé de sa position iconique de « monstre sacré », ce que dira la justice, dont le travail est utilement complété par la presse que l’on ne saurait faire taire à coups de tribunes. Car ce que ne dira pas la justice, c’est tout le contexte social et historique qui a permis à une profession dans son ensemble de couvrir, voire de contribuer à produire ce type d’actes auxquels ont été exposées tant de femmes se taisant de peur de perdre leur emploi et de renoncer à leurs rêves. A ces femmes, l’Observatoire de la liberté de création (OLC) adresse son plein et entier soutien.

Source: 18 janvier 2024 – Tribune de l’Observatoire de la liberté de création “Quand des femmes prennent la parole pour dénoncer Depardieu, ce n’est pas l’art qu’elles attaquent, c’est un homme” publiée sur Libération

13 octobre 2023 – Tribune collective “A Mayotte, l’urgence c’est l’eau, pas les « décasages » : stop aux expulsions ” publiée dans L’Humanité 15 octobre 2023

Tribune collective signée par LDH

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Alors que Mayotte fait aujourd’hui face à une crise de l’eau sans précédent, qui devrait mobiliser toute l’énergie des pouvoirs publics, plusieurs organisations demandent la suspension de l’opération Wuambushu, lancée au mois d’avril pour intensifier le programme de démolition des habitations en tôles pour raison d’insalubrité, au prétexte de régler, en même temps, les problèmes d’insécurité et de lutte contre l’immigration dite irrégulière. 

La crise de l’eau à Mayotte est une crise progressive dont les premiers signes remontent au moins à février 2016, date des premiers rationnements et des premières coupures d’eau. Circonscrite au départ dans les villages de brousse du sud et du nord de l’île, la pénurie s’est généralisée depuis deux ans y compris dans les zones urbaines (communes de Mamoudzou et de Koungou).

En plus de la sécheresse, l’état de délabrement du réseau de distribution interroge sur la qualité de l’eau fournie. La population se plaint en effet qu’une eau trouble, à la limite boueuse, coule des robinets lors de la remise en eau, les habitants des quartiers pauvres se plaignent de maux de ventre et les cas de gastro-entérites semblent se multiplier faisant craindre à la population des maladies plus graves telles que des fièvres typhoïdes voire des cas de choléra.
L’insuffisance, pour ne pas dire l’absence, de mesures d’anticipation de la crise par les pouvoirs publics risque de peser lourd sur la situation durant les semaines qui séparent encore de la saison des pluies qui ne débutera qu’en novembre.

Il est d’ailleurs incompréhensible que, dans un tel contexte, certain.e.s élu.e.s de Mayotte continuent  à prendre pour cible la population des quartiers les plus pauvres et aillent même jusqu’à s’insurger de l’installation de rampes d’eau à proximité des bidonvilles.

Et on peut s’indigner, de la même manière, de voir les pouvoirs publics continuer à mener l’opération dite Wuambushu. Rappelons que cette opération, débutée le 22 avril 2023, a marqué la volonté du gouvernement d’intensifier le programme de démolition des habitations en tôles pour raison d’insalubrité, prétendant en même temps régler les problèmes d’insécurité et de lutte contre l’immigration dite irrégulière. Depuis cette date, cinq quartiers ont été détruits pour un total de 400 logements selon les chiffres communiqués par le ministre de l’Intérieur et la préfecture de Mayotte. L’objectif annoncé par le gouvernement étant d’aboutir à détruire 1 25O logements d’ici la fin de l’année, il reste donc 850 logements à démolir (soit les deux tiers d’une opération qui devait être terminée fin juin).

Le contexte anxiogène qui touche tout particulièrement les populations vulnérables qui vivent dans les bidonvilles, du fait des restrictions d’eau, n’a pas empêché la préfecture de publier un nouvel arrêté 2 d’expulsion le 23 août 2023 pour un quartier de Mutsamudu, village au sud de la commune de Bandrele. Le contour des démolitions semble pour le moins mal apprécié : « 20 bangas environ vides de leurs occupants » seraient concernés selon la gendarmerie alors que l’ARS parle « des locaux à usage d’habitation numérotés de 1 à 91 » et que les propositions de relogements (annexées à l’arrêté) se limitent à 11 familles sans la moindre précision sur leur composition. La démolition pourrait néanmoins intervenir au tout début du mois d’octobre.
C’est pourquoi les signataires du présent texte demandent au gouvernement de mobiliser, avec les moyens nécessaires, toute son énergie sur la résolution de la crise de l’eau qui menace à très court terme des besoins vitaux de la population et, en conséquence, de suspendre urgemment  le programme de démolition des quartiers de cases en tôles, de cesser le contrôle administratif des habitants sur la voie publique qui entrave leur mobilité et, au contraire, de tout mettre en œuvre pour favoriser les déplacements vers les centres de soins afin d’enrayer tout risque d’épidémie.

Signataires : Association pour le droit des étrangers (ADDE), Secours Catholique-Caritas France, Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), LDH (Ligue des droits de l’Homme), Syndicat des avocats de France (Saf).

Source: 13 octobre 2023 – Tribune collective “A Mayotte, l’urgence c’est l’eau, pas les « décasages » : stop aux expulsions ” publiée dans L’Humanité

3 juillet 2023 – Tribune “« Les cours criminelles départementales contribuent à perpétuer l’invisibilisation des crimes de viol »” publiée dans le Monde 4 juillet 2023

Tribune commune signée par Patrick Baudouin, président de la LDH

Lire la tribune dans le Monde

Avec la généralisation des cours criminelles départementales, le viol n’est plus jugé par une cour d’assises. Dans une tribune au « Monde », une centaine de responsables associatifs ou membres des professions du droit et du monde judiciaire, réunis par le collectif #NousToutes, dénoncent ce recul des droits des femmes et appellent les députés à supprimer ces nouvelles juridictions.

Depuis le 1er janvier 2023, les viols sont symboliquement devenus des crimes de « seconde classe », réduisant à néant le long combat de Gisèle Halimi pour qu’ils soient jugés comme des crimes à part entière, mais aussi celui de toutes celles et ceux qui luttent contre les violences sexistes et sexuelles.

En effet, face au manque de moyens alloués à la justice et au nombre d’affaires de viol devant être jugées, la seule réponse du gouvernement a été l’instauration des cours criminelles départementales, expérimentées dans plusieurs départements depuis 2019. Or ces cours ne permettent pas une prise en compte adaptée, par la justice, du problème public des violences sexistes et sexuelles.

Pour rappel, selon l’Observatoire national des violences faites aux femmes, on compte en France 94 000 femmes majeures se déclarant victimes de viol ou de tentative de viol par an, soit une toutes les six minutes. Malgré les nombreuses voix qui se sont élevées contre cette réforme et les carences constatées dans le rapport rendu par le comité d’évaluation en octobre 2022, les cours criminelles départementales sont à présent les seules juridictions chargées de juger toute personne majeure accusée d’un crime puni jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle, hors récidive.

En pratique, les affaires jugées par ces cours sont, dans près de 90 % des cas, des affaires de viol. Présentées par le gouvernement comme une alternative permettant d’éviter la correctionnalisation des viols – pratique consistant à disqualifier le viol pour le juger comme un délit d’agression sexuelle devant un tribunal correctionnel sans jurés, dans une optique de gain de temps –, les cours criminelles départementales, en écartant le jury populaire, s’apparentent pourtant à une forme de correctionnalisation.

Cette réforme est un non-sens démocratique

Le viol n’est en effet plus jugé par une cour d’assises comme les autres crimes. Poursuivant une logique gestionnaire, le gouvernement a souhaité faire des économies en supprimant le jury populaire, les cours criminelles étant exclusivement composées de magistrates et de magistrats professionnels. Ces prétendues réductions de coût se font au détriment des citoyennes et des citoyens, de la démocratie et du traitement judiciaire des crimes de viol.

Nous, citoyennes et citoyens engagés, femmes et hommes appartenant à des associations et collectifs féministes, à des organisations de la société civile, aux professions du droit et du monde judiciaire, considérons que cette réforme est un non-sens démocratique ainsi qu’un recul des droits des femmes et des minorités de genre et nous dénonçons l’instauration de ces cours criminelles.

D’un point de vue pratique, les objectifs des cours criminelles départementales n’ont pas été atteints. Selon le dernier rapport d’évaluation, ni la correctionnalisation, ni le temps d’audiencement, ni la durée des audiences n’ont été significativement réduits. En tout état de cause, l’objectif de réduction du temps d’audience poursuivi par la réforme est un retour en arrière dans l’attention portée aux femmes victimes et à leur traumatisme.

En outre, le taux d’appel des décisions des cours criminelles témoigne de l’insatisfaction des justiciables sur la manière dont les audiences s’y déroulent : 23 % pour les affaires de viol jugées par les cours criminelles départementales, contre 17 % devant les cours d’assises. D’un point de vue social et psychologique, elles empêchent les victimes de viol de faire entendre leur voix largement.

Reléguer le crime de viol au second plan

L’espace de parole donné aux victimes est d’autant plus important qu’il s’agit d’un crime caractérisé par la loi du silence qui empêche encore trop de victimes de demander justice : en 2016, seulement 12 % des victimes d’agressions sexuelles portaient plainte, selon les chiffres relayés par le gouvernement.

D’un point de vue démocratique, ces cours criminelles soustraient le crime de viol à la connaissance des jurys citoyens amenés à siéger en cour d’assises. Les citoyennes et citoyens sont désormais mis à l’écart de l’œuvre de justice en matière de violences sexuelles. Cela prive donc une partie de la population d’une sensibilisation à la réalité de ces crimes et de la possibilité de participer à la manière dont ils sont jugés. Cela contribue à la perpétuation de l’invisibilisation des crimes de viol.

D’un point de vue juridique et politique, faire juger les viols par une juridiction criminelle distincte revient à les disqualifier et ne résout pas le problème éminemment éthique et juridique de la correctionnalisation. Faire juger les crimes sexuels par une juridiction compétente pour connaître des crimes dits « les moins graves » minimise le crime de viol dans l’esprit du plus grand nombre. Elle relègue le crime de viol au second plan par rapport aux autres crimes.

Préserver le jury populaire et sauver les assises

Alors que le projet de loi de programmation et d’orientation de la justice 2023-2027 est actuellement débattu à l’Assemblée après avoir été voté par le Sénat, nous appelons les députés à voter les amendements à l’article 3 qui visent à supprimer les cours criminelles départementales, préserver le jury populaire et sauver les assises !

Nous demandons aux pouvoirs publics de prendre la mesure de la gravité et de la singularité du crime de viol. Nous demandons une augmentation du budget alloué à la justice et au programme de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes pour lutter efficacement contre les violences sexistes et sexuelles et pour que les procès qui en découlent se déroulent dans le respect des droits des victimes et des principes fondamentaux de notre République.

Nous demandons le recrutement de personnels judiciaires supplémentaires pour le jugement des violences sexistes et sexuelles. Le viol doit faire l’objet de réformes à la mesure de la gravité et de l’ampleur du problème public qu’il représente. Voter pour qu’il ne devienne pas un crime de « seconde classe » est indispensable.

Parmi les signataires : Agnès Aoudai, coprésidente du Mouvement des mères isolées (MMI) ; Patrick Baudouin, président de la LDH (Ligue des droits de l’Homme) ; Sandrine Bouchait, présidente de l’Union nationale des familles de féminicides (UNFF) ; Claire Dujardin, présidente du Syndicat des avocats de France (SAF) ; Benjamin Fiorini, universitaire, président de Sauvons les assises ! Jérôme Pauzat, président de l’association A.M.O.U.R de la Justice (Association des magistrats, personnels et usagers de justice œuvrant pour l’unité et la réforme) ; Emmanuelle Piet, présidente du Collectif féministe contre le viol (CFCV) ; Kim Reuflet, présidente du Syndicat de la magistrature (SM) ; Laurence Roques, présidente de la commission Libertés et droits de l’homme au Conseil national des barreaux (CNB) ; My-Kim Yang-Paya, présidente d’honneur d’Avocats femmes violences (AFV).

 

 

Source: 3 juillet 2023 – Tribune “« Les cours criminelles départementales contribuent à perpétuer l’invisibilisation des crimes de viol »” publiée dans le Monde

9 juillet 2021 – Tribune collective “Pour un véritable code de l’enfance” publiée dans Libération 29 avril 2023

Tribune signée par la LDH publiée dans Libération

Présenté le 16 juin dernier au Conseil des ministres, le projet de loi sur la protection de l’enfance est en cours d’examen à l’Assemblée nationale.

Les principaux points de ce texte auraient pour finalité “de mieux protéger les enfants contre les violences” et de “mieux piloter la politique de prévention et de protection de l’enfance”, avec la priorité du placement dans la famille de l’enfant, la normalisation de l’évaluation des situations de danger sur l’ensemble du territoire, ou encore une infime amélioration des conditions de travail et de rémunération des familles d’accueil… Néanmoins, ce texte est aussi celui qui, sous certaines conditions, autorise les placements d’enfants à l’hôtel, qui sont unanimement décriés, en faisant mine de poser une interdiction de principe. Il prévoit enfin des mesures particulièrement inquiétantes concernant les mineur-e-s isolé-e-s étrangers-ère-s.

Ce projet de loi, établi et discuté dans la précipitation, le gouvernement ayant encore une fois recours à la procédure accélérée, ne permet pas de garantir suffisamment l’intérêt des enfants et ne répond pas aux attentes légitimes des acteurs et actrices intervenant en protection des enfants. Il n’évoque pas la notion de prévention de l’enfance en danger et surtout le manque de moyens pour assurer l’ensemble des missions de prévention et de protection de l’enfance.

En effet, la protection de l’enfance connaît une crise profonde en raison du défaut criant de moyens et d’une politique globale de prise en charge des enfants erratique et morcelée dans de nombreux départements. Ainsi des décisions judiciaires en assistance éducative restent inappliquées ou retardées par manque de moyens humains et d’accueil ; des enfants sont laissés à domicile dans un contexte de danger avéré ou bien placés à l’hôtel faute de place en institution; ou bien encore confiés à des structures inadaptées à leur problématique ou éloignées de leurs attaches sociales et familiales, par défaut de diversité des hébergements ou de place ; le travail indispensable d’intégration des familles dans le processus éducatif est souvent « oublié » dans le stress du quotidien de travail, etc.

Dans ce contexte particulièrement oppressant, les professionnels ne se reconnaissent plus dans des demandes centrées en permanence sur l’urgence, le chiffre et les gestions comptables à l’origine d’ un épuisement psychique et physique et d’une perte de sens de leur engagement professionnel.

Ces graves dysfonctionnements ne seront pas réglés par ce texte qui élargit au contraire les possibilités de délégation d’autorité parentale à l’Aide sociale à l’enfance, amoindrissant de fait le contrôle du juge, ne garantit pas l’absence d’éloignement des enfants faute de structures de proximité et prévoit de trop nombreuses dérogations à l’interdiction d’héberger des enfants en hôtel ou en centres de vacances, Il est aussi une occasion manquée de permettre une pleine et entière assistance en justice du mineur, particulièrement vulnérable, à tous les stades de la procédure et la question de l’accompagnement des jeunes majeurs sortant de l’Aide Sociale à l’Enfance est à nouveau ignorée.

Pire, ce texte organise la scission entre protection de l’enfance et prise en charge des enfants isolés étrangers. Loin de répondre aux véritables problématiques qui rendent l’accompagnement de ces enfants discriminatoire (invisibilisation de leurs difficultés, accompagnement éducatif insuffisant, absence d’hébergement ou hébergement à l’hôtel, éloignement géographique forcé pour satisfaire les quotas par département), il organise un glissement dangereux et inacceptable de la protection de l’enfance vers la politique d’immigration.

Le recours de fait obligatoire au fichier dit « d’appui à l’évaluation de la minorité » induit une logique de contrôle, au détriment de la protection de ces jeunes particulièrement vulnérables et au risque de refuser par erreur la protection à un enfant.

Par ailleurs, ce projet de loi est discuté alors qu’entre en application, le 30 septembre 2021 le code de la justice pénale des mineurs, très contesté également qui affiche des réponses fermes et rapides au détriment du temps essentiel de l’accompagnement éducatif.

En définitive, il ne prend pas en compte la protection de l’enfant dans sa globalité. Il fait l’impasse sur la dimension pourtant essentielle de la prévention, n’évoquant aucunement certains des lieux de vie des enfants et adolescents tel que l’école.

Pour éviter ces différents écueils, nous demandons que le débat soit réorienté sur la réflexion autour d’une véritable protection de l’enfance, globale et dotée des moyens adéquats, dont les dispositions seraient réunies dans un code de l’enfance intégrant les deux dimensions que sont la protection des enfants et la prévention, dont font pleinement partie les mineur-e-s non accompagné-e-s, et la justice pénale des mineur-e-s.

Tous ces enfants sont les mêmes : ils ont besoin d’un accompagnement et d’une aide cohérente et bienveillante.

Cette jeunesse reste l’avenir de notre société. Demain adulte, comment peut-elle se construire dans cet état de relégation, d’abandon, de stigmatisation qui lui est imposé ? Quels citoyens et citoyennes seront ces jeunes demain ? Il s’agit de l’urgence de leur protection immédiate, mais aussi d’un investissement humain à long terme dans la construction d’une société plus apaisée.

Organisations signataires : Conseil national des Barreaux ; Syndicat de la magistrature ; Syndicat des avocats de France ; SNPES-PJJ/FSU ; La CGT ; FSU ; Ligue des droits de l’Homme ; Solidaires ; SNUASFP FSU ; SNUTER FSU ; DEI France ; SNEPAP FSU ; Sud Santé sociaux ; Solidaires Justice ; Sud Collectivité territoriales

Paris, le 9 juillet 2021

Lire la tribune dans Libération

Source: 9 juillet 2021 – Tribune collective “Pour un véritable code de l’enfance” publiée dans Libération

22 avril 2023 – Tribune collective “Alerte sur les libertés associatives” publiée dans le JDD 23 avril 2023

Tribune collective, signée par Patrick Baudouin, président de la LDH, et publiée dans le JDD

Plusieurs acteurs des secteurs associatifs et syndicaux, dont Claire Thoury, présidente du Mouvement associatif, Laurent Berger ou encore Patrick Baudouin, président de la Ligue des droits de l’Homme, alertent sur la remise en cause de la liberté des associations.

Le 5 avril dernier, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, interpellé lors d’une audition sénatoriale, sur les critiques formulées par la Ligue des droits de l’Homme quant à l’action des forces de l’ordre à Sainte Soline, a indiqué que, dans ce contexte, les subventions accordées par l’Etat à la LDH devraient en effet être examinées, avant d’enjoindre les collectivités territoriales à faire de même. Loin de remettre en cause ces propos, la Première Ministre a renchéri en questionnant certaines prises de position de cette même association.

Ces déclarations ont, à juste titre, suscité de vives réactions. Parce que l’expression du ministre de l’Intérieur ressemble à l’expression d’un fait du prince usant de son pouvoir pour réduire les oppositions, et parce qu’elle porte sur une association dont l’histoire est faite, depuis 125 ans, de combats pour protéger les droits et libertés de tous et toutes et faire vivre les valeurs de la République, y compris parfois face aux autorités elles-mêmes.

Il est évidemment normal qu’un financeur s’assure de la bonne utilisation des fonds par les associations qu’il subventionne ; mais cela sur la base des missions qui sont celles de l’association, et pour lesquelles elle est soutenue ; et non pas conformément à ce que souhaiteraient entendre celles ou ceux qui pour un temps ont la responsabilité de la gestion de l’Etat. Ainsi que le rappelle à juste titre la circulaire relative aux relations entre pouvoirs publics et associations du 29 septembre 2015, « l’octroi de subventions doit favoriser un partenariat équilibré entre pouvoirs publics et associations. » Subventionner une association ne veut pas dire la contraindre au silence. La grandeur d’une démocratie est justement de savoir soutenir la diversité des approches et des points de vue qui permettent le débat et qui sont aussi des contre-pouvoirs nécessaires. Il est donc extrêmement grave qu’un ministre de la République puisse ouvertement mettre en question les financements accordés à une association parce que cette dernière, dans le respect de la loi, a une parole critique sur l’action de l’Etat.

Mais si le ministre de l’Intérieur se permet cette mise en cause et en question si directe, c’est parce que le climat aujourd’hui l’y autorise. En effet aussi choquantes soient ces déclarations, nous ne pouvons malheureusement pas en être complètement surpris. Elles interviennent dans un contexte où de nombreux signaux, bien que moins visibles, traduisent cette volonté de remettre en cause les libertés et l’indépendance des associations et de renforcer le contrôle sur les organisations de la société civile.

La loi confortant le respect des principes de la République et ses dispositions relatives au Contrat d’engagement républicain, à l’élargissement des motifs de dissolution d’associations, au renforcement des mesures de contrôle des financements sont une traduction très concrète de ce tournant dans les rapports entre administrations et associations. Le contrat d’engagement républicain, notamment utilisé pour remettre en cause la subvention versée à l’association Alternatiba Poitiers, dénature la relation de confiance qui doit prévaloir entre pouvoirs publics et associations, mettant en place une forme de brevet préalable de « conformité républicaine » contraire à l’esprit de la loi 1901. Et quand les dispositions de ce Contrat ne sont pas directement activées, il constitue de plus en plus souvent une épée de Damoclès, voire une menace non déguisée pour des associations dont les activités militantes ne répondent pas aux positions de leurs interlocuteurs politiques. Cette boite de Pandore qui a été ouverte conduit aujourd’hui des élus territoriaux à vouloir imposer aux associations dans leurs actions les exigences de neutralité qui n’ont à s’appliquer qu’aux services publics ; conduit des parlementaires à vouloir pénaliser des associations pour les actions individuelles de leurs membres, en dehors de toute intervention de justice ; conduit certaines administrations à exiger d’associations, au prétexte qu’elles reçoivent des fonds publics, qu’elles se censurent dans leurs pratiques. Qu’il s’agisse de nouvelles contraintes administratives, de nouveaux textes législatifs ou de déclarations publiques, certaines associations se retrouvent de plus en plus souvent contraintes dans leur capacité d’actions, voire attaquées dans leur capacité à interpeller les pouvoirs publics.

Cette fragilisation est dangereuse. Elle a des impacts. Des impacts sur celles et ceux qui sont engagées pour l’action, qui s’investissent pour le collectif et pour l’intérêt général et auxquels on renvoie soit de la défiance soit de la contrainte. Des impacts sur la capacité à prendre en compte les voies de transformation qui sont bien souvent portées par les associations, parfois à la limite de ce que sont les règles admises, souvent en tout cas ailleurs que dans ce que proposent les politiques publiques. Des impacts enfin et surtout, pour notre vitalité démocratique et pour sa sérénité. Nous avons plus que jamais besoin de ces espaces de construction de la parole et de l’action collectives que sont les associations et de la contribution qu’elles peuvent apporter, sous de multiples formes au débat public. Limiter et contraindre ces expressions ne peut que contribuer à exacerber des tensions déjà vives dans notre société.

Les alertes sont aujourd’hui trop nombreuses et récurrentes pour qu’elles ne soient pas prises au sérieux. La Défenseure des droits, dans un communiqué du 14 avril, constate « une intensification des risques d’atteintes à la liberté d’association » et souligne qu’ « une telle évolution est hautement problématique dans un État démocratique ». Plus que jamais, il est essentiel de réaffirmer collectivement notre attachement aux libertés associatives, de rendre publiques toutes les atteintes qui y seront portées et nous mobiliser contre ces attaques.

Il est de la responsabilité du Gouvernement aujourd’hui, de cesser les amalgames et d’affirmer haut et fort, en mots et en actes, que les libertés associatives sont au cœur de notre pacte démocratique. Nous appelons également tous ceux et toutes celles qui en savent toute l’importance, et notamment les élus territoriaux qui construisent au quotidien avec les associations, à se mobiliser pour elles.

Un an après des élections où le Président de la République lui-même expliquait que le vote « l’obligeait », n’ayons pas peur de la démocratie. Ayons la sagesse de ne pas considérer toute opposition comme un « nouveau séparatisme ». Ayons l’intelligence de débattre sans nous invectiver. Ayons le courage de réinstaurer un dialogue de confiance entre les pouvoirs publics et les associations. Il en est encore temps !

129 acteurs de la société civile alertent sur la remise en cause de la liberté des associations :

  • Claire Thoury, Présidente, Le Mouvement associatif
  • Thierry Abalea, Président, Le Mouvement associatif Bretagne
  • Yoann Alba, Président, Crajep Centre Val de Loire
  • Chantal Alexandre, Présidente, MJC Amboise
  • Stéphane Alexandre, Co-président, Réseau National des Juniors Associations
  • Fanette Bardin, Arthur Moraglia, Pauline Veron, Co-président.e.s, Démocratie Ouverte
  • Patrick Baudouin, Président, Ligue des droits de l’Homme
  • Souâd Belhaddad, Fondatrice, Citoyenneté Possible
  • Laurent Berger, Secrétaire général, CFDT
  • François Bernard, Président, Alice Guy Production
  • Patrick Bertrand, Directeur exécutif, Action Santé Mondiale
  • Cathy Blanc-Gonnet, Directrice, Humatem
  • Thierry Bos, président, Fédération des MJC de France
  • François Bouchon, Président, France Bénévolat
  • Lucie Bozonnet, Yann Renault, Arnaud Tiercelin, Co-président.e.s, Cnajep
  • Olivier Bruyeron, Président, Coordination SUD
  • Sylvie Bukhari-De Pontual, Présidente, CCFD-Terre Solidaire
  • Rodrigue Carbonnel, Secrétaire général, Fédération des Aroeven
  • Marie-Pierre Cattet, Présidente, Le Mouvement associatif Bourgogne-Franche Comté
  • Clément Chauvel, Directeur, OPPELIA Essonne
  • Suzanne Chevrel, Présidente, Eclaireuses et Eclaireurs Unionistes de France
  • Philippe Clément, Président, Le Mouvement associatif Normandie
  • Patricia Coler, Co-présidente, Mouvement pour l’Economie Solidaire
  • Morgane Creach, Directrice générale, Réseau Action Climat
  • Henry de Cazotte, Président, GRET
  • Christophe Dansac, Trésorier, Académie territoriale des savoirs en construction
  • Leopold Dauriac, Co-président, MES Occitanie
  • Vincent David, Fondateur, Agence RUP
  • Charlotte Debray, Déléguée générale, La Fonda
  • Michelle Demessine, Présidente, Union nationale des associations de tourisme
  • Dominique Demory, Président, URIOPSS Hauts de France
  • Jean-Luc Depeyris, Directeur général, Sauvegarde du Val d’Oise
  • Thierry Dereux, Président, FNE Hauts de France
  • Joël Derrien, Président, AD PEP 28
  • Sophie Descarpentries, Co-présidente, FRENE
  • Julie Desmidt, Co-présidente, UFISC
  • Véronique Devise, Présidente, Secours Catholique – Caritas France
  • Philippe Doux, Secrétaire, Le Mouvement associatif Pays de le Loire
  • Cécile Duflot, Directrice générale, Oxfam France
  • Sarah Durocher, Présidente, Planning familial
  • Sylvie Emsellem, Déléguée nationale, l’ESPER
  • Gilles Epale, Président, Le Mouvement associatif Auvergne-Rhône-Alpes
  • Christian Eyschen, Secrétaire général, Fédération nationale de la Libre Pensée
  • Jean-Marie Fardeau, Délégué national, VoxPublic
  • Beatrice Fonlupt, Directrice générale, ADAES 44
  • Françoise Fromageau, Présidente, Mona Lisa
  • Aurélie Gal-Régniez, Directrice, Equipop
  • Claude Garcera, Président, Union Nationale pour l’Habitat des Jeunes
  • Christophe Gaydier, Président, Animafac
  • Iola Gelin, Directrice, CEMEA Centre Val de Loire
  • Martine Gernez, Présidente, HAMAP
  • Dominique Gillot, Présidente, Fédération générale des PEP
  • Gérald Godreuil, Délégué général, Fédération Artisans du Monde
  • Bruno Guermonprez, Président, Élevages Sans Frontières
  • Murielle Guilbert, Co-déléguée générale, Union syndicale Solidaires
  • Dominique Guillien Isenmann, Présidente, Fédération Nationale solidarité femmes
  • Dominique Hays, Président, Réseau Cocagne
  • Michel Horn, Président, GRAPE Normandie
  • Eric Hugentobler, Directeur, Picardie Nature
  • Philippe Isnard, Président, Laïcité l’observatoire PACA Midi
  • Didier Jacquemain, Président, Hexopée
  • Véronique Jenn-Treyer, Directrice, Planète Enfants & Développement
  • Michel Jezequel, Président, CRESS Bretagne
  • Mohamed Khandriche, Président, Touiza solidarité
  • Michel Le Direach, Président, UFCV
  • Anastasia Léauté, Présidente, RESES
  • Marion Lelouvier, Présidente, Centre français des Fonds et Fondations (CFF)
  • Jacques Limouzin, Président, Mouvement des Régies
  • Françoise Marchand
  • Marie-Claire Martel, Présidente, COFAC
  • Océane Martin, Déléguée générale, Radio Campus France
  • Catherine Mechkour-Di Maria, Secrétaire générale, Réseau national des ressourceries et recycleries
  • Hélène Mimar-Rangel, Présidente, Radio Occitania
  • Guy Mimard, Trésorier, Radio Occitania
  • André Molesin, Responsable régional Occitanie, ESPER
  • Stéphane Montuzet, Président, CRESS Nouvelle Aquitaine
  • José Mariage, Directeur, Le Partenariat
  • Alexandre Moreau, Président, Anafé
  • Véronique Moreira, Présidente, WECF France
  • William Morissé, Président, Office de tourisme des Portes Euréliennes d’Ile de France
  • Aurelien Naud, Directeur adjoint, OUL
  • Charlotte Niclause, Directrice générale adjointe, Ligue de l’Enseignement 78
  • Carole Orchampt, Déléguée générale, Réseau national des Maisons des associations
  • Béremy Otto, Chef de projet, Mouvement associatif Centre val de Loire
  • Imane Ouelhadj, Présidente, UNEF
  • Judith Pavard, Présidente, Fédération nationale des arts de la rue
  • Yvan Pavis, Délégué régional, Fédération des MJC Ile de France
  • Amélie Pedrot, Administratrice, La Fonda
  • Valérie Pélisson-Courlieu, Directrice générale, ESPERER 95
  • Philippe Pereira , Délégué national, Cotravaux
  • Pascal Petit, Vice-président, Mouvement associatif de Bretagne
  • Peuple et Culture, Collectif
  • Guy Plassais, Président, Fédération 95 de la Ligue de l’Enseignement
  • Jean-François Quantin, Co-président, MRAP
  • Marie-Noëlle Reboulet, Présidente, Geres
  • Marcel Rémon, Directeur, CERAS
  • Marie-Noelle Rinquin, Administratrice, Institut Culturel de Bretagne – Skol Uhel Ar Vro
  • Tristan Rivoallan , Trésorier, Constructions Incongrues
  • Christophe Robert, Délégué général, Fondation Abbé Pierre
  • Jean-Marc Roirant, Président, Fédération de Paris Ligue de l’Enseignement
  • Christine Rollard, Présidente, OPIE
  • Michel Roy, Secrétaire général, Justice et Paix France
  • Gilles Rouby, Président, Collectif des Associations Citoyennes
  • Jérôme Saddier, Président, ESS-France
  • Nadjima Saïdou, Présidente, Engagé·e·s & Déterminé·e·s
  • Cécile Sajas, Présidente, Crajep Ile de France
  • Louise Schalchli, Chargée de mission, Le Mouvement associatif Occitanie
  • Arnaud Schwartz, Président, France Nature Environnement
  • Pierre Segura, Président, Fédération nationale des Francas
  • Roger Sue, Sociologue
  • Antoine Sueur, Président, Emmaüs France
  • Françoise Sturbaut, Présidente, Ligue de l’Enseignement
  • Syndicat de la Magistrature
  • Julien Talpin, Chargé de recherche au CNRS, Observatoire des libertés associatives
  • Marielle Thuau, Présidente, Fédération Citoyens & Justice
  • Florence Thune, Directrice générale, Sidaction
  • José Tissier, Président, Commerce Equitable France
  • Jérémie Torel, Co-président, Bénénova
  • Mackendie Toutpuissant, Président, FORIM
  • Robert Turgis, Président, Le Mouvement associatif d’Ile-de-France
  • Elise Van Beneden, Présidente, Anticor
  • Nathalie Vandermersch, Directrice générale, Ajhiralp
  • Didier Vaubaillon, Président, Terre des Hommes France
  • Daniel Verger, Président, CLONG Volontariat
  • Françoise Vernet, Présidente, Terre&Humanisme
  • Kaméra Vesic, Directrice, PIKPIK Environnement
  • Loreline Vidal, Administratrice référente, Réseau National des Maisons des Associations
  • Jérôme Voiturier, Délégué général, UNIOPSS
  • Youlie Yamamoto, Porte-Parole, Attac France

Source: 22 avril 2023 – Tribune collective “Alerte sur les libertés associatives” publiée dans le JDD