Tribune collective dont la LDH est signataire
Alors que les regards se tournent vers une nouvelle flambée de violence au Moyen-Orient, Gaza continuer à sombrer dans une crise humanitaire sans précédent. Plusieurs responsables associatifs, dont Adeline Hazan, Adrien Taquet ou Nathalie Tehio appellent la France à rompre avec l’inaction et à faire du respect du droit international une priorité absolue.
Depuis le vendredi 13 juin, le Moyen-Orient connaît une nouvelle escalade de la violence avec des frappes menées en Iran et en Israël sur des zones résidentielles, endommageant des infrastructures civiles et faisant des morts et des blessés parmi la population – y compris des enfants.
Ce nouvel accès de tensions montre, une fois encore, que l’inaction coûte cher aux populations civiles, et d’abord aux enfants, mais ne doit pas nous faire oublier Gaza, qui reste le cœur d’une crise humanitaire sans précédent où l’enfance se consume sous nos yeux. Sous les décombres, dans les dédales d’un territoire assiégé, des milliers d’enfants tentent de survivre face à l’impuissance de la communauté internationale. Seulement nés au mauvais moment, au mauvais endroit. Ils ne sont ni des combattants ni des stratèges, seulement des enfants. Et pourtant, ce sont eux qui paient le plus lourd tribut d’une guerre sans fin.
Depuis la fin du cessez-le-feu le 18 mars 2025, 1.361 enfants ont été tués et 3. 986 autres blessés. Au total, plus de 50. 000 enfants ont été tués ou blessés depuis vingt mois. Ces enfants vivent l’indicible : violations graves de leurs droits fondamentaux, déplacements forcés incessants, destruction systématique des infrastructures civiles, perte des membres de leur famille, désespoir absolu.
La famine n’est plus une menace : elle est là, rampante, cruelle, implacable. Des bébés meurent de faim, privés de traitements après avoir été privés d’accès à l’eau et à la nourriture. Déjà, 71. 000 enfants et plus de 17.000 mères nécessitent une prise en charge urgente contre la malnutrition aiguë.
Combien d’enfants faudra-t-il encore perdre pour que les valeurs que nous portons se traduisent enfin en actes concrets ? Nous, acteurs engagés pour la protection des droits des enfants en France et dans le monde, refusons d’accepter l’inacceptable. Une génération entière est en train de disparaître. À Gaza, les enfants ne parlent plus, ne jouent plus. Ils survivent, quand ils ne meurent pas.
Pourtant, le droit international humanitaire est clair : les enfants doivent être protégés, partout, toujours. Aucun impératif militaire ne peut justifier le blocus persistant de Gaza, ni l’anéantissement total des écoles, des hôpitaux…
La Convention internationale des droits de l’enfant, que la France a été l’un des premiers pays à ratifier, n’est pas une option. C’est une obligation juridique, politique et un devoir éthique. Et à Gaza, elle est chaque jour piétinée dans un silence assourdissant.
La France doit agir, pas seulement condamner.
Dans ce cimetière à ciel ouvert où les enfants naissent condamnés, la levée du blocus actuel est une exigence vitale, même si cela ne résoudra pas tout.
Face à l’urgence absolue, et alors que la conférence internationale annoncée sur la question israélo- palestinienne, coprésidée par la France, a été annulée, nous appelons notre pays à ne pas renoncer. L’absence de conférence ne doit pas être un prétexte à l’inaction.
Nous demandons que la France porte, sans délai, une levée immédiate du blocus pour permettre un accès humanitaire total, durable et sans entrave ; qu’elle œuvre à un cessez-le-feu immédiat ; qu’elle demande la libération de tous les otages ; qu’elle exige le respect scrupuleux du droit international par toutes les parties au conflit ; et qu’elle s’engage dans un plan de soutien à long terme pour les enfants traumatisés, dont les blessures, visibles ou invisibles, ne guériront pas seules.
Les États, dont la France, doivent redonner toute sa place au droit et à sa force. Face à l’horreur, le droit international humanitaire, les ordonnances de la Cour internationale de justice et la Convention internationale des droits de l’enfant demeurent les seules boussoles valables pour protéger les enfants de Gaza et leur rendre justice.
Le temps n’est plus aux hésitations.
La France, membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, ne peut rester passive face à ce carnage. Elle doit user de tout son poids diplomatique pour faire cesser l’effusion de sang, briser le blocus, garantir l’accès à l’aide humanitaire et protéger ceux qui n’ont plus rien. Elle doit porter la voix de ceux qui n’ont plus la force de crier. Elle doit affirmer que l’inaction face à l’injustice revient à l’accepter.
Il est enfin temps de prendre ses responsabilités, à condition de ne plus détourner le regard, à condition d’oser choisir le camp de l’humanité : celui de l’enfance.
Signataires : Patricia Adam, vice-présidente de la Convention nationale des associations de protection de l’enfant (Cnape), présidente de La Sauvegarde 29 Patrick Atohoun, président d’Emmaüs International Geneviève Avenard, ancienne Défenseure des enfants Thierry Baubet, pédopsychiatre, président de la Ciivise Valérie Becquet, sociologue Ophélie Berger, coprésidente du Syndicat national des médecins de PMI Josiane Bigot, magistrat honoraire, conseillère au Cese sur la protection de l’enfance Armelle Le Bigot-Macaux, présidente du Conseil français des associations pour les droits de l’enfant (Cofrade) Jonathan Bocquet, président de l’Association nationale des conseils d’enfants et de jeunes (Anacej) Myriam Bouali, directrice enfance et famille du conseil départemental de Seine-Saint-Denis Xavier Boutin, coprésident de Coordination humanitaire et développement (CHD) Claire Brisset, ancienne Défenseure des enfants ; Linda Cambon, chercheur en santé publique Adrien Chaboche, délégué général d’Emmaüs International ; Michel Collado, président de La Sauvegarde 93 Tarek Daher, délégué général d’Emmaüs France ; Gilles Delecourt, Directeur général d’Action éducation Yves Denéchère, professeur des universités Marie Derain de Vaucresson, ancienne Défenseure des enfants Isabelle Defourny, présidente de Médecins sans frontières Didier Duriez, président du Secours catholique-Caritas France ; Anne Devreese, présidente du Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE) Christian Favier, président honoraire du conseil départemental du Val-de-Marne Michel Fize, sociologue Cécile Garrigues, coprésidente du Syndicat national des médecins de PMI Marie-Aleth Grard, présidente d’ATD quart monde Anne-Marie Harster, présidente de Solidarité laïque Léa Jeannin, directrice générale de La Sauvegarde 93 Laurent Kaufmann, Secrétaire fédéral de la CFDT éducation, formation, recherche publiques Katy Lemoigne, directrice de Chanteclair Mélanie Luchtens, coordinatrice du groupe enfance de la CHD Thierry Mauricet, coprésident de la CHD Arthur Melon, délégué général du Cofrade Bruno Morel, président d’Emmaüs France Marie Rose Moro, pédopsychiatre, cheffe de service de la Maison de Solenn Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale de la CFDT Éducation, formation, recherche publiquesNoémie Paté, maîtresse de conférences et sociologue Florine Pruchon, coordinatrice de la Dynamique pour les droits des enfants Léa Rambaud, coordinatrice de la Coalition éducation Claude Roméo, directeur honoraire de la protection de l’enfance de Seine-Saint-Denis Jean Pierre Rosenczveig, magistrat honoraire, Président d’Espoir-CFDJ Isabelle Santiago, députée Joëlle Sicamois, Directrice de la Fondation pour l’enfance Pierre Suesser, coprésident du Syndicat national des médecins de PMI Philippe Sultan, membre de la Fondation Copernic Nathalie Tehio, présidente de la Ligue des droits de l’homme Stéphane Troussel, président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis Didier Tronche, président de la Cnape Najat Vallaud-Belkacem, présidente de France terre d’asile Dominique Versini, ancienne Défenseure des enfants.