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Ligue des droits de l'Homme

Section du Pays d'Aix-en-Provence

Archives de l'auteur : psenegas

4 avril 2024 – Tribune “La vision de services publics à vocation universelle est largement remise en cause” publiée dans le monde 7 avril, 2024

Tribune à l’initiative du collectif Nos services publics et signée par Patrick Baudouin, président de la LDH

Lire la tribune dans le Monde

Depuis plus d’un mois, des milliers d’enseignants, d’élèves et de parents d’élèves de Seine-Saint-Denis sont mobilisés pour obtenir des recrutements en adéquation avec le nombre d’élèves, des chaises en état et des bâtiments sans fuites d’eau. Depuis plus d’un mois, au Mans, les équipes des urgences du centre hospitalier sont en grève pour un accueil décent de leurs patients en service psychiatrie. Dans le même temps, cheminots et militants écologistes font entendre leur voix pour la défense du fret ferroviaire.

Ces mobilisations sont marquées par un sentiment commun d’être au pied du mur. Elles ne réclament ni plus ni moins que l’essentiel : de la décence dans les conditions de travail et le respect des droits élémentaires des usagers. Mais leur portée va bien au-delà de ces revendications, de leur territoire ou de leur secteur. Elles disent l’attachement, partout en France, à la vocation universelle des services publics et le refus de la dualisation de la société en cours devant ce qu’il est en train de devenir : un service public pour les pauvres, donc un pauvre service public.

Le glissement est enclenché depuis plusieurs décennies déjà. Au-delà même de l’évolution démographique, les besoins de la population ont progressé – hausse du nombre de jeunes allant jusqu’au baccalauréat, augmentation massive des maladies chroniques, urgence climatique –, pourtant, les moyens des services publics, comprimés, n’ont pas suivi cette évolution des besoins. Un écart croissant s’est constitué entre les besoins de la population et les moyens de l’école publique, de l’hôpital ou de la justice, disparaissant ou construisant un espace pour le développement de services privés.

Changement de nature

Les collèges privés sous contrat ont vu la proportion d’enfants de parents diplômés passer de 29 % en 2003 à 40 % en 2021, pendant que la composition sociale des établissements publics restait stable. Les cliniques privées à but lucratif se sont spécialisées dans les actes les plus programmables et les plus rentables – elles effectuent 75 % des actes de chirurgie ambulatoire –, là où l’hôpital public continue d’assurer la majorité des urgences, des soins les plus lourds et de l’accueil des patients précaires. Transports, justice, Sécurité sociale : tous les secteurs sont concernés par cette évolution. Même le domaine régalien de la sécurité, que l’on pourrait penser sanctuarisé, voit se multiplier les emplois de vigiles privés.

Ces transformations vont bien plus loin que la seule dégradation des conditions de travail et d’accueil. Lorsque la possibilité est donnée à une fraction de la population de faire sécession, c’est l’ensemble du service public qui change de nature. Quand le service public n’accueille plus que les moins aisés, il devient un moindre service public. Résulte de ce processus la cristallisation d’une société à deux vitesses. Un service public inaccessible et aux moyens limités pour les moins favorisés, qui demande à ses agents de classer et de contrôler plutôt que d’accompagner, et des offres de services payantes pour ceux qui en ont les moyens. Ces services onéreux n’offrant, au demeurant, pas la moindre garantie de qualité, comme l’ont récemment montré les scandales des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes ou des crèches privées.

C’est ce basculement que refusent les mobilisations actuelles : de moins en moins à même de répondre aux besoins essentiels de la population, les services publics perdent leur capacité à maintenir la cohésion de la société. Les agents en éprouvent tous les jours les conséquences, à rebours de leur éthique professionnelle : tri des patients, sélection des élèves, recul des droits des usagers. Si c’est en Seine-Saint-Denis, dans les zones rurales, auprès des patients atteints de maladies psychiatriques, parmi les personnes étrangères ou celles qui sont le plus éloignées du numérique que cette fragilisation commence à se faire sentir, le mouvement en cours est bien celui d’une fracturation de l’ensemble de notre société. Et les gouvernements successifs ont aggravé cette fracture : d’une main, en faisant de la « baisse des dépenses » l’horizon indépassable des services publics, et, de l’autre, en finançant sur les fonds publics les écoles sous contrat, les cliniques commerciales, ou en favorisant l’accroissement des assurances complémentaires, et parmi elles de celles à but lucratif.

Rendre les droits aux citoyens

Aujourd’hui, la vision de services publics à vocation universelle est largement remise en cause. Des décisions politiques, très concrètes, pourraient au contraire en réaffirmer le caractère essentiel, à rebours des discours et des actes les plus récents : en systématisant la présence de guichets de proximité en complément d’une offre « dématérialisée », en garantissant l’accès à un logement social sur l’ensemble du territoire, en réaffirmant la vocation de mixité sociale et scolaire de l’école publique, en travaillant à un droit, à une alimentation et à une eau de qualité pour toutes et tous, en refusant le vote de lois de préférence nationale, en assurant un accueil digne aux droits à l’aide médicale de l’Etat, à l’asile et au séjour, etc. Revendiquer des services publics universels n’est pas une abstraction : c’est au contraire rendre, très concrètement, leurs droits aux citoyennes et aux citoyens, et leur liberté et leurs moyens de faire leur travail aux agents des services publics.

Les défis auxquels nous faisons face, au premier rang desquels l’urgence écologique, ne pourront être relevés qu’à condition d’une mobilisation réelle pour construire du commun et préparer l’avenir. Les évolutions actuelles des services publics, qui engagent notre société, appellent un débat de société majeur. A rebours de cette nécessité démocratique, les décisions budgétaires passent désormais exclusivement outre le vote du Parlement, par 49.3, voire, à l’instar des récents plans d’économies, par décret. Il nous appartient aujourd’hui de revendiquer cet horizon de services publics pour toutes et tous, et d’organiser le débat dans la société.

Premiers signataires : Patrick Baudouin, président de la LDH (Ligue des droits de l’Homme) ; Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT ; Arnaud Bontemps, coporte-parole du collectif Nos services publics ; Julia Cagé, économiste ; Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France ; Claire Lemercier, historienne, directrice de recherche du CNRS à Sciences Po ; François Molins, ancien procureur général près la Cour de cassation ; Louise Paternoster, enseignante en maternelle et syndicaliste en Seine-Saint-Denis ; Gilles Perret, réalisateur ; Kim Reuflet, présidente du Syndicat de la magistrature ; Florence Rigal, présidente de Médecins du monde ; Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre.

Voir plus de signataires

Source: 4 avril 2024 – Tribune “La vision de services publics à vocation universelle est largement remise en cause” publiée dans le monde

Sortir de l’impasse pour la libération de Georges Abdallah 7 avril, 2024

Communiqué et lettre ouverte commune, dont la LDH est signataire, adressée au président de la République

Au mépris du droit, la France retient Georges Ibrahim Abdallah en détention depuis 37 ans. En détention depuis 1984, cela fait 25 ans qu’il aurait dû être libéré. Le 6 avril, il passera une nouvelle fois son anniversaire en prison. Il est aujourd’hui le prisonnier politique le plus ancien dans une prison française, et l’un des plus anciens en Europe. Cette situation est totalement contraire à la tradition de la France en matière de droits humains. Par deux fois, alors que la justice d’application des peines avait décidé la libération de Georges Ibrahim Abdallah, les ambassades des Etats-Unis et d’Israël, et même Hillary Clinton, alors secrétaire d’Etat des Etats-Unis, sont intervenues pour peser sur le cours de la justice de notre pays, et obtenir qu’il ne soit pas libéré et conduit au Liban. Nous le réaffirmons : ce n’est ni aux Etats-Unis ni à Israël de dicter la justice en France. Le 8 juin dernier, Georges Ibrahim Abdallah a déposé une nouvelle demande de mise en liberté. Le 29 juin, nos 14 organisations ont écrit au président de la République, pour lui demander de faire prendre sans tarder, par le ministre concerné, son arrêté d’expulsion vers le Liban. Nous lui avons demandé de prendre cette décision bien avant le jugement du tribunal de l’application des peines, en la mettant à l’abri de toute pression, et en rétablissant ainsi son caractère purement technique. Une fois ces conditions réunies, c’est à la Justice qu’il appartiendra, en toute responsabilité, en toute indépendance et de manière pleinement effective, de se prononcer sur sa libération comme elle l’a déjà fait à deux reprises. Nous n’avons toujours pas reçu de réponse à ce courrier. La durée de la détention de Georges Ibrahim Abdallah, et le blocage des décisions de justice par le pouvoir exécutif, sont une honte pour la France. Il est urgent d’y mettre fin. Il est grand temps que Georges Ibrahim Abdallah soit enfin libéré, et puisse rejoindre sa famille au Liban ! À l’occasion de son anniversaire le 6 avril, nous tenons à rappeler ce déni de justice et envoyons de nouveau notre courrier au président de la République.

Signataires : Anne Tuaillon, présidente de l’Association France Palestine Solidarité, Patrick Baudouin, président de la LDH (Ligue des droits de l’Homme), François Sauterey, co-président du Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les peuples, Mouvement de la Paix, Union Juive Française pour la Paix, Une Autre Voix Juive, Confédération Générale du Travail, Fédération Syndicale Unitaire, Union syndicale Solidaires, Syndicat national des enseignements de second degré, Confédération paysanne, Parti Communiste Français, Parti de Gauche, Ensemble ! Mouvement pour une alternative de gauche, écologiste et solidaire.

Lettre ouverte adressée au président de la République

Monsieur le Président de la République,

Le 29 juin 2023, nous vous avons adressé ce courrier resté sans réponse à ce jour.
Par ce courrier, nous nous souhaitions attirer votre attention sur le cas de M. Georges Ibrahim Abdallah, condamné en 1987, libérable depuis 1999, et toujours en prison, alors que le tribunal de l’application des peines s’est prononcé par deux fois pour sa libération. En nous adressant à vous, nous nous plaçons sur le strict terrain du Droit.
En l’absence d’une décision d’expulsion par le gouvernement français, les décisions de la Justice pour sa libération conditionnelle n’ont pas pu être appliquées, et il est aujourd’hui le prisonnier politique le plus ancien dans une prison française, et l’un des plus anciens en Europe. Cette situation est totalement contraire à la tradition de la France en matière de droits humains.
Rappelons qu’en 2012 le tribunal de l’application des peines s’était prononcé pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah, sous réserve de son expulsion. Par la voix du ministre de l’Intérieur de l’époque, l’exécutif français, soumis à de fortes pressions internationales, avait refusé de signer l’arrêté d’expulsion. C’est donc le pouvoir exécutif qui, en dernier ressort, a rendu impossible la libération d’un détenu décidée par la Justice, une situation totalement anormale dans un système démocratique de séparation des pouvoirs.
Les spécificités juridiques du dossier de George Ibrahim Abdallah, dont la peine n’avait pas été assortie d’une interdiction de territoire sur l’ensemble du territoire français, font que sa libération ne pourra intervenir que si un arrêté d’expulsion (en l’occurrence vers le Liban comme il le demande) est pris à son sujet.
Le 8 juin dernier, Georges Ibrahim Abdallah a formulé une nouvelle demande de liberté conditionnelle. Dans ces conditions, nous vous demandons de faire prendre sans tarder, par le ministre concerné, son arrêté d’expulsion vers le Liban. En prenant cette décision bien avant le jugement du tribunal de l’application des peines, en la mettant à l’abri de toute pression, vous en rétablirez le caractère purement technique. Une fois ces conditions réunies, c’est à la Justice qu’il appartiendra, en toute responsabilité, en toute indépendance et de manière pleinement effective, de se prononcer sur sa libération.
Monsieur le Président de la République, nous vous demandons solennellement de ne pas manquer cette occasion d’en finir avec une détention dont la durée est une honte pour la France. Par la signature rapide d’un arrêté d’expulsion, le pouvoir exécutif n’a pas à décider sur le fond de la libération de Georges Ibrahim Abdallah, il remettra simplement la décision entre les mains de la Justice.
Nous sollicitons de votre part un rendez-vous pour évoquer avec vous plus précisément cette affaire, et la manière de sortir enfin d’une impasse qui est un déni de justice et qui ternit l’image de la France.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre très haute considération.

Signataires : Anne Tuaillon, présidente de l’Association France Palestine Solidarité, Patrick Baudouin, président de la LDH (Ligue des droits de l’Homme), François Sauterey, co-président du Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les peuples, Mouvement de la Paix, Union Juive Française pour la Paix, Une Autre Voix Juive, Confédération Générale du Travail, Fédération Syndicale Unitaire, Union syndicale Solidaires, Syndicat national des enseignements de second degré, Confédération paysanne, Parti Communiste Français, Parti de Gauche, Ensemble ! Mouvement pour une alternative de gauche, écologiste et solidaire.

Paris, le 3 avril 2024

Télécharger la lettre ouverte

Source: Sortir de l’impasse pour la libération de Georges Abdallah

La ville d’Aix doit pavoiser les deux drapeaux israélien et palestinien 5 avril, 2024

La ville d’Aix-en-Provence doit afficher son souhait d’une paix juste et durable en pavoisant les deux drapeaux israélien et palestinien.

Amis et camarades, je vous parle au nom du Collectif aixois Paix et Justice au Proche-Orient.

Cela fait maintenant 6 mois que le drapeau israélien flotte au balcon de l’hôtel de ville. Au lendemain du 7 octobre dernier la maire a fait pavoiser ce drapeau, en signe de solidarité avec Israël victime des attaques du Hamas. Nombreux sont les aixois et aixoises qui ont partagé cette manifestation de solidarité. 6 mois après, le maintien seul de ce drapeau prend un caractère particulier dans le contexte que nous connaissons et que la Cour internationale de justice caractérise de risques de génocide à Gaza. Le maintien sur le fronton de la Mairie du seul drapeau israélien, alors même que le nombre de victimes palestiniennes ne cesse de croître depuis six mois, relève du positionnement politique de la maire et est contraire au principe de neutralité qui lui incombe sur un bâtiment public.

Alors, oui, nous exigeons la présence du drapeau palestinien.

Le génocide en cours, que la CIJ dénonce, nous le voyons à l’œuvre chaque jour. Le 1er avril, l’armée israélienne, d’après le journal Le Monde, n’a laissé derrière elle que ruines, cendres et cadavres dans l’hôpital Al-Shifa ; l’hôpital a été transformé en cimetière où 300 corps ont été retrouvés. Le même jour 7 employés de l’ONG américaine World Central Kitchen qui livre de la nourriture dans la bande de Gaza ont été tués dans une frappe israélienne. 33000 morts, plus de 76000 blessés, 14000 enfants tués, c’est un véritable carnage auquel se livre le gouvernement israélien. La famine et le manque de soins menacent désormais toute la population. Les Palestiniens n’en peuvent plus de ce cauchemar sans fin, il faut que ça s’arrête.

Nous exigeons que le pouvoir israélien applique les décisions de la CIJ qui imposent à Israël d’arrêter ses opérations assassines à Gaza et en Cisjordanie ; oui, aussi en Cisjordanie où colons et soldats tuent chaque jour, pendant que tous les yeux sont tournés vers Gaza.

Nous nous félicitons que le Conseil de sécurité de l’Onu appelle à un cessez-le-feu. C’est une étape positive. Netanyahou doit s’y conformer et les États-Unis l’y contraindre.

Il faut que l’exigence du rétablissement de l’aide humanitaire, de l’arrivée de l’eau, des médicaments soit accompagnée de mesures contraignantes : si le gouvernement d’extrême-droite de B. Netanyahou ne veut pas s’y plier, alors des sanctions fortes doivent être mises en place par l’ONU, par l’UE, par la France. Et il faut suspendre l’accord d’association Israël-UE tant que le gouvernement israélien ne se conforme pas au droit international.

D’ores et déjà, la France doit cesser toute coopération militaire et sécuritaire et doit exiger de l’Union européenne l’interdiction de livraison d’armes vers l’Etat d’Israël. Le parlement canadien l’a voté, le gouvernement français doit le faire.

C’est pour toutes ces raisons que nous exigeons :

➢le cessez-le-feu immédiat et permanent,

➢la fin du blocus et l’entrée sans restriction de l’aide humanitaire

➢la libération de tous les prisonniers politiques palestiniens,

➢la libération des otages israéliens détenu·e·s par le Hamas,

  • l’ouverture de négociations sur la base des résolutions de l’ONU devant conduire à un état palestinien viable à côté d’Israël.

Amis et camarades,

Nous aspirons tous à la paix. Les deux peuples, israélien et palestinien, ont les mêmes droits à une paix juste et durable. C’est pourquoi c’est une nécessité morale et il est donc impératif que soient pavoisés enfin les deux drapeaux en solidarité avec toutes les victimes, en y ajoutant le drapeau arc-en-ciel de la paix.

Permettez-moi, pour conclure, de reprendre certains des propos de mon ami Hervé Guerrera sur la responsabilité particulière de la ville d’Aix.

La capitale historique et culturelle de la Provence doit envoyer un signal fort, visible, inédit. La Provence c’est cette terre méditerranéenne qui de tout temps s’est nourri des influences extérieures du Nord comme du Sud. Elle a su magnifiquement conjuguer dans sa langue originale l’apport latin et l’imaginaire de l’islam d’Al Andalous. Elle a toujours été le pays du vivre ensemble dans le respect des croyances de chacun.

Et Aix-en-Provence a bâti sa richesse sur la justice et le droit.

En plus de cette histoire au sein de la Méditerranée, en plus de cette tradition du droit, Aix est aussi bien d’autres choses : c’est la ville de Peiresc, l’ami de Galilée qui s’opposait à l’obscurantisme, le Pays d’Aix est celui du Marquis de Méjanes un des acteurs hélas méconnu des Lumières, qui nous a laissé avec sa bibliothèque un magnifique outil, Aix est la ville de Cézanne qui a révolutionné l’art de peindre, de son ami Zola dont la soif de liberté et de justice n’est en rien étrangère à son lieu de naissance, Aix est la ville de Frédéric Mistral qui a rappelé l’importance de nos fêtes, de leur liesse populaire , et donc de la convivialité, de l’échange, du respect . Au nom de tout cela, les messages que notre ville délivre se doivent d’être en lien, en cohérence avec la belle et grande histoire de notre cité.

Ayons, ensemble, Madame la Maire, ce courage, conforme à notre Histoire, au rôle essentiel de notre ville, soyons cette voix qui compte dans la région, en France, en Europe, dans le monde méditerranéen, pavoisons enfin en signe de paix, au fronton de la maison commune, les deux drapeaux israélien et palestinien !

PROVENCE, ISRAËL, PALESTINE nous sommes tous les enfants de cette mare nostrum dont l’immense majorité des habitants et des habitantes aspirent à la Paix et à la Justice !

5 avril 2024

27 mars 2024 – Tribune de Patrick Baudoin “Halte aux semeurs de haine et de violence” publiée sur médiapart 29 mars, 2024

Tribune de Patrick Baudouin, président de la LDH

Lire la tribune sur Mediapart

Selon un rapport du service statistique du ministère de l’Intérieur publié le 20 mars 2024, les crimes ou délits commis en raison de l’ethnie, de la nation, d’une prétendue race ou de la religion ont augmenté en France de 32% en 2023 par rapport à 2022. Ce sont 15.000 infractions à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux qui ont été répertoriées sur l’ensemble du territoire français, soit 8.600 crimes ou délits, ainsi que 6.400 contraventions – dont la hausse, de 4%, est plus faible. Le nombre de crimes et délits enregistrés au dernier trimestre 2023 a doublé par rapport à la même période de 2022, cette nette accélération étant due principalement au nombre d’actes antisémites enregistrés depuis les attaques du Hamas du 7 octobre 2023 et la riposte consécutive israélienne. Mais il en va de même d’un accroissement des actes anti-Arabes et antimusulmans. Quant aux étrangers originaires d’un pays africain, ils sont particulièrement touchés, représentant à eux seuls 11% des victimes de délits ou crimes à caractère raciste, alors qu’ils ne constituent que 4% de la population totale.

Ce bilan résumé est d’autant plus alarmant qu’il ne traduit sans doute pas toute la réalité des infractions commises et de leur augmentation, alors même qu’il est noté que seules 4% des victimes portent plainte. La dégradation est manifeste depuis la montée en puissance des idées de l’extrême droite qui se traduit notamment par la libération d’une parole décomplexée, y compris de la part de responsables politiques. On se rappellera les propos tenus à l’Assemblée nationale nouvellement composée par un député Rassemblement national (RN), Grégoire de Fournas, interrompant un collègue noir, Carlos Martens Bilongo, d’une tonitruante injonction « qu’il retourne en Afrique ». C’est un autre parlementaire, Meyer Habib, député des Français établis hors de France, qui interviewé sur une radio qualifie de « cancer » la population palestinienne. C’est Salime Mdéré, vice-président du Conseil départemental de Mayotte, qui s’exprimant à la télévision sur les jeunes « gamins » immigrés n’hésite pas à dire qu’« il faut peut-être en tuer ». C’est Jocelyn Dessigny, député RN de l’Aisne, qui lors d’une cérémonie des vœux fait le lien entre les crimes commis « et l’augmentation de la population subsaharienne qui nous vient d’Île-de-France ». A l’encontre de ces trois derniers élus, la LDH a saisi la justice. Confrontée à une multiplication des propos et des actes à caractère discriminatoire, notre association est impliquée dans de nombreuses autres actions judiciaires, par exemple pour la distribution de tracts, tags, libelles incitant à la haine contre des centres d’accueil des étrangers ou contre des gens du voyage, contenant des propos néonazis, ou invitant, comme c’est le cas à Calvi, à mettre « les juifs dehors »

En présence de telles dérives, génératrices d’un climat de haine et de violence, il importe de ne rien laisser passer, et de rappeler sans cesse que le racisme sous toutes ses formes n’est pas une opinion mais un délit qui doit être poursuivi, pour lequel s’impose une ferme réponse pénale. La responsabilité est d’abord politique. Début 2023, le gouvernement français a rendu public, avec un certain éclat, son plan national quadri-annuel de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine. Lors de la présentation de ce plan, Elisabeth Borne, alors Première ministre, a affirmé avec force que « Dans notre République, toutes les haines doivent être combattues et toutes les discriminations traquées ». On ne peut que souscrire à la proclamation d’une telle conviction. Le plan proposé comporte lui-même des lignes directrices louables : nommer, mesurer, exploiter les phénomènes de racisme, d’antisémitisme et des discriminations ; mieux éduquer dans le cadre des établissements scolaires et des activités sportives ; mieux former l’ensemble des agents de la fonction publique notamment dans la police ; promouvoir une citoyenneté numérique ; sanctionner les auteurs et accompagner les victimes en améliorant le recueil et le traitement des plaintes. Cependant force est de constater qu’un an plus tard, peu de progrès ont été accomplis et qu’au contraire la situation s’est aggravée. Preuve est faite qu’il ne suffit pas de belles intentions lorsqu’à l’inverse des buts affichés on se complaît dans la stigmatisation des étrangers, comme l’ont montré les débats nauséabonds ayant entouré l’adoption de la honteuse loi sur l’asile et l’immigration.

Un sursaut de toute urgence est nécessaire pour enrayer la progression, à défaut inexorable, de l’antisémitisme, de l’islamophobie, du racisme anti-Noirs et de toutes autres sortes de discriminations. La normalisation des idées d’extrême droite a insidieusement multiplié les doses du poison qui menace notre vivre-ensemble. Le déchirement créé par une résurgence barbare et meurtrière du conflit israélo-palestinien nourrit la recrudescence de propos et actes inadmissibles. La LDH exhorte les pouvoirs publics, en y associant la société civile et les syndicats, à faire du rétablissement de la paix entre les communautés une priorité. Cet impératif exige une détermination absolue à combattre, sans aucune sélectivité, toutes les discriminations racistes, antisémites, xénophobes, sexistes, homophobes, transphobes. Comme toujours dans son histoire, la LDH apportera sa part de contribution à cette lutte contre les semeurs de haine qui mettent en péril notre commune humanité.

Patrick Baudouin, président de la LDH

Source: 27 mars 2024 – Tribune de Patrick Baudoin “Halte aux semeurs de haine et de violence” publiée sur médiapart

Face au risque de génocide a Gaza, cessez-le-feu immédiat ! Sanctions contre l’Etat israélien ! 29 mars, 2024

Appel à rassemblement le 30 mars 2024, à 14h, place de la République à Paris

Le 30 mars est chaque année une journée particulière en Palestine : c’est « la Journée de la Terre » commémorée depuis le 30 mars 1976. Cette année-là, la police israélienne tire sur des Palestiniens qui manifestaient contre la confiscation de leurs terres.

Le 30 mars est devenu pour tous les Palestiniens et Palestiniennes dans le monde la « Journée de la Terre ».

Cette année, nous commémorerons son 48ᵉ anniversaire qui prend évidemment un caractère particulier dans le contexte que nous connaissons et que la Cour internationale de justice (CIJ)  caractérise de « risque de génocide ».

Nous exigeons que le pouvoir israélien applique les résolutions de l’Onu, les décisions de la CIJ qui imposent à Israël d’arrêter ses opérations assassines à Gaza et en Cisjordanie (où colons et soldats tuent chaque jour, pendant que tous les yeux sont tournés vers Gaza).

Nous nous félicitons que le Conseil de sécurité de l’Onu appelle à un cessez-le-feu. Netanyahou doit s’y conformer !

Le risque aujourd’hui est que, plus encore que les bombes, la famine et le manque de soin tuent demain encore plus de civils, d’enfants, de femmes ou de vieillards à Gaza.

Il faut que l’exigence du rétablissement de l’aide humanitaire, de l’arrivée de l’eau, des médicaments soit accompagnée de mesures contraignantes : si le gouvernement d’extrême-droite de B. Netanyahou ne veut pas s’y plier, alors des sanctions fortes doivent être mises en place.

D’ores et déjà, la France  doit cesser toute coopération militaire et sécuritaire et doit exiger de l’Union européenne (UE) interdiction de livraison d’armes vers l’Etat d’Israël). Le parlement canadien l’a voté, le gouvernement français doit le faire.

Nous exigeons :
➢le cessez-le-feu immédiat et permanent,
➢le retrait complet des forces israéliennes de Gaza et de Cisjordanie,
➢l’entrée sans restriction de l’aide humanitaire et le rétablissement du financement de l’UNRWA,
➢la libération de tous les prisonniers politiques palestiniens,
➢la libération des otages israéliens détenu·e·s par le Hamas,
➢l’arrêt immédiat de la vente à Israël d’armes par des états de l’UE et la fin de toute coopération militaire et sécuritaire avec cet Etat,

Pour contraindre le pouvoir israélien à respecter le droit international, il faut que des sanctions à son encontre soient mises en place par la France, par l’UE par l’Onu.

En Europe, il faut suspendre l’accord d’association Israël-UE tant que le gouvernement israélien ne se conforme pas au droit international.

La France et l’UE doivent reconnaître immédiatement l’Etat de Palestine, sur ses frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale, au coté de l’Etat israélien, seul cadre, conforme aux résolutions de l’Onu, permettant, une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens.

Nous appelons à manifester, se rassembler pour la « Journée de la Terre » partout en France sur les bases de cet appel.

Organisations du Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens signant cet appel : Mrap, UAVJ, Mouvement de la Paix, Snes-FSU, PCF

Avec le soutien de la LDH (Ligue des droits de l’Homme)

Paris, le 28 mars 2024

Source: Face au risque de génocide a Gaza, cessez-le-feu immédiat ! Sanctions contre l’Etat israélien !

26 mars 2024 – Tribune “Il ne faut pas ajouter les origines migratoires de nos parents dans le recensement” publiée sur Libération 27 mars, 2024

Tribune de Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, et Patrick Baudouin, président de la LDH

Lire la tribune sur Libération

Nous ne voulons pas que le recensement contribue à une classification «ethnique», par Sophie Binet et Patrick Baudouin

Alors que les informations recueillies par le recensement changent rarement, l’Insee vient de soumettre une demande de modification du texte règlementaire du recensement de la population au Conseil d’Etat pour, revenant sur une position solidement établie, pouvoir demander le pays de naissance des parents lorsqu’ils sont nés à l’étranger. Pour la première fois, le recensement nous classerait, toutes et tous, selon un critère qui ne nous caractérise pas directement, mais qui fait référence à nos parents. Il ajouterait aux données qui nous sont personnelles d’âge, sexe, lieu de naissance, nationalité … le lieu de leur naissance, à eux !

La fonction première du recensement est de compter la population pour chaque collectivité locale. Avec les données qu’il recueille sur les personnes et les logements, il permet aussi d’apporter, jusqu’au niveau territorial le plus fin permis par le secret statistique, les informations de base utiles à la prise de nombreuses décisions (publiques ou privées, nationales ou pour un quartier) comme sur les équipements, les infrastructures, les services publics. Du fait d’un questionnaire qui est volontairement court, le recensement ne se prête pas à l’analyse de phénomènes plus complexes mais, avec ses données de base, il est indispensable pour construire de bonnes statistiques.

Parce que le recensement est une opération qui appartient en propre à l’Etat, ses classements font référence ; il « construit » des catégories qui définissent la perception qu’une société a d’elle-même. En établissant le lien entre chaque personne et la migration d’une génération antérieure comme un élément central de notre identité, il banaliserait une notion dangereuse. Nous ne voulons pas que le recensement contribue à une classification « ethnique » des personnes alors que le débat public est envahi par les préjugés, que l’on y stigmatise sans cesse celles et ceux qu’on considère « venir d’ailleurs », ne pas être « de souche». Le comptage des origines étrangères de la population à des échelons territoriaux fins n’aurait pour premiers usages que de permettre d’en cibler les populations, de chercher à attiser des peurs, à manipuler l’opinion à l’occasion de « faits divers » qui se prêteraient aux discours de rejet et d’exclusion.

Nous affirmons que pour lutter contre les discriminations subies par les descendant.e.s d’immigré.e.s, l’ajout n’est ni pertinent, ni nécessaire. Il est inutile et dangereux.

Nous ne voulons pas de cette question dans le recensement, ni dans des fichiers administratifs, mais il en va autrement pour les enquêtes par sondage de la Statistique Publique : la question y est régulièrement posée. Ces enquêtes fournissent des analyses pertinentes des inégalités et des discriminations parce qu’elles peuvent mettre en relation ces origines géographiques parentales avec les origines sociales, les parcours d’éducation, la date d’arrivée en France, et bien d’autres informations, ce que le questionnaire du recensement ne peut pas faire. Avec ces enquêtes, et aussi avec les testings et observations de terrain, il est possible de mettre en évidence les divers facteurs des discriminations et où ils opèrent. Ces enquêtes sont indispensables et nous les soutenons.

La réponse au recensement a toujours été obligatoire. Pourtant, la Commission Nationale Informatique et Libertés, consultée, a demandé qu’il soit facultatif de répondre à cette nouvelle question et que les personnes recensées en soient clairement informées. C’est une première et cela montre bien que la question est « sensible », mais cela ne répond pas à notre alerte qui va au-delà.

Alors que la même question avait été refusée en 2010 après discussions dans les instances de concertation, aucun débat public n’a eu lieu récemment. Ce débat public est nécessaire pour permettre de faire valoir les arguments. Ainsi, si nous partageons avec la Défenseure des Droits le combat contre les discriminations racistes et la détermination de voir mises en place des politiques publiques efficaces, nous ne partageons pas son soutien à cette nouvelle question dans le recensement.

En tant qu’actrices et acteurs de la société civile, nous déplorons la faiblesse des politiques qui s’attaquent aux discriminations. L’apport très important de connaissances qui existe déjà, issu de la statistique publique et des études de terrain, permet d’en estimer l’ampleur. Ces données peuvent être mobilisées pour un débat public de qualité sur les actions à entreprendre. Alors n’allons pas, avec la modification du questionnaire du recensement au fort potentiel de stigmatisation, à contresens de ce qui est nécessaire.

Source: 26 mars 2024 – Tribune “Il ne faut pas ajouter les origines migratoires de nos parents dans le recensement” publiée sur Libération

Violences policières sur fond de racisme et de sexisme en marge d’une manifestation contre la réforme des retraites 27 mars, 2024

Deux policiers de la BRAV-M sont poursuivis pour menaces et violences volontaires dans le cadre d’arrestations en marge de la manifestation contre la réforme des retraites.

Le 20 mars 2023, en marge d’une manifestation contre la réforme des retraites, étaient arrêtées de nombreuses personnes dont le jeune Souleymane, étudiant tchadien de 23 ans. Ce dernier sera particulièrement malmené par les forces de l’ordre et, au cours d’un long enregistrement audio rendu public, peuvent être entendus des gifles, menaces, insultes et commentaires humiliants de la part des fonctionnaires de police.

Le jeune homme portera plainte pour injures et violences volontaires en réunion par personnes dépositaires de l’autorité publique avec la circonstance aggravante de racisme mais aussi pour des faits d’agression sexuelle et de menace de commettre des crimes de nature sexuelle, l’intéressé affirmant avoir été saisi par les parties génitales lors de sa palpation.

Une autre étudiante est également partie dans cette affaire. L’intéressée avait porté plainte pour des faits de violence en réunion par personnes dépositaires de l’autorité publique, classée sans suite.

Le ministère public n’a pas poursuivi les faits d’agression sexuelle et d’injures à caractère racial envers le jeune tchadien et n’a pas retenu les circonstances aggravantes de racisme et de sexisme.

La LDH (Ligue des droits de l’Homme) se mobilise aux côtés des victimes pour que les poursuites soient complètes et que les fonctionnaires mis en cause soient jugés pour l’ensemble des faits qui leur sont reprochés.

L’audience, pour laquelle la LDH se constitue partie civile, était initialement prévue le 7 mars 2024 et a été reportée au 5 septembre 2024.

Source: Violences policières sur fond de racisme et de sexisme en marge d’une manifestation contre la réforme des retraites

Cannes : quand le préfet et le maire s’unissent pour empêcher une manifestation contre la spéculation immobilière sur leur territoire 27 mars, 2024

Durant le marché international des professionnels de l’immobilier, du 12 au 15 mars 2024, la préfecture des Alpes-Maritimes et le maire de Cannes décident d’interdire toute manifestation sur un grand nombre d’axes routiers et piétonniers à Cannes, et l’une d’elles en particulier visant à la dénonciation de la spéculation immobilière et la crise du logement. La LDH (Ligue des droits de l’Homme) continue son combat pour l’exercice effectif des libertés d’expression et de réunion.

Dans le cadre de la mobilisation nationale et européenne du droit au logement, l’association Droit au logement (Dal) dépose le 28 février 2024 une déclaration de manifestation auprès des services de la préfecture des Alpes-Maritimes.

L’association projetait en effet un rassemblement statique du lundi 11 mars à partir de 14h jusqu’au 13 mars 2024 à 20h, sur le terre-plein de la place du Général de Gaulle, afin de dénoncer la spéculation immobilière et la crise du logement. Ce rassemblement statique devait être ponctué par des débats ainsi que deux déambulations sur l’allée de la Liberté Charles de Gaulle et ses abords piétonniers.

Le 11 mars 2024 à 9h04, le préfet des Alpes-Maritimes publie un arrêté portant interdiction de manifester sur la voie publique dans la commune de Cannes pendant le marché international des professionnels de l’immobilier (MIPIM) du 12 au 15 mars 2024.

La LDH décide alors d’introduire un référé-liberté à l’encontre de cet arrêté qui constitue une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont les libertés d’expression, d’opinion et de réunion.

Le 12 mars 2024, le juge des référés relève d’une part que, si l’arrêté contesté mentionne de « précédents incidents survenus au mois de mai 2023 lors du festival international du film de Cannes ayant occasionné plusieurs troubles à l’ordre public », aucun fait ou évènement précis, concernant tant l’évènement ainsi mentionné que l’évènement en cause dans la présente instance, n’est toutefois invoqué, qui permettrait de considérer que la mesure la plus contraignante pour les libertés d’expression, d’opinion et de manifestation soit la seule envisageable.

D’autre part, le juge retient qu’il ne résulte pas de l’instruction que le risque de voir converger un grand nombre de manifestants, ou à tout le moins des manifestants au profil de nature à rendre prévisibles des troubles à l’ordre public, soit établi.

Enfin, et eu égard aux risques de troubles à l’ordre public susceptibles d’être causés par la tenue d’une manifestation au cours du MIPIM, dont la réalité n’est pas avérée au regard de l’ensemble des éléments du dossier mais qui ne peut cependant être exclue, le juge constate qu’il n’est en tout état de cause pas établi que le préfet des Alpes-Maritimes ne disposerait pas, dans l’objectif de prévenir ces risques, de moyens moins attentatoires aux libertés fondamentales que la mesure litigieuse.

Dès lors, l’arrêté préfectoral est suspendu.

Insatisfait de la décision ainsi rendue, le maire de la commune de Cannes décide alors dans la foulée du jugement de prendre un arrêté visant de manière détournée à interdire la manifestation déclarée.

Le maire a en effet entendu interdire toute liberté de circulation des piétons et des automobilistes, se traduisant par des regroupements sur la voie publique, des sollicitations intempestives des usagers ou des occupations abusives de la voie publique notamment à l’aide de structures mobiles sur la place du Général de Gaulle et ses abords.

Et plus encore, la mairie a disposé un ensemble de poubelles visant à entraver la manifestation prévue.

Aussi, la LDH saisit de nouveau le tribunal administratif de Nice d’un référé liberté.

Le 13 mars 2024, le tribunal administratif de Nice suspend l’arrêté du maire de Cannes en ce qu’il était constitutif d’une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales d’expression et d’opinion.

Source: Cannes : quand le préfet et le maire s’unissent pour empêcher une manifestation contre la spéculation immobilière sur leur territoire

Refus de subvention de la Compagnie de théâtre Arlette Moreau : les associations se mobilisent  27 mars, 2024

Quand le respect du contrat d’engagement républicain (CER) constitue un prétexte à la censure, la LDH (Ligue des droits de l’Homme)  s’engage, avec d’autres organisations, pour défendre les libertés d’association, d’expression et de création artistique.

Compagnie théâtrale engagée, la Compagnie Arlette Moreau réalise des spectacles de rue interactifs visant à sensibiliser les spectateurs sur d’importantes problématiques contemporaines.

A titre d’exemple, avant les évènements de Sainte-Soline, cette structure avait engagé des actions militantes non violentes sur les marchés pour interpeller les habitants sur les risques liés à la construction des mégas-bassines.

Depuis 2022, elle utilise  une attraction artistique originale, le Désopressor 3000, visant à sensibiliser le public sur les violences sexistes et sexuelles en jouant des saynètes de comportements sexistes ordinaires et en invitant les spectateurs à réagir.

Pour ce spectacle, la compagnie de théâtre a reçu une subvention en 2021 de la part de la direction régionale aux droits des femmes et à l’égalité (DRDFE) de Nouvelle-Aquitaine, dont la compagnie a demandé le renouvellement en 2023.

Le 21 juillet 2023, la DRDFE opposait à la compagnie un refus de subvention au motif d’une prétendue violation du contrat d’engagement républicain : le rapport d’activité ferait état « d’engagements militants non conformes au respect des lois de la république consigné dans le CER », sans plus de précision.

La Compagnie Arlette Moreau a alors déposé un recours en annulation à l’encontre de cette décision que leur conseil qualifiée à juste titre de censure.

A cet égard, au-delà des dommages subis par la compagnie, cette décision préoccupe, plus largement, le monde associatif. En effet, le motif avancé, tiré de l’existence d’engagements militants de la part de cette association, pourrait être appliqué largement, à une très grande partie des associations, qui présentent des engagements similaires et ainsi, aboutir, à terme, à une autocensure généralisée de la part du monde associatif, ce alors même que l’engagement citoyen est intrinsèquement lié à leur identité.

Aussi, au regard de l’atteinte manifeste aux libertés d’association, d’expression et de création que constitue une telle décision, la LDH avec la Cimade, le Cac, le Dal, le Gisti, le Mrap, le Saf et l’Ufisc sont intervenus volontairement, le 6 mars 2024, au soutien du recours en annulation introduit par la Compagnie Arlette Moreau.

Dans leur intervention volontaire, les organisations démontrent que la décision, qui porte une atteinte grave à ces libertés fondamentales, repose sur une interprétation erronée des obligations imposées par le contrat d’engagement républicain et que la loi « confortant les principes de la République » ne saurait être interprétée comme permettant aux collectivités publiques de cesser de financer des associations au motif qu’elles tiendraient des discours ou mèneraient des actions contestataires.

Source: Refus de subvention de la Compagnie de théâtre Arlette Moreau : les associations se mobilisent 

France : la FIDH saisit le Comité européen des droits sociaux pour enfin garantir les droits des ultramarin-es 22 mars, 2024

Communiqué commun LDH, FIDH et Kimbé Rèd F.W.I.

Avec le concours de la LDH (Ligue des droits de l’Homme) et de Kimbé Rèd F.W.I., la FIDH saisit le Comité européen des droits sociaux du Conseil de l’Europe pour exiger de la France l’accès urgent à l’eau potable en Guadeloupe, des réparations pour la pollution au chlordécone et l’application de la Charte sociale européenne. Avec cette action en justice, nos organisations de défense des droits humains entendent défendre l’universalisme des droits pour l’ensemble du territoire français, mettant ainsi un terme à des inégalités historiques entre l’outre-mer et l’hexagone.

L’accès à l’eau potable est un droit humain. La pollution au chlordécone est une atteinte au droit à la santé. La France doit appliquer la Charte sociale européenne partout sur son territoire. La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), avec le soutien de la LDH (Ligue des droits de l’Homme) et de Kimbé Rèd F.W.I., association antillaise de défense des droits humains, a déposé, ce 18 mars 2024, une réclamation collective auprès du Comité européen des droits sociaux (CEDS) du Conseil de l’Europe à l’encontre de la France. Répondant à l’appel de la société civile antillaise porté par l’association Kimbé Rèd French West Indies (F.W.I.), cette réclamation dénonce la violation du droit à l’eau potable et à l’assainissement en Guadeloupe, ainsi que l’empoisonnement au chlordécone des populations de Guadeloupe et de Martinique.

La FIDH et la LDH sont mobilisées depuis de nombreuses années dans les territoires français dits d’outre-mer pour la reconnaissance des droits de l’environnement en tant que droits humains à part entière. Le droit à l’eau potable fait partie de ces droits. Ils garantissent la jouissance du droit fondamental à un environnement sûr, propre et sain.

En Guadeloupe, jusqu’à 80% de l’eau produite est perdue à cause de fuites dans les réseaux, occasionnant des coupures quotidiennes pouvant durer de plusieurs jours à plus d’un mois. Lorsque l’eau est disponible, elle n’est pas potable en raison de la vétusté des canalisations (non correctement entretenues depuis 30 ans), de la défaillance de l’assainissement (80% des stations d’épuration ne sont pas aux normes) et de la pollution au chlordécone.

En Guadeloupe et Martinique, alors que 90% de la population des deux îles, soit plus d’un demi-million de personnes, sont touchées par cette pollution à travers la contamination de l’eau, des sols et de l’alimentation, la traçabilité du chlordécone à titre préventif et la désintoxication de l’être humain à titre curatif ne sont toujours pas garantis et, fin 2023, seules quarante-cinq personnes avaient été indemnisées pour le préjudice subi.

A ce jour, la France refuse d’appliquer des mesures d’urgence pour garantir l’accès à l’eau potable en Guadeloupe et d’octroyer réparation et indemnisation aux victimes du chlordécone aux Antilles, pourtant recommandées par plusieurs instances des Nations unies. En refusant d’assumer les responsabilités qui lui incombent, le gouvernement français viole plusieurs droits fondamentaux des populations ultramarines, pourtant consacrés par la Charte sociale européenne révisée et de nombreux textes internationaux ratifiés par la France, tels que les droits à la santé, à l’éducation, au logement et à la protection sociale ainsi que le droit à l’eau potable et à un environnement sûr, propre et sain, consacrés respectivement par l’Assemblée générale des Nations unies en 2010 et en 2022.

Afin de défendre un accès égalitaire et effectif à ces droits, et à tous les droits humains des personnes résidentes dans les territoires français d’outre-mer, la FIDH, avec le soutien de la LDH, dénonce donc non seulement ces violations graves et répétées, mais également ce traitement discriminatoire, qui serait inimaginable dans l’hexagone. En effet, en dépit de son attachement au principe constitutionnel d’égalité et au respect du droit international des droits humains, y compris du droit à la non-discrimination et des droits sociaux qui sont inscrits dans la Charte sociale européenne, la France n’a pas expressément reconnu, à ce jour, l’applicabilité de la Charte et de ses protocoles à ces territoires non métropolitains.

« Il est essentiel que le Comité clarifie la pleine application de la Charte et de ses protocoles aux territoires français ultramarins, afin d’engager la responsabilité de la France pour les violations des droits sociaux commises en outre-mer », déclare Patrick Baudouin, président de la LDH.

« La France ne peut pas continuer à ignorer les problèmes récurrents des Antilles. Ils n’ont que trop duré. » déclare Elena Crespi, responsable du bureau Europe de l’Ouest à la FIDH. « Elle doit enfin reconnaître que la Charte sociale européenne doit s’appliquer à l’ensemble de ses territoires. En donnant une suite favorable à la présente réclamation collective, le CEDS inviterait la France à prendre plus sérieusement en compte les inégalités historiques entre l’hexagone et les territoires ultramarins, et à se rapprocher de la réalisation des nombreux droits fondamentaux dans ces derniers ».

—La Charte Sociale Européenne du Conseil de l’Europe, pendant de la Convention européenne des droits de l’Homme, garantit le respect des droits économiques et sociaux fondamentaux tels que l’emploi, la protection contre la pauvreté, l’éducation, le logement, la santé et la non-discrimination par les Etats qui l’ont ratifiée ou ont ratifié sa version revisée.En 1973, la France a ratifié la Charte sociale européenne de 1961 et, en 1999, la Charte révisée de 1996, ainsi que le Protocole additionnel prévoyant un système de réclamations collectives de 1995, qui prévoit sa justiciabilité. La France fait, de plus, partie des Etats ayant accepté l’ensemble des dispositions de la Charte.

Paris, le 21 mars 2024

Source: France : la FIDH saisit le Comité européen des droits sociaux pour enfin garantir les droits des ultramarin-es