Communiqué LDH
En censurant la possibilité d’autoriser de nouveau l’acétamipride, le Conseil constitutionnel montre que le droit à un environnement sain est un acquis démocratique incontournable. C’était le sens de la mobilisation très large contre la loi Duplomb, incarnée notamment par la pétition initiée par Eléonore Pattery sur le site de l’Assemblée nationale, qui a recueilli plus de 2,1 millions de signatures, fondée en grande partie sur l’incompréhension et le refus qu’une loi nouvelle puisse être porteuse en 2025 d’un tel recul écologique.
Pour la deuxième fois, le Conseil s’est fondé sur le droit de chacun de vivre dans un environnement sain et équilibré pour censurer la dérogation à l’interdiction d’utiliser cette substance pesticide connue comme « tueuse d’abeilles », comportant également des dangers pour la santé humaine, cette dérogation étant prévue pour tout type d’usage, de manière non encadrée et illimitée dans le temps.
S’il a ainsi assumé la protection du droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, tout en rappelant la nécessité pour le bon déroulement du débat démocratique, que le droit d’amendement « soit pleinement respecté », il n’a pas saisi cette occasion pour formuler des garanties mêmes minimales d’une procédure parlementaire conforme à ces exigences constitutionnelles, alors que les conditions d’un débat de qualité n’étaient pas réunies, en l’absence de véritable délibération à l’Assemblée nationale.
Les limitations portées à la participation du public, et notamment l’organisation d’une permanence par le commissaire enquêteur, ont été validées à l’exception toutefois de la disposition qui permettait de présumer que les réserves d’eau telles que les mégabassines étaient d’intérêt public majeur. Concernant celles-ci, si le Conseil émet des réserves intéressantes, comme l’encadrement des prélèvements dans les nappes souterraines, la nécessité pour l’administration de rechercher si d’autres solutions satisfaisantes ne pourraient pas être trouvées ou de veiller au maintien des espèces dans leur aire de répartition naturelle, il prend acte de leur utilité, qui est pourtant très discutée par de nombreux scientifiques.
On peut regretter l’absence d’une vision très ambitieuse de la démocratie environnementale de la part d’un Conseil constitutionnel qui a néanmoins rempli un office minimum de garde-fou, en considération des exigences de la Charte de l’environnement.
En un temps où l’Etat de droit est régulièrement attaqué, en France comme dans d’autres pays considérés comme des démocraties matures, la LDH (Ligue des droits de l’Homme) rappelle l’importance cruciale pour le bon fonctionnement de la démocratie de l’indépendance d’institutions chargées de contrôler les décisions relevant du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif. Les décisions prises ce jour, malgré des insuffisances, doivent renforcer la détermination à défendre l’Etat de droit et ces institutions de contrôle. Souhaitons que les décisions du Conseil constitutionnel amènent également la représentation nationale à s’interroger elle-même sur son rôle au service de l’Etat de droit en toute matière, qu’elle aurait dû remplir pour cette loi dans le respect de la protection de l’environnement et de la santé de toutes et tous.
Paris, le 8 août 2025