Twitter Facebook Accueil

Ligue des droits de l'Homme

Section du Pays d'Aix-en-Provence

Archives de l'auteur : psenegas

Fichage génétique : dérapage incontrôlé 27 novembre, 2018

Communiqué de l’Observatoire des libertés et du numérique, dont la LDH est membre

En matière de fichage génétique, le projet de loi de programmation de la justice est devenu un dangereux véhicule législatif, roulant à contre-sens vers un fichage généralisé. Sans aucune concertation ni débat préalable, un amendement au texte prétend tirer les conséquences de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) en juin 2017, qui a jugé le fichage opéré par le fichier national des empreintes génétiques (Fnaeg) disproportionné et contraire au droit à la vie privée en raison de la durée excessive de conservation (de 25 à 40 ans) et de l’impossibilité d’effacement pour les personnes condamnées.

Ce fichier tentaculaire contient aujourd’hui plus de 3,8 millions de traces ADN, résultat des textes et injonctions politiques successifs ayant étendu les possibilités de ficher pour des infractions mineures (plus d’une centaines) des personnes à peine suspectes, sans contrôle préalable du procureur de la République, le refus de prélèvement ADN constituant, enfin, une infraction pénale. Cette alimentation systématique fait que 76 % de personnes fichées sont de simples « mis en causes » et qu’on y trouve encore des enfants et des adultes fichés pour des faits mineurs.

Le gouvernement ayant décidé d’engager la procédure accélérée, le Parlement est sur le point d’adopter des modifications désastreuses.

Les unes ne modifient pas la nature du fichier : la procédure d’effacement serait raccourcie et ouverte aux personnes fichées car condamnées, ce qui ne sera d’aucun effet tant que le critère de l’effacement demeure « si la conservation n’apparaît plus nécessaire compte tenu de la finalité du fichier ».

Les autres ouvrent la voie, non plus à une restriction mais bien à un fichage encore plus massif, et font céder, sans débat, une digue importante.

L’amendement proposant de ne plus restreindre l’extrait d’ADN prélevé aux seuls segments non codants est présenté comme une évidence scientifique et une nécessité pour s’adapter aux évolutions futures. Or cette exclusion était centrale lors de la création du fichier : ces segments « non codant » devaient permettre, sur la base des connaissances scientifiques de l’époque, d’identifier la personne concernée de manière unique sans révéler ses caractéristiques héréditaires ou acquises et c’est sur la base de ce dit garde-fou, scientifiquement contesté depuis, que ce fichier a pu prospérer sans véritable débat démocratique sur l’éthique du fichage génétique. Le balayer d’un revers de main, en prétendant qu’il suffirait désormais de préciser que les informations relatives aux caractéristiques de la personnes ne pourront apparaître dans le fichier vise à endormir la vigilance des citoyens. La Commission nationale informatique et libertés (Cnil) ne s’y est pas trompée, en dénonçant cette évolution lourde, intervenue sans son avis préalable.

Mais bientôt  il suffira qu’un parent, cousin, oncle, tante ait déjà été fiché, même pour une infraction mineure, pour devenir un suspect potentiel. Les députés veulent en effet ouvrir la « recherche en parentèle » au-delà des parents directs. Pour ces recherches dans le Fnaeg, ce ne sont plus 3,8 millions de traces qui seront comparées mais bien davantage, au point que l’on est en droit de se demander qui, désormais, ne sera pas, d’une façon ou d’une autre, fiché.

L’Observatoire des libertés et du numérique exige le retrait de cet amendement et une véritable concertation qui permettrait une prise de conscience citoyenne pour éviter ce « dérapage incontrôlé »  du fichage génétique en France.

Organisations membres de l’OLN : le Cecil, Creis-Terminal, Globenet, la Ligue des droits de l’Homme (LDH), la Quadrature du net (LQDN), le Syndicat des avocats de France (SAF), le Syndicat de la magistrature (SM)

Paris, le 22 novembre 2018

Télécharger le communiqué au format PDF

Source: Fichage génétique : dérapage incontrôlé

Un préfet n’est pas au-dessus des lois 22 novembre, 2018

Communiqué commun LDH et SAF

En ce 20 novembre, jour du 29e anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, qui pose la primauté de sa protection et sa garantie par l’Etat, la Ligue des droits de l’Homme (LDH) dénonce le traitement imposé par la France aux mineurs étrangers qui, chaque jour, traversent à pied ou en train la frontière au point de passage autorisé de Menton.

Les violations des droits fondamentaux de ces enfants, et plus largement des réfugiés, par les pouvoirs publics sont légion dans le département des Alpes-Maritimes. Formulaires de refus d’entrée sur le territoire français préremplis, retenue des personnes migrantes dans des préfabriqués installés en annexe du poste de police aux frontières au-delà de la durée légale, absence d’avis au procureur de la République pour les cas de mineurs non accompagnés d’un majeur et absence de désignation d’un administrateur ad hoc, falsification de la date de naissance des mineurs dans le but de pouvoir les reconduire à la frontière constituent la liste non exhaustive des actes commis illégalement par les autorités publiques.

Face à cette situation inacceptable, des recours ont été engagés et de nombreuses décisions ont été rendues par le tribunal administratif de Nice, constatant l’illégalité des mesures prises par la préfecture du département. Pourtant, les pratiques illégales ont persisté.

Devant ces violations des décisions de justice et le maintien de procédures irrégulières par les CRS et les agents de police aux frontières placés sous son autorité, la responsabilité pénale du préfet des Alpes-Maritimes, monsieur Georges-François Leclerc, doit être recherchée.

Nul n’est au-dessus de la loi, et il revient aux représentants de l’Etat de la faire respecter. C’est pourquoi la LDH, conjointement au Syndicat des avocats de France (SAF) et Myriam Laïdouni-Denis, conseillère régionale d’Auvergne Rhône-Alpes, dépose un signalement auprès du procureur de la République sur la situation des personnes migrantes à Menton, au niveau de la frontière entre la France et l’Italie. Cette démarche exceptionnelle vise à faire respecter l’Etat de droit, les droits des demandeurs d’asile et les droits de l’enfant sur tout le territoire national.

Paris, le 20 novembre 2018

Télécharger en format PDF

Source: Un préfet n’est pas au-dessus des lois

Licra : mauvaise manière, mauvais combat 22 novembre, 2018

Communiqué LDH

L’appel de la Licra visant à priver la Fasti d’une subvention de la Ville de Paris consacrée à un programme de soutien aux migrants présents à la Goutte-d’or, dans le 18e arrondissement, relève d’une conception du débat public qui n’est pas celle de la Ligue des droits de l’Homme (LDH).

Les propos imputés à la Fasti, sans qu’ils soient sourcés, font en tout état de cause partie du débat public et peuvent faire l’objet de toutes les critiques. Ils ne peuvent en aucun cas légitimer une demande de sanction financière au nom d’une doxa qui s’imposerait à tous.

La démarche est d’autant plus déplacée qu’elle conduit à tenter de priver de ressources la Fasti pour des motifs qui n’ont rien à voir avec l’objet du financement demandé.

La LDH déplore que certains s’aventurent, pour la deuxième fois, à préférer la censure au débat démocratique. Ce n’est pas ainsi que le nécessaire dialogue sur la manière de lutter contre le racisme et l’antisémitisme mais aussi contre la xénophobie à l’encontre des étrangers pourra avancer.

La LDH demande à la Ville de Paris de prendre ses décisions de financement associatif au vu des projets présentés et de leur intérêt, sans tenir compte d’oukases, d’où qu’ils viennent.

Paris, le 16 novembre 2018

Télécharger le communiqué au format PDF

Source: Licra : mauvaise manière, mauvais combat

Pour exiger le respect des droits des jeunes isolé-e-s en Ile-de-France 22 novembre, 2018

Rassemblement à Paris, Place de la République, le 20 novembre 2018 à 18h30

Dans le cadre de la campagne nationale lancée en octobre par le collectif Jujie (Justice pour les jeunes isolé-e-s étranger-e-s), les organisations d’Ile-de-France membres de ce collectif appellent à un rassemblement place de la République le 20 novembre, Journée internationale des droits de l’enfant, à 18h30.

Aucun des départements d’Île-de-France ne respecte – loin s’en faut – ses obligations en matière de protection de l’enfance dès lors qu’il s’agit de jeunes isolé-e-s étranger-e-s. Les pratiques sont très diverses mais on constate partout des violations graves et massives des droits fondamentaux de ces jeunes.

Dans les Hauts-de-Seine, les mineur-e-s isolé-e-s sont chaque jour vingt, trente ou plus à attendre devant les locaux de l’aide sociale à l’enfance (ASE) après avoir dormi dehors, peu vêtu-e-s, sans avoir mangé mais seulement deux ou trois d’entre eux ou elles –  quatre les bons jours !  –  sont admis⋅e⋅s pour un entretien d’évaluation, préalable à toute mesure de protection.

A Paris, l’ONG Human Rights Watch a rendu public en juillet 2018 un rapport au titre explicite : « C’est la loterie. Traitement arbitraire des enfants migrants non accompagnés à Paris ». On y lit, entre autres informations scandaleuses, que « de nombreux enfants demandant une reconnaissance légale de leur âge affirment avoir été refusés à l’entrée du DEMIE [la cellule d’évaluation parisienne gérée par la Croix rouge française] par le personnel de sécurité. D’autres subissent un bref entretien d’environ cinq minutes, suivi d’un refus verbal expéditif. »

En Seine-et Marne, une note interne du département a mis fin depuis juin 2017, de façon totalement discriminatoire, à toutes les aides accordées aux jeunes isolé-e-s, ce qui a pour effet de les priver après leur majorité de tout moyen de subsistance et de la possibilité de poursuivre leurs études.

Dans les Yvelines, certain-e-s se voient reprocher de n’être pas demeuré-e-s dans le premier pays de l’Union Européenne (Italie ou Espagne) par lequel ils ou elles sont entré-e-s  et sont remis-e-s à la rue pour ce seul motif. D’autres ne sont pas considéré-e-s comme véritablement isolé-e-s du seul fait d’avoir été aidé-e-s à un moment de leur parcours en France par une association ou un particulier.

L’Essonne a aussi pris l’habitude de motiver ses refus de protection par l’existence d’un hypothétique « soutien logistique par des tiers », en se fondant de surcroît sur des remarques totalement subjectives sur la « maturité et la morphologie » des jeunes. Ceux et celles pris en charge sont mis, le plus souvent, dans des hôtels sociaux, sans encadrement éducatif. En mars dernier, un mineur isolé de 17 ans a été poignardé dans un de ces hôtels.

En Seine-Saint-Denis, le Pôle d’évaluation des mineurs isolés étrangers – aussi géré par la Croix rouge française – donne parfois des rendez-vous deux mois plus tard avant d’examiner la demande de protection d’un⋅e jeune. Pendant ce temps, ils et elles sont laissées à la rue.

Dans le Val d’Oise, seul-e-s les mineur-e-s isolé-e-s qui passent le premier filtre du département peuvent prétendre à une évaluation par l’association mandatée. Par ailleurs, ce département fait systématiquement appel des décisions de placement prises par le juge des enfants lorsqu’elles contredisent le résultat de ses évaluations.

Il est de la responsabilité de élu-e-s des conseils départementaux, et en premier lieu de leurs  président-e-s, de mettre fin à ces pratiques indignes et discriminatoires. Ils et elles doivent garantir une véritable protection de ces jeunes, au regard de leur particulière vulnérabilité (hébergement, soins, accompagnement éducatif). De son côté, l’État doit garantir à ces jeunes un droit à la scolarisation et à la formation professionnelle ainsi qu’un titre de séjour à leur majorité. Il doit aussi interdire l’usage des tests osseux, renoncer à mettre en œuvre le fichier biométrique créé par la loi asile et immigration et en finir avec une politique pénale particulièrement répressive et expéditive.

Rassemblement le 20 novembre 2018

Place de la République

Pour dénoncer les discriminations dont les jeunes isolé-e-s étranger-ère-s sont victimes : des témoignages, des prises de paroles, du mouvement social avec Fanfare Invisible, des clameurs avec Sylvestre l’Aboyeur, des diffusion de court-métrages avec Les Lucioles du doc, distribution de cartes postales, etc.

Le collectif Jujie est composé des organisations suivantes : Adjie (Accompagnement et défense des jeunes isolés) – Admie (Association pour la défense des mineurs isolés étrangers) – Amie Lyon (Accueil des Mineurs Isolés Étrangers) – Boîte sans proket Amiens –  CGT ASE 75 – CGT Educ’action – La Cimade –  CPMJIE (Collectif parisien pour les mineurs et jeunes isolés étrangers) – Cojie 45 – Collectif amiémois des sans papiers – Comité soutien Denko Sissoko Chalons en champagne – Collectif MIE 13 – CRSP Chartres – DEI-France (Défense des enfants international) – Enseignants pour la paix – Fasti (Fédération des associations de solidarité avec tou-te-s les immigré-e-s) – Fédération Sud éducation – FCPE nationale (Fédération des conseils de parents d’élèves) – FERC-CGT (Fédération de l’éducation, de la recherche et de la culture) – FSU (Fédération syndicale unitaire) – Gisti (Groupement d’information et de soutien des immigré-e-s) – Help M.I.E. Saint Étienne – Je suis là! Collectif Jeunes – LDH (Ligue des droits de l’Homme) – Les Midis du MIE – Médecin du monde – Melting passes – Min’de Rien 86 – Mrap (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples) – Paris d’exil – Réseau solidaire Amiémois – RESF (Réseau éducation sans frontières) – Saf (Syndicat des avocats de France) – SNPES-PJJ/FSU (Syndicat national des personnels de l’éducation et du social -PJJ/FSU) – Solidarité sans papiers Creil – Sud CD 93 – Fédération Sud éducation – Syndicat de la magistrature – Timmy.

Paris, le 16 novembre 2018

Télécharger le communiqué au format PDF

 

Source: Pour exiger le respect des droits des jeunes isolé-e-s en Ile-de-France

Enfermement des enfants. Les parlementaires doivent mettre un terme à ce « traitement inhumain et dégradant » 22 novembre, 2018

Communiqué commun de plusieurs organisations, dont la LDH

Alors qu’un groupe de travail parlementaire de la majorité a été constitué en septembre 2018 en vue de l’élaboration d’une proposition de loi sur la rétention des publics vulnérables, notamment des familles, nos 16 organisations appellent l’ensemble des parlementaires à se mobiliser pour mettre fin à la privation de liberté des enfants.

Fortes du soutien de plus de 140 000 personnes signataires d’une pétition, nos organisations réitèrent dans une lettre ouverte (texte ci-dessous) envoyée à tous les parlementaires cette interpellation et leur demandent de se saisir de cette occasion unique pour garantir l’intérêt supérieur de l’enfant en mettant un terme au « traitement inhumain et dégradant » que constitue leur enfermement. L’examen du projet de loi « Asile et immigration » a permis de faire la lumière sur la situation terrible de l’enfermement des enfants en centre de rétention administrative et en zone d’attente. Après plusieurs mois de débat sur ce sujet, il est grand temps que la France mette enfin un terme à l’enfermement des enfants.

La recherche de l’intérêt supérieur de l’enfant doit guider le législateur.
Cette nouvelle proposition de loi est l’occasion de mettre la France en conformité avec la Convention internationale relative aux droits de l’enfant (Cide) et de rappeler à tous un principe essentiel qui devrait aller de soi : on n’enferme pas un enfant !

L’enfermement, quelle que soit sa durée, constitue un traumatisme majeur pour un enfant.
Même lorsqu’il dure quelques heures, il a de graves conséquences sur la santé physique et psychique de ces enfants.

L’aménagement des centres annoncé par le Ministère de l’Intérieur n’est pas une solution acceptable. La présence d’un toboggan ou la mise à disposition de jeux de société ne préservent aucunement les enfants des violences liées à l’enfermement, du risque d’être confrontés à des événements traumatisants (automutilations, suicides, tentatives de suicide, éloignements sous contrainte), et à un environnement carcéral matérialisé par une présence policière constante, les appels réguliers aux haut-parleurs, les grillages, les barbelés et le bruit des verrous.

Interdire l’enfermement administratif sous toutes ses formes.
Aujourd’hui, en France, des centaines d’enfants sont enfermés pour des motifs liés uniquement à leur statut migratoire ou celui de leurs parents.

Concernant la rétention administrative, en 2017, 305 enfants ont été placés en centre de rétention en métropole, soit 7 fois plus qu’en 2013 ; ils étaient 2 493 à Mayotte. Entre le 1er janvier et le 31 août 2018, 135 enfants ont été enfermés, dont 78 enfants de moins de 6 ans.

Concernant la zone d’attente, en 2017, 218 mineurs isolés y ont été maintenus.

À ces chiffres, s’ajoutent les nombreux mineurs non accompagnés interpellés et placés en rétention en tant qu’adultes en raison de défauts dans la reconnaissance de leur minorité et leur prise en charge. C’est l’enfermement des enfants sous toutes ses formes qu’il faut interdire : en France, en outre-mer, en rétention ou en zone d’attente, pour les enfants isolés ou en famille.

Les alternatives à la rétention ne doivent ni être une autre manière d’enfermer ni conduire à la séparation des familles.
Il existe de multiples alternatives à la rétention. Toutes ont en commun la nécessité de devoir être individualisées pour prendre en compte chaque situation : parcours migratoire, présence d’autres membres de la famille en France, situation au regard de l’emploi etc. Toutes les restrictions à la liberté d’une personne doivent être conformes aux principes de légalité, de proportionnalité et de non-discrimination.

L’assignation à résidence, seule alternative utilisée en France aujourd’hui et présentée comme une mesure moins coercitive qu’un placement en rétention permettant de préserver l’unité familiale, n’en demeure pas moins une mesure de contrôle. Elle restreint la liberté d’aller et venir des personnes et génère une situation d’incertitude et de précarité qui a un impact non négligeable sur les enfants. L’hypothèse d’une expulsion permanente est de nature à avoir des effets extrêmement anxiogènes. L’assignation ne préserve pas non plus les enfants du risque d’être confrontés à des événements traumatisants y compris parfois à la violence des interpellations et à celle de l’embarquement sous contrainte de leurs parents. Certains arrêtés vont jusqu’à imposer aux parents assignés à résidence de se rendre avec leurs enfants au commissariat pour pointer, parfois plusieurs fois par semaine et sans prise en compte des horaires scolaires.

Les associations observent également avec inquiétude de nouvelles pratiques préfectorales : les parents sont contraints, avant d’être conduits en rétention, de confier leur enfant à un tiers ou à l’Aide sociale à l’enfance. Dans plusieurs cas, l’un des parents a été expulsé sans son enfant.

Le projet de loi « Asile et immigration » a été un rendez-vous manqué pour mettre enfin un terme à l’enfermement des enfants. A l’approche de la Journée internationale des droits de l’enfant, nos organisations appellent les parlementaires à se saisir de cette opportunité, il est encore temps de se mobiliser.

Paris, le 15 novembre 2018

Signataires : Bernadette Forhan, présidente de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (Acat) ; Cécile Coudriou, présidente d’Amnesty-France, Laure Blondel, co-directrice de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafe) ; Christelle Mezieres, directrice de l’Assfam groupe SOS-Solidarité ; Christophe Deltombe, président de La Cimade, Michel Guilbert, président de Clowns sans frontières ; Jérôme Giusti, président de Droits d’urgence ; Thierry Le Roy, président de France terre d’asile ; Nawel Laglaoui, directrice de Hors la rue ; Malik Salemkour, président et Françoise Dumont, présidente d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) ; Jean François Quantin, co-président du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap) ; Antoine Ricard, président du Centre Primo-Lévi ; Richard Moyon, co-fondateur du Réseau éducation sans frontières (RESF) ; Pierre Suesser, co-président du Syndicat national des médecins de PMI (SNMPMI) ; Laurence Roques, présidente du Syndicat des avocats de France (Saf) ; Jean-Marie Dru, président de l’Unicef-France.

Télécharger le communiqué au format PDF





Source: Enfermement des enfants. Les parlementaires doivent mettre un terme à ce « traitement inhumain et dégradant »

Le 24 novembre, nous marcherons pour en finir avec les violences sexistes et sexuelles 22 novembre, 2018

Communiqué LDH

Le 24 novembre auront lieu, à Paris et partout en France, des marches à l’appel du mouvement « Nous Toutes ». Cette journée d’actions s’inscrit dans le prolongement des prises de parole courageuses des femmes, de la pression des mouvements féministes, de la vague médiatique #Metoo qui contribuent à sortir les violences sexistes et sexuelles du silence, du déni et de l’occultation. L’opinion publique est alertée et sensibilisée. Alors même que ces violences sont unanimement reconnues comme une atteinte massive aux droits fondamentaux, en particulier au droit à l’intégrité physique et psychique, il reste encore beaucoup à faire pour que la légitimité de cette parole soit reconnue et, surtout, suivie d’effets.

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) appelle à participer massivement à cette journée qui doit contribuer à une mobilisation effective des pouvoirs publics et de la société tout entière, pour que celle-ci se dote d’outils lui permettant de mieux identifier, pour mieux prévenir, ces violences. Il s’agit aussi de mieux accompagner les victimes qui trop souvent ne sont pas protégées ou ne font l’objet d’aucune prise en charge adaptée. Enfin, il faut améliorer le dispositif pénal et le mettre en conformité avec les normes internationales, notamment la convention d’Istanbul, en définissant le viol et autres agressions sexuelles en référence à l’absence de consentement sexuel. Sur ce point, la loi votée le 3 août 2018 n’apporte aucune amélioration.

Les violences sexuelles et sexistes qui touchent les femmes de tous les milieux, de toutes les nationalités, dans toutes les sphères de la société (maison, travail, espaces publics…) constituent un des symptômes majeurs d’un ordre patriarcal et machiste qui perdure. A ce titre, elles doivent être combattues sans relâche et avec opiniâtreté. Au-delà de cette urgence, la LDH en appelle à une prise de conscience qui concerne l’ensemble des droits des femmes. Elle réaffirme sa volonté de lutter contre toutes les injustices, les inégalités et les discriminations qui frappent les femmes parce qu’elles sont femmes, et son exigence d’une société fondée sur une égalité réelle entre toutes celles et tous ceux qui la constituent.

Paris, le 14 novembre 2018

Télécharger le communiqué au format PDF

Appel à la mobilisation « Nous Toutes », soutenue par la LDH

Des millions de femmes et d’enfants ont subi et subissent encore des violences sexistes et sexuelles, en France et dans le monde.

Dans l’espace public, au travail, à la maison, nous exigeons de vivre en liberté, sans injures, ni menaces, sans sifflements ni harcèlement, sans persécutions ni agressions, sans viols, sans blessures, sans exploitation de nos corps, sans mutilations, sans meurtres.

Aucune femme ne doit souffrir de violences et d’attaques à l’intégrité corporelle parce qu’elle est femme. Aucune femme ne doit cumuler les violences car elle cumule les discriminations. Nous exigeons que les enfants soient protégés de ces violences.

Nous voulons montrer notre force, notre nombre et notre détermination.

Nous voulons affirmer haut et fort notre solidarité avec les victimes.

Nous voulons en finir avec l’impunité des agresseurs.

Nous exigeons des mesures ambitieuses et des moyens financiers suffisants pour que l’action publique mette la lutte contre les violences en top des priorités : éducation dès le plus jeune âge, formation obligatoire des professionnel-le-s, application de l’ordonnance de protection, augmentation des moyens pour accueillir les femmes victimes…

Nous allons marcher pour montrer notre nombre, notre force et notre détermination.

Après #MeToo, devenons #NousToutes.

Nous invitons toutes celles et ceux qui veulent comme nous, mettre fin aux violences sexistes et sexuelles à marcher avec nous. Rendez-vous le 24 novembre !

Le rendez-vous parisien sera à 14h30 place de la Madeleine.

Consultez la liste des rassemblements organisés partout en France

Rejoignez la Marche et son organisation

Partagez l’événement Facebook de la Marche


Source: Le 24 novembre, nous marcherons pour en finir avec les violences sexistes et sexuelles

Lettre ouverte à Mme Nicole Belloubet, garde des Sceaux, ministre de la Justice 22 novembre, 2018

Lettre ouverte signée par plusieurs organisations dont la LDH

La décision de la direction de l’administration pénitentiaire de ne pas renouveler la convention la liant au Genepi met cette association étudiante en péril. Considérant que « le rôle du Genepi est essentiel pour le respect de la dignité (des personnes détenues) comme pour notre démocratie » de nombreuses associations et personnalités demandent à la garde des Sceaux de rétablir cette convention.

Le Genepi est une association étudiante œuvrant auprès des personnes incarcérées depuis 42 ans. Le 20 septembre 2018, la direction de l’administration pénitentiaire (DAP) a annoncé de manière brutale au Genepi le non-renouvellement de la convention qui les liait. Suite à cette décision, ses bénévoles se sont déjà vu refuser l’accès à de nombreux établissements pénitentiaires dans toute la France entraînant un arrêt des activités auprès des personnes incarcérées. Cette décision menace aujourd’hui la raison d’être, le décloisonnement du monde carcéral, et l’existence même du Genepi en remettant en cause son fonctionnement, sa liberté d’expression et son indépendance.

Cette volonté de faire taire une association qui compte plus de 800 jeunes bénévoles nous choque. Elle constitue un très mauvais signal pour encourager l’engagement de la jeunesse dans les associations.

Il apparaît que le Genepi est la cible d’une sanction politique visant à empêcher les étudiants du Genepi d’entrer dans les établissements pénitentiaires, de témoigner de ce qu’ils y voient et d’alerter sur les conditions de détention des personnes qu’ils y rencontrent.

Alors que 37 établissements ont été condamnés par la Cour européenne des droits de l’Homme et la justice française, que la surpopulation carcérale bat des records et que les conditions de vie des personnes détenues se détériorent gravement, il nous semble que le rôle du Genepi est essentiel pour le respect de leur dignité comme pour notre démocratie.

D’autre part, le Genepi est un lieu d’apprentissage citoyen pour la jeunesse. Depuis 42 ans, elle a permis à des dizaines de milliers d’étudiantes et étudiants de se sensibiliser et réfléchir aux problématiques en lien avec les institutions carcérales et judiciaires. Ces jeunes citoyens, formés et engagés, se retrouvent souvent par la suite dans des parcours professionnels qui croisent ceux de nos organisations, universités ou institutions. Parmi eux se trouvent de futurs acteurs et actrices du monde prison-justice, qui reçoivent ainsi une première formation de qualité dans le cadre d’une structure historique et au contact de la réalité du terrain.

Le non-renouvellement de la convention nationale pourrait signer la mort du Genepi tel qu’il existe depuis 42 ans, alors qu’aucun des gouvernements successifs n’a remis en cause l’utilité publique de l’association ni sa liberté d’expression. Sanctionner une association critique qui est un témoin des conditions de détention au sein des prisons françaises est un fait grave et un déni de démocratie.

Nous vous demandons, Madame la Garde des Sceaux, d’intervenir au plus vite pour rétablir la convention nationale liant le Genepi et la direction de l’administration pénitentiaire, car cette convention est indispensable pour le bon déroulement des actions de ces bénévoles auprès des personnes détenues.

Veuillez agréer, Madame la Ministre, notre considération distinguée.

Associations signataires : A3D, Association des avocats pour la défense des droits des détenus ; ACAT, Action des chrétiens pour l’abolition de la torture ; Afev, Association de la Fondation étudiante pour la ville, Aides ; Anafé, association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers ; Artag, accompagnement social des Gens du voyage, des tsiganes, des voyageurs ; Artogalion ; Bamm, bureau d’accueil et d’accompagnement des migrants ; Ban public ; Bruxelles laïque ; Collectif des associations citoyennes (CAC) ; CGT Syndicat SPIP ; Champ libre ; Coexister ; Comede ; Confluences ; Fédération des acteurs et actrices des danses traditionnelles (FAMDT) ; Fédération des associations réflexion-action, Prison et justice (Farapej) ; Fédération addiction ; Fédération des acteurs de la solidarité ; FièrEs ; Filmogène, Production de films de fiction et de documentaires, courts et longs métrages ; Genepi Belgique ; Gisti, groupe d’information et de soutien des immigré.e.s ; Ingénieurs sans frontières ; La Cimade ; La clé des ondes Bordeaux ; L’Etincelle, pour une éducation populaire politique ; Le Collectif des associations citoyennes ; Le MAG, jeunes LGBT ; Les Désobéissants ; Les Petits frères des pauvres ; Ligue des droits de l’Homme ; Observatoire de l’enfermement des étrangers (OEE) ; OSB IV ; Ovale citoyen ; Radio Campus Paris ; Refeed, Réseau français des étudiants pour le développement durable; RESF, Réseau éducation sans frontières ; Saf, Syndicats des avocats de France ; Secours Catholique ; SNEPAP-FSU, Syndicat national de l’ensemble des personnels de l’administration pénitentiaire ; SNPES-PJJ-FSU, Syndicat national des personnels de l’éducation et du social ; Solidaires Etudiants ; Solidaires Jeunesse et Sports ; Solidaires Justice ; Solidaires national ; SOS pour les prisonniers ; Syndicat Asso-Solidaires ; Syndicat de la magistrature, Syndicat pour la protection et le respect des prisonnier.e.s ; UFISC, Union fédérale d’intervention des structures culturelles ; Unef, Union nationale des étudiants de France.

Personnalités : Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France, ancienne secrétaire nationale, ministre et députée ; Christian Daniel, Directeur des Services pénitentiaires d’insertion et de probation honoraire ; Etienne Noël, avocat ; Gabriel Mouesca, ancien président de l’Observatoire International des Prisons ; Henri Leclerc, avocat pénaliste ; Marie-Pierre De la Gontrie, sénatrice socialiste, Stéphane Mercurio, cinéaste ; Xavier Renou, des Désobéissants.

 

Source: Lettre ouverte à Mme Nicole Belloubet, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Réforme de la justice pénale : stop aux politiques répressives en matière de drogues ! 22 novembre, 2018

Communiqué commun de plusieurs organisations dont la LDH

A la veille de l’examen à l’Assemblée nationale du projet de loi Justice qui propose d’instaurer une amende forfaitaire délictuelle pour le délit d’usages de stupéfiant, nos organisations* dénoncent, à travers la publication d’un livre blanc, les conséquences néfastes de ce projet de réforme sur la santé et les droits des personnes usagères de drogues.

Dans ce livre blanc, les organisations révèlent les failles d’une politique répressive exercée par le gouvernement, qui découle de la loi de 1970. Cette politique s’est révélée inefficace et contre-productive. En effet, la France reste depuis plusieurs années le premier pays consommateur de cannabis et le 3ème pays consommateur de cocaïne en Europe.

Par ailleurs, la mise en application de cette politique a des coûts sociaux et économiques très élevés. Aujourd’hui, 75% du budget dédié à « la politique de lutte contre l’usage de drogues et les conduites addictives » est consacré à la lutte contre les infractions au détriment de la santé, de la prévention et de la réduction des risques.

Inscrit dans le projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, la loi sur l’amende forfaitaire délictuelle entend sanctionner de 300 € tout usage de stupéfiant tout en conservant la peine d’emprisonnement encourue. Cette réforme accentue la politique prohibitive appliquée par le gouvernement et ne fait qu’exacerber la stigmatisation et le mépris des droits des personnes concernées qui les éloignent d’un système de soins et de prévention.

Le Sénat ayant déjà voté favorablement à l’instauration de l’amende forfaitaire, c’est au tour de la commission des lois de l’Assemblée Nationale d’examiner cette réforme le 14 novembre.

Face à cette situation alarmante, les associations appellent les parlementaires :

  • Au retrait de l’article 37 portant sur l’élargissement du dispositif d’amende forfaitaire délictuelle à l’usage illicite de stupéfiants.
  • A l’ouverture d’un débat national pour une nouvelle politique des drogues fondée sur la promotion de la santé publique et le respect des droits humains.

Les signataires : Aides, Auto-Support des usagers de drogues (Asud), Fédération addiction, Grecc, Ligue des droits de l’Homme, Médecins du monde, Norml France, Observatoire international des prisons, Principes actifs, Psycho Actif, SOS addiction, Syndicat de la magistrature et Techno +

Télécharger le livre blanc des associations au format PDF et et sa synthèse.

Lire également la tribune inter associative « Politiques publiques des drogues : sortons de l’impasse » publiée dans Le Monde.

Source: Réforme de la justice pénale : stop aux politiques répressives en matière de drogues !

Lettre ouverte aux leaders des démocraties pour la libération du cinéaste Oleg Sentsov 12 novembre, 2018

Lettre ouverte signée par Malik Salemkour, président de la LDH, Agnès Tricoire, coresponsable de l’Observatoire de la liberté de création,  et Michel Tubiana, président d’honneur de la LDH.

Dans une lettre ouverte, un collectif demande aux leaders des démocraties d’intervenir pour la libération du cinéaste, qui a mené une grève de la faim pendant cinq mois pour attirer l’attention sur le sort des Ukrainiens indûment détenus en Russie. Face au silence du Kremlin, il est temps que les dirigeants européens se mobilisent, estiment-ils.

« En 1980, Andreï Sakharov est exilé dans la ville fermée de Gorki pour avoir alerté le monde du danger que représentait l’Union soviétique (URSS). Assigné à résidence et surveillé en permanence par le KGB, il est coupé du monde durant plusieurs années, pendant lesquelles il effectuera deux grèves de la faim et sera torturé, intubé et nourri de force. Il faudra la Perestroïka (restructuration) et la Glasnost (transparence) en 1986, pour que Mikhaïl Gorbatchev mette fin à son exil et à son calvaire.

Cela n’empêche pas un autre dissident russe, Anatoli Martchenko, de mourir dans sa cellule la même année, le 8 décembre 1986, après onze ans d’emprisonnement et une grève de la faim de 117 jours. Son crime était d’avoir révélé dans un livre la réalité des camps de travail soviétiques. Il disait notamment : « La seule possibilité de lutter contre le mal et l’illégalité consiste à mon avis à connaître la vérité. »

Cette vérité a fissuré puis fait tomber les murs. L’URSS a laissé place à la Russie, l’Ukraine, la Géorgie, les Républiques baltes… Pourtant, c’est toujours pour les mêmes raisons que le cinéaste ukrainien Oleg Sentsov a entamé une grève de la faim illimitée le 14 mai [qu’il a interrompue le 5 octobre pour éviter d’être nourri de force] : faire connaître la vérité, alerter le monde « libre ».

Disparu le 10 mai 2014

La vérité, c’est qu’au XXIe siècle, Oleg Sentsov, ce jeune cinéaste auteur d’un premier film repéré par les grands festivals européens de cinéma, père de deux enfants, a disparu le 10 mai 2014 alors qu’il sortait de chez lui, enlevé par les services secrets dans sa Crimée natale, ce morceau d’Ukraine que les Russes venaient brutalement d’annexer.

(…) »

Lire la lettre en intégralité sur LeMonde.fr

Source: Lettre ouverte aux leaders des démocraties pour la libération du cinéaste Oleg Sentsov

9 novembre 2018 – Tribune collective dont la LDH est signataire : « Politiques publiques des drogues : sortons de l’impasse » publiée dans Le Monde 12 novembre, 2018

Tribune collective signée par Malik Salemkour, président de la Ligue des droits de l’Homme (LDH)

A l’heure où le Canada choisit de légaliser le marché du cannabis, un nombre croissant de pays amorce aujourd’hui des réformes majeures issues d’un constat partagé : l’échec des politiques publiques en matière de drogues fondées sur une logique de répression.

Cette prise de conscience s’observe au niveau international. En effet, le 27 juin 2017, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) invitaient l’ensemble des Etats membres à mettre un terme à la pénalisation de l’usage de drogues, favorisant ainsi la mise en œuvre cohérente des conventions internationales sur le sujet.

Pourtant, face à ce grand mouvement mondial, le gouvernement français s’entête à nager à contre-courant pour maintenir et renforcer un arsenal pénal qui a montré toutes ses limites. De fait, le projet de réforme de la justice pénale qui entend pénaliser tout citoyen majeur pris en flagrant délit d’usage de drogues d’une amende de 300 euros témoigne d’une vision de notre société déconnectée de la réalité et d’une incompréhension de la problématique.

Interdit éducatif et interdiction pénale

Comme le reconnaissent les rapporteurs de la mission d’information de l’Assemblée nationale sur le sujet de l’amende forfaitaire délictuelle, ni le cadre pénal actuel ni l’amende forfaitaire ne sont à la hauteur des enjeux posés par la consommation de produits stupéfiants. Systématiser et standardiser la sanction au détriment de l’accompagnement et de l’orientation vers le soin ne constitue en rien une avancée. Si le souhait du gouvernement est d’optimiser les conditions de travail des acteurs de la chaîne pénale, ne serait-il pas plus responsable d’assumer une réelle dépénalisation de l’usage simple, à l’instar de la Norvège ou du Portugal ?

L’amende se justifie aussi sous l’argument protecteur d’un maintien de l’interdit pour les mineurs, mais seuls les majeurs sont concernés par cette mesure, qui reflète une réelle confusion entre l’interdit éducatif et l’interdiction pénale. Ce projet risque par ailleurs d’entraîner un regain de tension entre les forces de l’ordre et la population, ainsi qu’une charge croissante pour les services de la justice, notamment face aux nombreuses situations de défaut de recouvrement.

Cette réforme ne répondra pas non plus à l’objectif gouvernemental de modernisation de l’action publique. En effet, le renforcement nécessaire du centre national chargé de traiter ce contentieux et l’augmentation des contestations risque de neutraliser les économies de temps réalisées par ailleurs. Les moyens financiers consacrés à la justice sont de toute façon structurellement insuffisants.

Une étape nécessaire mais insuffisante

Nous souhaitons enfin rappeler ici que la dépénalisation de l’usage simple est une étape nécessaire, mais insuffisante pour résoudre les problèmes liés à la lutte contre les réseaux criminels et la corruption. De fait, la question d’une potentielle régulation du marché des produits psychoactifs et l’élaboration d’une politique cohérente encadrant toutes les drogues devraient être une priorité pour le gouvernement.

Nous, personnalités publiques et associations professionnelles ou communautaires, auditionnées par les rapporteurs ou sensibles au sujet traité, signifions notre appel à un débat national sur les drogues. En un temps où tout bouge en ce domaine en Amérique du Nord comme en Europe, la politique de notre pays ne doit pas rester figée dans une dimension essentiellement répressive comme dans le projet de loi en préparation. Un débat national peut permettre d’aboutir à une solution prenant en compte tous les aspects d’une nouvelle législation en matière de drogues, efficace aussi bien au plan de la santé que de la sûreté publique.

Maintes fois amendée, la loi de 1970 a démontré toute son incapacité à protéger la population, notamment les plus jeunes. C’est un échec flagrant auxquels les territoires abandonnés de la République paient un lourd tribut. Sortons de l’impasse, il est grand temps de repasser à l’offensive, dans le bon sens cette fois.

Paris, le 9 novembre 2018

Liste des signataires : Maxime Atton, directeur de NORML France (National Organization for the Reform of Marijuana Laws France) ; Aurélien Beaucamp, président d’Aides ; Philippe De Botton, président de Médecins du monde ; Jean-Michel Delile, président de la Fédération Addiction ; Katia Dubreuil, présidente du Syndicat de la magistrature ; Michel Kazatchkine, Global Commission ; William Lowentsein, président de SOS-Addictions ; Laurence Roques, présidente du Syndicat des avocats de France ; Malik Salemkour, président de la Ligue des droits de l’Homme ; Alessandro Stella, président d’ASUD (Auto-support des usagers de drogues).

Source: 9 novembre 2018 – Tribune collective dont la LDH est signataire : « Politiques publiques des drogues : sortons de l’impasse » publiée dans Le Monde