Le 23 mars 2022, la LDH, à l’instar de plusieurs associations de lutte contre l’homophobie, a saisi le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris d’une plainte à l’encontre d’Eric Zemmour à la suite des écrits contenus dans son livre, La France n’a pas dit son dernier mot, paru au mois de septembre 2021 aux éditions Rubempré.
Dans son ouvrage, il est en effet possible de lire : « La déportation en France d’homosexuels en raison de leur orientation sexuelle, comme on dit aujourd’hui, est une légende ».
Ces écrits, par eux-mêmes et du fait de leur diffusion, sont constitutifs du délit de contestation de crime contre l’humanité visé à l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 modifiée.
Le 31 mai 2022, l’association Mousse déposait plainte avec constitution de partie civile.
Si le parquet avait pris des réquisitions aux fins de non-lieu le 27 juin 2023, Eric Zemmour fut renvoyé devant le tribunal correctionnel par une ordonnance du vice-président chargé de l’instruction du tribunal judiciaire de Paris, en date du 10 novembre 2023. La LDH s’est ainsi constituée partie civile aux côtés des associations Mousse, Adheos, Stop Homophobie, InterLGBT, Quazar, Sos Homophobie, Beit Haverm, et les Oublié-e-s de la Mémoire.
L’audience s’est tenue le 10 juin 2025 et le délibéré a été prononcé le 18 septembre 2025.
A cette occasion, les juges ont tout d’abord reconnu sans équivoque que la déportation des homosexuels constitue un crime contre l’humanité en droit pénal international, ce qui constitue une avancée essentielle. Au vu des éléments historiographiques produits par les parties civiles et les témoignages des historiens à l’audience, le tribunal a reconnu la matérialité des déportations d’homosexuels arrêtés pour ce motif en France, y compris hors Alsace-Moselle. Il a affirmé que de tels faits sont susceptibles de constituer un crime contre l’humanité dans la définition actuelle du droit international, au sens de l’article 7 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).
Toutefois, s’agissant de la qualification visant les propos d’Eric Zemmour, le tribunal a jugé que le délit de négationnisme n’était pas constitué, en ce que la législation française réprime la contestation de l’existence d’un ou plusieurs crimes contre l’humanité tels qu’ils sont définis par l’article 6 du statut du tribunal militaire international annexé à l’accord de Londres du 8 août 1945, lequel viserait uniquement les persécutions politiques, raciales ou religieuses, sans inclure les persécutions liées à l’orientation sexuelle.
Or l’article 6, c) du Statut du tribunal militaire international de Nuremberg vise les crimes contre l’humanité en les définissant comme « l’assassinat, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation, et tout autre acte inhumain commis contre toutes populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux, lorsque ces actes ou persécutions, qu’ils aient constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant dans la compétence du Tribunal, ou en liaison avec ce crime ».
Selon les associations partie civiles, la présence du terme « ou bien » permet d’affirmer que la déportation, quelle que soit son motif, entre bien dans les dispositions de l’article 6 c) du Statut du tribunal militaire international de Nuremberg et par conséquent, la négation de cet acte relève du délit de négationnisme.
Par conséquent, nous relevons appel de la décision, et appelons le ministère public à en faire de même afin que la Cour d’appel puisse se prononcer sur ces faits qui ne doivent pas rester impunis.